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7 mai : un choix de civilisation

7 mai : un choix de civilisation
7 mai : un choix de civilisation

Par Jean-Yves Le Gallou, président de la Fondation Polémia ♦ Nous présentons ici deux entretiens donnés par Jean-Yves Le Gallou à deux médias de la réinfosphère : le quotidien Présent et le site de réinformation régionale Breizh Info. L’auteur tire les leçons du premier tour et présente le vote du 7 mai comme un choix de civilisation : le choix d’une civilisation française, européenne et chrétienne face au nihilisme marchand, porte ouverte à l’islamisme.
Polémia


Quelles sont les 4 grandes leçons à retenir des résultats du premier tour ?

Première leçon : chapeau les juges ! L’alliance des juges et des médias peut détruire un candidat. Fillon n’a pas su faire face (malgré le Trocadéro) à une campagne d’une rare violence. Le Système lui a fait payer – cher, très cher – sa tiédeur à l’égard de la doxa internationale de l’OTAN et la campagne conservatrice qui lui avait permis de gagner les primaires.

Deuxième leçon : chapeau les médias ! Les médias dirigés par des milliardaires alliés aux médias de « service public » ont permis le succès de Macron, candidat hors sol, héritier de François Hollande. Chapeau les médias, c’est une belle revanche sur le Brexit, l’élection de Trump et la débâcle de Juppé aux Primaires.

Troisième leçon : belle résistance des candidats anti-Système. Marine Le Pen/Mélenchon – mais aussi Fillon victime d’une campagne méthodique de démolition médiatico-judiciaire – rassemblent plus de 60% des voix, plus de 70% même avec les remarquables 5% de Dupont-Aignan et les 5% des autres candidats.

Quatrième leçon : Marine Le Pen se qualifie pour le deuxième tour, battant avec 7,6 millions de voix les précédents records du FN en nombre de suffrages ; mais non en pourcentage : 21% des suffrages exprimés étant en net recul sur les 28% des élections régionales et sur les premiers sondages qui pronostiquaient aussi le chiffre de 28%. Cela mériterait réflexion.

Qu’avez-vous pensé de la campagne de premier tour de Marine Le Pen ?

Elle a été difficile : elle est partie de 28% (aux dernières élections régionales et dans les premiers sondages) et a fini à 21%, arrachant de peu la qualification malgré des circonstances très favorables (matraquage judiciaire et médiatique de Fillon, islamisme, attentats).

Elle a souffert de la récupération de la fonction tribunitienne par Mélenchon et du « vote utile » (!!!) en faveur de Fillon. Et elle a traîné comme un boulet la question de l’euro et son programme économique.

Emmanuel Macron contre Marine Le Pen, est-ce l’affrontement entre mondialisme et nationalisme ?

C’est plus large que cela : ce sont les périphéries enracinées face aux métropoles mondialisées. Comme le dit le blogueur Ulysse : la vision anthropologique de Macron « c’est l’homme déraciné, substituable, convocable à loisir, transformable, en pièces détachées ».

Marine Le Pen a raison de dire : « Pour mon adversaire, il n’y a pas de pays, il y a un territoire ; il n’y a pas de peuple, mais une population. (…) Mon adversaire a une vision désincarnée de la France. Il est le candidat de l’oligarchie ; je suis la candidate du peuple. »

Macron c’est un monde hors sol fait de banquiers, de journalistes et de people mais les gens qui votent pour lui croient s’acheter un statut social de « winner » à bon marché.

L’embuscade de Whirlpool a fait revenir le réel dans la campagne, que vous a inspiré cet épisode (et « l’anecdote » d’Attali juste auparavant) ?

C’est une très belle séquence ! Macron est allé sur le terrain de son adversaire et celle-ci a fait une OPA sur son déplacement. Les images – huées d’un côté, applaudissements de l’autre – parlent d’elles-mêmes. Marine Le Pen a gagné la bataille de l’électorat populaire.

Il lui reste à gagner la bataille de l’électorat de droite. Cela ne sera pas possible sur l’économie mais sur les valeurs et l’identité. D’où la nécessité d’un « Whirpool »  de droite.

Sur quoi devrait-t-elle faire campagne  selon vous durant l’entre-deux-tours pour rassembler ?

Deux thématiques : le peuple contre l’oligarchie, les permanences identitaires et sociétales contre la déconstruction.

Elle doit surtout imposer les questions régaliennes et d’immigration dans le débat : c’est là-dessus qu’elle peut récupérer des voix chez les électeurs de Fillon et de Mélenchon (en dehors de la partie musulmane de son électorat qui se mobilisera massivement pour Macron).

Elle doit refuser de se laisser balader sur les questions monétaires par les journalistes et, quitte à parler d’économie, tacler le programme fiscal pharaonique de Macron : prélèvement accru sur les retraites (hausse de la CSG), augmentation des taxes foncières, impôt à la source – et 55 milliards de propositions de dépenses non financées car avec Macron, c’est comme avec ses prédécesseurs : un problème ? Une dépense, souvent en pure perte.

Macron ce n’est pas seulement le candidat des banques et des Frères musulmans, c’est aussi irresponsabilité et immaturité.

Quid des positionnements de François Fillon et de la garde rapprochée des Républicains ?

Les dirigeants des Républicains ont critiqué « Emmanuel Hollande » pendant la campagne pour se rallier à lui le 23 avril entre 20h et 20h30.

Difficile de faire plus minable ! Les Raffarin, Copé, Fillon, Baroin illustrent à merveille ce que Nietzsche appelle « le dernier homme » : « Et ils clignent de l’œil ». Ce sont des soumis.

La droite castor a donc décidé de « faire barrage », mais les fissures se font de plus en plus nombreuses…

Il faut opérer une grande distinction entre les chefs de LR et la base.

Les chefs se sont ralliés très rapidement au vote Macron pour pouvoir continuer à être invités sur les plateaux télé sans être mis en accusation. François Fillon, pourtant démoli par le Système, s’est aussi soumis très vite. Sans doute a–t-il cru souscrire (à tort probablement) une police d’assurance pour l’étouffement de ses « affaires ».

La base, elle, a du mal à voter pour celui qu’on lui a présenté à juste titre comme « Emmanuel Hollande », un partisan d’une France hors sol, sans limites, ouverte à l’immigration et soumise à l’islam, un partisan de la loi Taubira et de la marchandisation du corps (GPA, PMA).

Les élus LR semblent pourtant tenir…

Oui, la surprise vient du fait que la mobilisation « antifasciste » ne fonctionne pas du tout comme en 2002. Beaucoup regimbent et le disent. Parmi les « chefs », Wauquiez laisse ouvert le vote blanc ou l’abstention, ce qui est aussi la position de Sens commun. Mais d’autres vont plus loin et entendent « faire barrage à Macron », c’est-à-dire qu’ils préconisent, au moins implicitement, de voter pour Marine Le Pen. C’est le cas de Christine Boutin, de Jean-Frédéric Poisson du PCD, de certains députés LR comme Mariani ou Dhuicque, de certains maires comme Richard Trinquier, le maire de Wissous, de nombreux élus divers droites (Versailles Avenir, par exemple), sans oublier la prise de position de Ludovine de la Rochère et de la Manif pour tous (LMPT). Il y a manifestement une forme de déglaciation à l’égard du Front National.

Pourquoi les conditions d’une recomposition à droite ne sont-elles pas encore totalement réunies ?

Parce que les uns et les autres sont échaudés par 30 ans de relations conflictuelles. Face à la diabolisation, le Front National a cru, ou feint de croire, qu’il pouvait arriver tout seul au pouvoir, ou qu’il lui suffisait de draguer des personnalités isolées comme Guaino. Non. Il lui faut des alliés structurés. De ce point de vue l’accord avec Nicolas Dupont-Aignan est une étape historique. Le cordon sanitaire est brisé. Les rapprochements avec la « droite hors les murs » sont aussi nécessaires, comme n’ont cessé de le dire Robert Ménard et Karim Ouchikh. Marine Le Pen doit  tendre la main à tous ces hommes et ces femmes prêts à se rapprocher et ne pas donner l’impression que pour elle « il n’y aurait bon bec qu’à gauche ». Il faut mobiliser au profit de la candidate nationale les orphelins du fillonnisme. D’autant que la défense de l’identité culturelle et anthropologique sont des thèmes partagés. Face à Macron, c’est un choix de civilisation. Le choix d’une civilisation française, européenne et chrétienne face au nihilisme marchand, porte ouverte à l’islamisme.

Vous risquez-vous à un pronostic pour le 7 mai ?

La barre des 40% sera probablement franchie mais une victoire de Marine Le Pen reste difficile. Car la campagne point Godwin (indécente récupération d’Oradour par Macron, persécutions de Jalkh et j’en passe) est revenue. Cela marche moins qu’avant, cela patine, mais cela contribuera quand même à mobiliser et faire voter le marais conformiste, cœur de l’électorat de Macron.

Au fur et à mesure que Marine Le Pen se rapprocherait des 50% la contre-mobilisation se ferait et rendrait la victoire plus difficile. D’autant qu’il resterait l’ultima ratio : la fraude électorale. D’autant plus facile que le FN n’a pas la structure pour contrôler effectivement la régularité du vote et que c’est le « camp du bien » qui contrôle les bureaux de vote. Seul un raz-de-marée pourrait assurer la victoire.

Qu’est ce qui va changer par rapport à François Hollande si Emmanuel Macron est élu ?

Hollande a un excellent bilan. Je m’entends : il a beaucoup déconstruit l’école, la famille, les permanences identitaires et sociales. Macron, ce serait Hollande en pire !

Comment voyez-vous les élections législatives se profiler derrière ?

Si la logique de la Ve République s’applique, le président nouvellement élu aura une majorité, les partisans des vaincus s’abstenant. C’est une hypothèse probable mais… la machine peut se gripper. Et dans ce cas nous reviendrons à une logique de IVe République et des majorités de circonstances. Avec l’omelette coupée aux deux bouts et une « grande coalition » comme en Allemagne ou aux Pays-Bas.

Jean-Yves Le Gallou
3/05/2017

Propos recueillis par les rédactions de Présent et de Breizh.info

Image : Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia

Jean-Yves Le Gallou

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