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Contentieux des étrangers : deux poids, deux mesures

Contentieux des étrangers : deux poids, deux mesures

par | 23 avril 2014 | Politique

Depuis trente ans, ce ne sont plus les parlementaires qui font les lois sur l’immigration, ce sont les juges qui imposent leur jurisprudence en interprétant les textes internationaux. Or les hommes qui ont imposé cette évolution – les Belorgey, les Genevois, les Tuot – ne sont pas neutres, ce sont des militants immigrationnistes. C’est cette même dictature militante qui a obtenu qu’un magistrat administratif de Lyon, François Lagarde, se voie dessaisi de tout dossier sur le contentieux des étrangers. Son crime ? Avoir reçu comme élu UMP à Orléans une délégation à la lutte contre l’immigration clandestine : une responsabilité légale considérée comme une faute. En clair, un magistrat qui veut simplement appliquer la loi là où il est élu ne peut la dire là où il juge. En revanche, un militant qui combat les lois limitant l’immigration se voit chargé, lui, de les interpréter ! Ainsi fonctionnent le Conseil d’État et les tribunaux administratifs. C’est deux poids, deux mesures : les immigrationnistes peuvent juger, les légalistes sont interdits de jugement. En 1789, les Français ont abattu les parlements d’Ancien Régime pour moins que cela.
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Réélu au premier tour des élections municipales, le maire UMP d’Orléans, Serge Grouard, a annoncé la nomination d’un conseiller municipal en charge de « la lutte contre l’immigration clandestine ». Ce conseiller municipal est par ailleurs magistrat au tribunal administratif de Lyon qui a pour principale activité de juger les étrangers qui contestent leur expulsion et il avait demandé sa mise en disponibilité à partir de janvier 2014 pour faire campagne. Il s’apprête à revenir siéger au tribunal administratif au début du mois de mai.

Cette annonce n’est pas passée inaperçue. L’opposition de gauche comme les militants des droits de l’homme ont lancé une dénonciation citoyenne d’une « idéologie qui n’est même pas celle du FN ». L’info est devenue un feuilleton de la presse locale et a été reprise par les radios nationales, notamment par RMC, et par Rue 89-Lyon. Elle a commencé à circuler mercredi 16 avril dans le petit milieu des avocats qui assurent la défense des étrangers en situation irrégulière.

Ce jeudi, la commission du barreau de Lyon s’est saisie de la question pour envisager des suites à donner. Du côté du Syndicat des avocats de France (SAF, classé à gauche), le président de la section de Lyon explique que « d’autres juges peuvent avoir le même type d’opinion. La différence c’est qu’il sort du bois ». Il ajoute surtout que le SAF regardera de près le retour du juge en mai prochain : « Quand il reviendra en mai prochain au tribunal de Lyon, ce magistrat ne doit plus juger de contentieux sur les étrangers pour qu’il n’y ait pas de suspicion sur les décisions qui vont être rendues ».

Ainsi il reviendrait à des avocats dévoués à la cause des étrangers en situation irrégulière, en d’autres termes les clandestins, d’imposer des magistrats de leur bord et de récuser ceux qui ne leur plaisent pas au nom de la lutte contre le racisme et le populisme.
Il serait effectivement plus simple et plus commode pour l’exercice de leur activité d’avoir affaire à des juges acquis à la cause immigrationniste qu’à un magistrat déterminé à faire appliquer les lois sur les étrangers et l’immigration.

Ce sont ces mêmes avocats auxquels fait très nettement allusion le rapport d’octobre 2013 sur « l’évolution et la maîtrise des dépenses de contentieux à la charge du ministère de l’Intérieur » réalisé par l’Inspection générale de l’Administration à la demande du ministère de l’Intérieur, du ministère des Finances et du ministre délégué chargé du Budget sur le contentieux des étrangers. Ce rapport déplore la juridictionnalisation du droit des étrangers qui entraîne un coût insupportable et émet un avis fortement réprobateur sur le rôle des avocats spécialisés :

  • « Certains avocats se sont spécialisés dans ce contentieux avec des motivations politiques ou humanistes, en lien avec le monde associatif qui soutient les étrangers. Par contre, il semblerait que d’autres avocats voient dans le contentieux des étrangers, contentieux plutôt simple techniquement et répétitif, une source lucrative de revenus. Plusieurs interlocuteurs de la mission, y compris des magistrats administratifs, lui ont ainsi indiqué avoir régulièrement constaté que des requérants ignoraient être conseillés par un avocat.
  • « La mission a en outre constaté qu’en matière de contentieux des étrangers, le juge d’appel annulait fréquemment la décision de première instance. Si celle-ci a donné lieu au versement par l’État de frais irrépétibles, ils devraient être reversés au comptable public par le bénéficiaire. Certains avocats refusent, sans qu’aucune suite ne soit donnée, au motif que ce ne sont pas eux qui étaient destinataires des frais irrépétibles mais leur client alors que ce dernier leur versait cette somme. »

La lutte pour l’immigration humanitaire a bon dos

Le président du tribunal administratif de Lyon a saisi le « collège de déontologie » qui siège auprès du Conseil d’État. On peut le comprendre. Il est cependant dommage que sa démarche apparaisse isolée car il existe beaucoup d’autres cas où un « collège de déontologie » aurait pu ou pourrait être saisi. Donnons quelques exemples.

Le GISTI, association particulièrement active d’information et de soutien des immigrés, a été fondé au début des années 1970 par quatre jeunes énarques, pourtant astreints à un devoir de réserve. Des magistrats participent à la rédaction de documents du GISTI. C’est le cas de Patrick Henriot, magistrat et membre du Syndicat de la magistrature qui a rédigé les articles suivants :

  • « Cette gauche qui a horreur du vide » pour le n° 97 de la revue Plein Droit de juin 2013 dont le thème était : « Les étrangers attendent la gauche », sujet politique s’il en est ;
  • « Les Sages capitulent » pour le n° 90 de la même revue dédié aux « réfugiés clandestins ».

Certains de ces magistrats participent à des colloques comme celui de novembre 2008 consacré à « la défense de la cause des étrangers en justice » :

  • Bruno Genevois, président de section au Conseil d’État, sur l’histoire du GISTI ; -Jean-Michel Belorgey, président de la section des rapports et des études du Conseil d’État, sur l’insuffisance des moyens d’exécution ;
  • Ronny Abraham, conseiller d’État, et Olivier Jaulin, vice-président du Syndicat de la magistrature, sur les retombées collatérales du contentieux des étrangers.

Prenons le cas de France Terre d’Asile dont l’objet est « la promotion du droit d’asile et des droits des migrants en France et en Europe ». Le président est Jacques Ribs, conseiller d’État honoraire. Frédéric Tiberghien, maître des requêtes au Conseil d’État et membre du Conseil supérieur de la magistrature est membre du bureau.

Jean-Michel Belorgey, déjà cité, est membre du Conseil d’État dont il présida la Section du rapport et des études jusqu’au 3 novembre 2009. Il a été président du conseil d’administration du Fonds d’aide et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations (FASILD).
Membre de la Cour nationale de droit d’asile (CNDA) il a, selon le Figaro, beaucoup heurté ses pairs en déclarant dans Télérama que ses collègues étaient « des chasseurs, des exterminateurs d’hommes » au prétexte qu’ils y regardaient à deux fois avant d’accorder le statut de réfugié et qu’ils faisaient tout simplement leur travail.

Manifestons une pensée émue pour Bernard Stirn, président de la section du contentieux du Conseil d’État qui prit si vite une décision le 9 janvier 2014 dans l’affaire Dieudonné, et pour Thierry Tuot, auteur du rapport La Grande Nation, pour une société inclusive sur l’intégration des immigrés.

Enfin, concernant la déontologie, comment ne pas évoquer la mise en examen de Madame Martres, présidente du Syndicat de la magistrature, dans l’affaire de l’infâme et terrifiant « Mur des cons » ?

Eh bien oui, que toutes les « commissions de déontologie » soient saisies.
Que tout le système soit revu et tous les cas étudiés.
Que toutes les structures associatives et publiques soient auditées.
Que tous les conflits d’intérêt moral et déontologique soient résolus.
Que l’on aille jusqu’au bout et à fond.
Qu’il n’y ait pas deux poids deux mesures.
Que les Français soient assurés que de hauts fonctionnaires et de hauts magistrats, qui ont pour devoir d’appliquer les lois et qui sont payés (bien) pour cela, se comportent en serviteurs loyaux de l’État et du peuple français et ne jouent pas un double et confortable jeu de révolutionnaires de dossiers en interprétant les textes sur les étrangers et l’immigration avec laxisme et complaisance.

On en est loin.

Dès le 22 avril 2014 la commission de déontologie a confirmé qu’il fallait dessaisir le juge Lagarde compte tenu de l’émoi médiatique. Les juges immigrationnistes, eux, pourront continuer à rendre des jugements.

André Posokhow
22/04/2014

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