La victoire du parti de Javier Milei aux élections législatives argentines a plongé les médias français dans la stupéfaction, eux qui annonçaient depuis des semaines une défaite pour le président argentin… Analyse de notre chroniqueur Pierre Boisguilbert.
Polémia
Les médias face au populisme
Décidément, nos médias du politiquement correct, sur la défensive sur tous les sujets, ne comprennent rien au populisme. Ils avaient vu Trump battu par l’inexistante Kamala Harris ; ils ont annoncé la défaite, aux législatives de mi-mandat, du président Milei en Argentine.
Il est jubilatoire de se replonger dans les analyses du Monde, de Libération ou de BFM TV sur la chute électorale annoncée de l’homme qui aurait ruiné l’Argentine. Ils prenaient, comme toujours, leurs souhaits idéologiques pour la réalité.
Ils ont été démentis par les électeurs et sont passés sous la tronçonneuse de Milei, plus destructrice que jamais.
La victoire de Javier Milei
Javier Milei a remporté une victoire électorale importante le dimanche 26 octobre. Son parti, La Libertad Avanza (LLA), a réuni près de 41 % des suffrages et réduit l’opposition péroniste à 32 %, sans toutefois obtenir de majorité absolue.
Sa thérapie de choc, reposant sur une diminution drastique des dépenses publiques et un ajustement du taux de change, a permis de réduire très fortement l’inflation (passée de plus de 200 % fin 2023 à 32 % en septembre 2025), tout en dégageant un excédent budgétaire.
Voilà qui devrait peut-être inspirer nos dirigeants. Mais voilà, Milei est un populiste d’extrême droite, une sorte de Trump de la pampa, donc infréquentable. D’ailleurs, cette victoire aurait été « achetée » par Trump, est-il largement sous-entendu.
C’est tout juste si l’on ne devrait pas l’annuler, comme en Roumanie. Heureusement pour eux, les Argentins se moquent de Madame von der Leyen comme de leur dernier tango.
Le résultat, qui dément bien des sondages, est un soulagement pour l’exécutif, alors que l’incertitude liée au scrutin avait placé l’économie argentine et sa monnaie sous une intense pression depuis deux mois.
France Info insiste sur la promesse d’une aide massive de son allié américain Donald Trump, jusqu’à 40 milliards de dollars.
« Félicitations au président Javier Milei pour sa victoire écrasante en Argentine. Il fait un travail formidable ! Notre confiance en lui a été justifiée par le peuple argentin », a réagi le président américain sur son réseau Truth Social.
La Bourse de Buenos Aires a spectaculairement réagi lundi à la victoire du président ultralibéral. Son principal indice, le Merval, a gagné plus de 20 % à l’ouverture. Peu auparavant, le peso argentin s’était lui aussi envolé.
Milei, apparemment, fait plus peur aux journalistes français qu’aux électeurs argentins… Mais il est vrai que les journalistes français ont globalement peur de tout ce qui se trouve à la droite d’Olivier Faure, qui pourtant aurait déjà de quoi faire peur.
Héritages péronistes et dégagisme argentin
Finalement, ils auraient préféré une victoire des péronistes. Dans l’opposition, dépitée et toujours pas remise du choc Milei de 2023, dominait le désarroi :
« Le sentiment que ce qui est en train de gagner, c’est l’indifférence. Je ne vois pas quoi dire d’autre », se désolait Mariano, 61 ans, cité par BFM TV, l’un des militants réunis sous les fenêtres de l’ex-présidente (2007-2015) Cristina Kirchner, 72 ans, désormais condamnée, inéligible, à l’étoile toujours plus pâle.
Mauvaise héritière, mais héritière tout de même du général Perón et d’Evita, la madone des descamisados, si accueillante pour les nazis qui avaient pu fuir en Argentine.
Petit rappel de l’INA :
« Le discours en faveur de la justice sociale du militaire avait su toucher les classes populaires. Suspect aux possédants, aux riches, à l’armée, Perón s’appuie sur le petit peuple. »
En février 1946, Juan Domingo Perón remportait les élections et entamait son premier mandat présidentiel en juin. Il œuvra en faveur des ouvriers, avec des améliorations de leurs conditions de travail et des salaires, renforça les syndicats — élément clé du péronisme.
Aux côtés du président, sa femme Eva Perón, à qui il dut une grande partie de son succès. Surnommée Evita, « de sa voix rauque et passionnée, elle mobilise les habitants des bidonvilles ». Elle sera la première ambassadrice de Perón. Franco lui fit un accueil triomphal, et le pape la reçut avec cordialité.
Après un long exil en Espagne, Perón revint au pouvoir, élu par des jeunes qui ne l’avaient jamais connu.
« L’Argentine a préparé avec fièvre et anxiété le retour de Juan Domingo Perón. Après 17 ans d’exil, le leader suprême revient à Buenos Aires. »
Nous sommes en 1972. L’ex-dirigeant argentin revient dans un pays où sa popularité n’a pas faibli.
Le document en tête d’article de l’INA, diffusé par l’ORTF, annonçait une nouvelle ère péroniste.
La situation économique désastreuse de l’Argentine, victime d’une inflation inédite depuis les années 1990, peut expliquer le vote des Argentins pour Milei, parfois comparé à Bolsonaro ou Trump. Mais il est également possible d’y voir un certain dégagisme : la volonté d’en finir avec le péronisme, ce courant politique historique.
Pour mesurer la popularité d’Evita, il suffit d’aller sur YouTube regarder ses obsèques : incroyables, à l’image d’un pays de passions — où, pour l’instant, Milei répond aux attentes des Argentins, qui ne sont pas celles de la presse du bien.
Ils s’en remettront.
Pierre Boisguilbert
28/10/2025
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