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Guerre en Ukraine. Regard critique sur les causes d’une tragédie

Guerre en Ukraine. Regard critique sur les causes d’une tragédie
Guerre en Ukraine. Regard critique sur les causes d’une tragédie

La guerre en Ukraine : Regard critique sur les causes d’une tragédie est un excellent petit livre que vient de signer Jacques Hogard, dont les analyses sur les guerres de Yougoslavie nous avaient permis, en leur temps, de mieux comprendre les sombres enchainements des guerres des Balkans (L’Europe est morte à Pristina).

Un rappel historique essentiel

Les amoureux des lettres classiques noteront que Jacques Hogard suit un plan « thucydidien » pour chroniquer la guerre d’Ukraine.
En effet, il commence par débroussailler les conflits européens (les causes immédiates) depuis la fin de la guerre mondiale : effondrement du bloc soviétique, guerres de découpage de la Yougoslavie, pour finir par la crise d’Ukraine : le coup d’état Euromaïdan, la reprise de la Crimée par la Russie en 2014, et enfin les accords de Minsk.

Tout au long de ce récit, il souligne la retenue russe face au à « l’hubris » de l’hyperpuissance américaine. Ainsi j’ai découvert, en page 123, que lors des discussions sur l’élargissement de l’OTAN en 1996, feu le général russe Lebed avait proposé un moratoire de vingt ans avant un possible élargissement. Son argumentation était pourtant frappée au coin du bon sens : « J’ai suggéré que la question de l’élargissement ou non de l’OTAN devait être laissée à la prochaine génération qui n’aura pas la confrontation dans ses veines. J’espère que la prochaine génération n’aura pas tant de complexes et aura une approche nouvelle des choses. Malheureusement, nous sommes tous des produits de la guerre froide. » Où en serait-on si on l’avait écouté ?

Les vrais causes de la guerre en Ukraine

Puis dans une seconde partie, Jacques Hogar aborde ce que Thucydide aurait appelé les causes vraies de la guerre d’Ukraine : à savoir, le refus de la Russie de se voir séparé d’un pays qu’elle considère comme partie intégrale de son histoire : « Pour une large majorité de la, l’Ukraine ne constitue en fait pas une nation, mais une composante de la nation russe[1]. » et le sentiment d’encerclement généré par l’extension vers l’est de l’O.T.A.N.
Les pages 115 à 129 résume parfaitement ce « Drang nach Osten. »

Quelles conséquences ?

Enfin dans une troisième partie, Jacques Hogard tente d’analyser les conséquences de la guerre d ‘Ukraine et de la défaite maintenant possible des États-Unis et de l’OTAN.

La première conséquence sera l’affaiblissement des États-Unis eux même, qui auront poussé la Russie dans les bras de la Chine. Non dans un mariage d’amour, mais de raison. Ils auront aussi accéléré la « dédolarisation » du monde (surtout s’ils saisissent les biens russes) et conforté la naissance et le renforcement des BRICS.
Enfin ils seront contraints de renégocier un accord de sécurité en Europe qui consacrera la neutralité de l’Ukraine, le rattachement à la Russie des quatre Oblasts du sud-est et peut être même de celui d’Odessa et Nikolïev qui donnera à la Russie la haute main sur le commerce du blé et donc le contrôle de l’Afrique.

Indirectement, c’est la Turquie qui renforcera aussi sa puissance régionale par le pouvoir que lui donne le contrôle des détroits.

Pascal Boniface sur la guerre en Ukraine : vers la fin de la domination occidentale

Plus directement, l’Ukraine, ou ce qui en restera, va devenir un état croupion et failli à la population dramatiquement affaiblie[2] dont l’Europe de Madame von der Leyen devra payer le fonctionnement et les mafieux qui la gouvernent.
Vraiment du grand art.

Quant à la France, « La politique française s’est traduite dans les faits par un reniement magistral de la grande diplomatie souveraine pratiquée en son temps par le général de Gaulle, et par une stricte inféodation aux intérêts américains et allemands, représentés par l’OTAN et l’UE[3]. »

Conclusion

Je regrette simplement que Jacques Hogard n’ait pas creusé plus avant les causes économiques, et notamment « énergétiques » du conflit, mais il est vrai que Marc Endeweld, a un peu abordé le sujet dans son petit livre Les guerres cachées.

L’histoire n’est pas finie, mais dans la logique actuelle des évènements, les prédictions de Jacques Hogard me semblent les bonnes. On peut comme toujours noter des petites erreurs factuelles (en page 153, Jacques Hogard attribue à Staline la cession de la Crimée à l’Ukraine), maintenant à l’heure ou des généraux de salons continuent à pousser au crime sur les plateaux télé, alors qu’ils savent que la guerre est perdue, la lecture de cet ouvrage est salutaire.

Concernant mon dernier commentaire, je voudrais souligner la performance du Général Yakovleff qui depuis deux ans annonce la défaite de la Russie et encourage les pays de l’OTAN à envoyer toujours plus d’armes en Ukraine, alors qu’il reconnaissait mercredi[4] dernier, dans le cadre semi-privé de l’amphithéâtre Des Vallières de l’École de Guerre, que l’Ukraine ne récupèrerait jamais ses territoires perdus, et qu’il ne restait plus qu’à espérer un effondrement de la Russie.

Combien de milliers de jeunes européens tués pour en arriver là ?

Frédéric Eparvier
17/03/2024

[1] P. 97
[2] Page 139 à 143
[3] P. 165
[4] Le 13 mars.

Frédéric Éparvier
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