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Des Antigones à Némésis, l’essor des groupes de militantes de droite

Des Antigones à Némésis, l’essor des groupes de militantes de droite

par | 28 mars 2024 | Société

Dans Les nouvelles femmes de droite (Éditions Hors d’atteinte, 280 pages, 19 euros), la politologue Magali Della Sudda s’intéresse à l’émergence des mouvements féminins apparus dans le sillage de la Manif pour tous (2012-2013). Souvent liées à ce que l’auteur nomme la « droite radicale », des jeunes femmes se sont organisées en vue de défendre des valeurs opposées aux revendications des féministes dites « progressistes ». Les dernières venues, et les plus actives aujourd’hui, insistent également sur les violences sexuelles et l’insécurité dans l’espace public subies par les femmes, en incriminant notamment certaines franges de la population issue de l’immigration dont la conception des relations entre les sexes demeure étrangère à la civilisation occidentale.

Les Caryatides

En mai 2013, les Caryatides voient le jour à Lyon au sein de l’Œuvre Française (après sa dissolution, elles se rapprocheront du Parti nationaliste français). Leur nom fait référence à l’Acropole antique et leur insigne est composé d’une orchidée blanche, jaune et rose. La croix celtique témoigne de leur attachement à la doctrine nationaliste.

Ces jeunes militantes, qui se présentent vêtues d’une chemise blanche et d’une jupe de tailleur bleu marine, un foulard rouge noué autour du cou, se reconnaissent dans un discours radical : « Face à des lobbies cosmopolites, face à un système pervers, décadent où l’image de la femme (sur les affiches, à la télé, dans les médias et dans les mentalités) est synonyme de sexe, de plaisir, d’objet que l’on prend et que l’on jette, de potiche voluptueuse ; face à un environnement qui veut nous aliéner avec la théorie du genre et la loi Taubira, il est plus que nécessaire, je dirais même qu’il est urgent de créer une section féminine pour un militantisme propre aux femmes. »

Les Caryatides valorisent le rôle des femmes comme clé de voûte de la famille et de la société. Cette conception du monde les amène aux « antipodes du féminisme » : « Les féministes ont voulu égaler l’homme car elles se sentaient lésées, et aujourd’hui elles revendiquent de s’affranchir de la nature, de l’ordre naturel et de la biologie. Les féministes sont dans la haine. »

Leur projet politique, antilibéral et autoritaire, se réfère à la figure de Jeanne d’Arc et au régime de Vichy, « qu’il s’agisse de la Fête des mères ou de pèlerinages sur la tombe du maréchal Pétain », de même qu’à des femmes comme Eva Perón, Pilar Primo de Rivera (la fondatrice des sections féminines de la Phalange) ou Geneviève Galard (« l’ange de Diên Biên Phu »).

L’auteur estime que ce groupe n’a réuni tout au plus qu’une trentaine de femmes mais qu’il est néanmoins parvenu à donner une visibilité au nationalisme féminin, via notamment des manifestations et des défilés, tout en promouvant « une féminité traditionnelle incarnée par un sujet politique féminin, ethnicisé et catholique ».

Les Antigones

En mai 2013, plusieurs dizaines de jeunes femmes, pour la plupart vêtues de jupes blanches, sont bloquées dans leur élan par des gendarmes mobiles alors qu’elles se dirigeaient vers le local parisien des Femen dans le but de dénoncer les « méthodes totalitaires et manipulatrices » de ce mouvement féministe radical [ndrl : dont la devise ukrainienne est « Sors, déshabille-toi, gagne »].

En septembre 2014, les intéressées se structurent sous la forme d’une association féminine non-mixte. C’est l’acte de naissance des Antigones, dont le nom « se réfère à l’héroïne antique se révoltant contre les lois de la Cité au nom de la loi naturelle ». Une antenne marseillaise est fondée quelques mois plus tard sous le nom de Gyptis.

Ces femmes revendiquent l’égalité des sexes dans la complémentarité et ne se reconnaissent pas dans les discours et les images diffusés dans les médias.

Selon l’auteur, ces jeunes filles de bonne famille se réfèrent « à un état précapitaliste, antérieur à la sécularisation, et qui valorise un ordre social et politique fondé sur la différence des sexes ». « Le foyer conjugal est envisagé comme le lieu de résistance au marché par le rétablissement des liens entre hommes et femmes, qui en constituent l’élément premier, et entre générations. »

Les Antigones, qui sont « insérées dans les réseaux de la Nouvelle Droite », valorisent les mouvements « pro-vie » et les médecines alternatives, en lien avec une conscience écologique basée sur la protection des écosystèmes humains et non humains.

Depuis 2018, après avoir obtenu une visibilité importante sur les réseaux sociaux, le groupe n’a plus qu’« une activité essentiellement virtuelle, ses membres ayant quitté Paris pour s’installer ailleurs en France ».

Belle et Rebelle

En 2011, Louise Demory, la rédactrice en chef du « webzine » féminin Belle et Rebelle (B&B), revendique « un subtil mélange de futilités toutes féminines et de sérieux, face à la dégradation de notre société ».

Magali Della Sudda observe que « si le site n’a aucun lien officiel avec des structures politiques, le contenu des publications comme leurs autrices se situent clairement dans l’orbite des Identitaires ». Louise Demory deviendra d’ailleurs porte-parole de Génération identitaire en 2012.

Le logo du site représente « une brunette au visage vide, portant les cheveux longs et la frange, posant comme une pin-up, vêtue d’un pantacourt noir et d’une marinière rouge et blanche (…), et renvoie à une féminité moderne et libérée ». L’image renvoyée par ces militantes identitaires « contraste avec le modèle de féminité austère, prude et traditionnel promu par les Caryatides ».

Les B&B défendent « une féminité identitaire qui reprend des canons de la beauté des XIXe et XXe siècles en insistant sur la différence des corps et des rôles sociaux de sexe », tout en prônant le goût de l’action, une hygiène de vie et une alimentation saine.

À partir de 2015, ce mouvement « reflue sur la toile et dans la rue » avant de s’éteindre en 2017.

Le collectif Némésis

Deux lignes militantes succèdent à B&B : un courant conservateur lié à Thaïs d’Escufon, qui sera porte-parole de Génération identitaire au moment de la dissolution de ce mouvement, et un courant de jeunes femmes « féministes non conformistes » et « apolitiques » incarné par le Collectif Némésis.

En septembre 2019, lors d’une grande manifestation parisienne contre les violences faites aux femmes, ce collectif participe au cortège en dénonçant les valeurs et les pratiques patriarcales émanant de personnes issues de civilisations non occidentales. L’altercation qui s’ensuit avec d’autres participantes entraîne la médiatisation du groupe, d’autant que celle-ci est relayée par des éditorialistes conservateurs.

Comme l’explique sa porte-parole Alice Cordier, le mode d’action de Némésis repose sur des « coups médiatiques » et des « happenings ». Par ailleurs, l’intéressée intervient ponctuellement dans l’émission de divertissement Touche pas à mon poste de l’animateur Cyril Hanouna [ndrl : ainsi que sur Radio Courtoisie et TVLibertés].

Le collectif, qui défend explicitement les femmes occidentales tout en s’affirmant hostile au féminisme « gauchiste », est très actif sur les réseaux sociaux. Son logo, de couleurs bleu et blanche, est inspiré de la déesse grecque du châtiment céleste.

Selon l’auteur, « Némésis se positionne clairement comme féministe pour politiser les violences sexistes et sexuelles en désignant les hommes étrangers ou d’origine non européenne comme les principaux ennemis des femmes ».

***

« Nous sommes la génération Cologne ». Ce slogan, placé en exergue sur le site Internet de Némésis, fait référence aux viols et agressions sexuelles de masse, accompagnés de vols et de violences, commis dans cette ville le 31 décembre 2015 par des bandes d’individus décrits comme « nord-africains » et « fortement alcoolisés ». Les autorités municipales, la police et les médias allemands avaient alors gardé le silence sur ces événements durant plusieurs jours pour ne pas contrevenir au « politiquement correct ».

De son côté, Élisabeth Badinter avait accusé les féministes françaises de rester dans le déni pour ne pas « alimenter le racisme » : « Ce que cette affaire de Cologne a démontré, c’est que quand ce sont des étrangers qui sont en cause alors les priorités changent. » (Marianne, 21/10/2016.)

De fait, la détermination d’un groupe comme le collectif Némésis à désobéir aux « injonctions de faire silence » véhiculées par les pseudo-féministes demeure plus que jamais nécessaire et mérite d’être soutenue !

Johan Hardoy
28/03/2024

Johan Hardoy

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