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Sans musique, pas de projet politique viable

Sans musique, pas de projet politique viable

Thierry Bouzard, écrivain, chroniqueur musical à Présent

♦ La musique est un outil d’entretien du lien collectif dont l’importance est complètement sous-estimée par les politiques de la droite nationale. Agissant sur les émotions, la musique est un levier puissant pour influencer les masses, gagner les esprits et garantir la paix sociale. Les révolutionnaires avaient bien retenu l’enseignement de Rousseau qui avait remarqué que « si notre musique a peu de pouvoir sur les affections de l’âme, en revanche elle est capable d’agir physiquement sur les corps » (1).

Monopole soigneusement gardé par la gauche, elle est devenue un moyen de capter la jeunesse rendue indifférente à des politiques corrompus et discrédités.


Une culture musicale verrouillée

La jeunesse a déserté depuis longtemps les meetings politiques. Suivant les directives de Jdanov, le ministre de la Culture de Staline, les communistes ont été des précurseurs dans la prise de contrôle des artistes, les « compagnons de route », le terme de l’époque pour collabo. Le meilleur exemple est la Fête de l’Huma. La grande majorité de la jeunesse qui venait écouter les grandes vedettes nationales et internationales ne votait pas communiste, mais supportait sans broncher les discours des politiques avant le concert. Les meetings politiques ont disparu, par contre les grands concerts continuent plus que jamais d’attirer les foules, permettant de passer des menottes culturelles à la jeunesse, et la rendant dépendante aux prescriptions des vedettes auxquelles elle s’identifie.

Le torrent d’émotions collectives partagé lors de ces événements crée de puissants liens affectifs qui verrouillent les esprits dans une ambiance idéologique insidieuse. Plus besoin de penser : il suffit de faire ce qu’on leur prescrit, comportement, mode vestimentaire, culinaire, manifs, vote… Ça ne fonctionne peut-être pas à tous les coups (2), mais globalement ça canalise les pulsions de révolte en les empêchant de verser dans une véritable opposition au Système. En musique, on appelle ça les musiques alternatives ; alternatives au conformisme, mais pas anticonformistes ni dissidentes. Il est d’autant plus crucial à la gauche de conserver ce monopole que ses bases idéologiques s’effondrent. Tant qu’elle tient les leviers culturels et tout spécialement la musique, elle peut encore espérer conserver le pouvoir, et surtout ne jamais perdre le pouvoir culturel. Elle doit donc impérativement empêcher ses adversaires de lui contester son hégémonie.

Cette technique bien rodée permet l’encadrement de toute la production musicale ; les concerts, grands et petits, fonctionnent avec des autorisations et des subventions, c’est-à-dire le feu vert des politiques. Outil d’expression à la portée de chacun, le monde de la musique est entièrement sous contrôle, verrouillé, cadenassé. Il suffit de rappeler la vague d’indignations médiatiques après le concert de Fréjus en juillet dernier pour la prestation du groupe identitaire In Memoriam, les groupes dissidents condamnés à organiser des concerts clandestins pour contourner les annulations ou encore la récente affaire des Brigandes.

La chanson rend compte de l’identité d’une communauté, de son audience et de sa vitalité. Sans la capacité de créer des chansons adaptées aux circonstances sans cesse changeantes de l’existence, la communauté disparaît. En adoptant des répertoires étrangers, elle est tout simplement engloutie dans une autre, l’écoute des bandes sonores des lieux publics permet de prendre conscience du modèle qui est imposé. Les familles ont pu chanter d’une seule voix jusqu’à l’arrivée du microsillon. Le disque a introduit une fracture entre les générations, éclatant les répertoires collectifs qui font l’identité d’un peuple, en même temps que la jeunesse devenait un enjeu commercial. La musique rend compte au plus près de cette évolution.

Eliminer les musiques dissidentes

Il ne faut pas s’étonner si les artistes sont tous à gauche ou cachent leurs opinions. Car ce sont toutes les tentatives de la chanson dissidente pour desserrer l’étau dont il faut se souvenir. D’abord, les chanteurs pieds-noirs blacklistés des médias, ensuite les groupes skinheads des années 1980 considérés comme des parias. Le groupe de rock identitaire In Memoriam résume à lui seul l’acharnement contre ce courant musical : attentat à l’explosif en octobre 1998 qui détruit la salle de Vitrolles où il devait se produire, menaces et alertes à la bombe pour son concert parisien de juin 2014, réactions après son concert à Fréjus en juillet 2015. Depuis des années et dans l’indifférence générale des « Charlie », la plupart des concerts de Black Metal et de rock identitaire sont organisés dans la clandestinité ou dénoncés par les antifas, pendant que ceux du Hellfest sont subventionnés. Comme pour confirmer cette stratégie, tout récemment et jamais en retard d’une délation, les antifas de La Horde s’en sont pris aux groupes Lemovice et Peste Noire (3) à l’audience plus confidentielle, mais néanmoins étrangers aux idéologies mondialiste et révolutionnaire. Dans cette stratégie culturelle totalitaire, aucun espace ne doit rester aux musiques dissidentes.

J’ai surtout donné des exemples tirés des répertoires destinés à la jeunesse, mais le phénomène est similaire pour les autres. La musique n’a pas d’idéologie, sauf que le peuple doit entendre uniquement celle préconisée. Un autre exemple : la réforme liturgique de Vatican II a aussi été une entreprise d’amputation de la longue mémoire musicale européenne en cantonnant le chant grégorien, le plus ancien répertoire musical vivant de l’Europe, dans la liturgie traditionaliste systématiquement dénoncée.

Un outil musical sous-évalué

Tétanisés par ce totalitarisme culturel, les opposants aux politiques de destruction de notre pays et de notre identité ne prennent pas en compte l’importance de l’outil musical à leur disposition. Il était surprenant d’entendre dans les grandes manifestations de défense de la famille qui ont rassemblé des millions de personnes la même bande sonore que celle de la Gaypride, leurs pires opposants. Etre capable de mobiliser un aussi grand nombre d’opposants pour occuper le pavé, sans être à même de proposer une identification sonore plus séduisante que leurs adversaires pour occuper l’espace était le signe révélateur d’un certain manque de détermination. Malheureusement cette attitude se retrouve aussi bien au Front national qui, pour ses 40 ans, avait fait appel à une formation musicale étrangère à sa sensibilité politique, ou à Radio Courtoisie qui ne veut pas rendre compte de l’actualité musicale. Il ne s’agit pas ici de s’en prendre à des structures qui font face à leurs enjeux difficiles avec de réels mérites et résultats, mais plutôt d’essayer de faire prendre conscience de l’importance stratégique de l’outil musical.

On entretient la population dans l’illusion que chacun peut écouter la musique qui lui plaît, mais en réalité on écoute la musique que l’on nous permet d’entendre. Longtemps les maisons de disques, les radios et la télévision ont imposé leurs modes commerciales et l’arrivée d’Internet n’a pas fondamentalement changé la donne. Si les maisons d’édition et les circuits de distribution se sont effondrés, l’organisation de concerts reste soigneusement sous contrôle. Or le CD ne se vend plus et aucun support alternatif n’est venu apporter un flux financier en rétribution de l’investissement des artistes : pourquoi payer ce que l’on trouve gratuitement en ligne ? Seule source de revenu subsistante : les concerts. L’aspect financier est essentiel car l’équation est simple : sans concert pas de revenus, donc pas de répétitions, de moyens de déplacement ni d’organisation. La création est asséchée et l’exploitation du lien collectif créé par la musique est réservée à ceux qui détruisent l’identité de la communauté nationale française comme de l’identité européenne.

Reconquérir notre identité musicale

Les responsables politiques qui veulent engager un programme de restauration nationale doivent adopter un discours crédible pour gagner des électeurs, mais l’argument intellectuel ne sera jamais suffisant pour l’emporter tant qu’ils ne prendront pas en compte l’affectif, c’est-à-dire le domaine musical. Il faut démanteler l’hégémonie culturelle musicale de la gauche par la promotion de notre identité. Il ne s’agit pas de cautionner ou de promouvoir tel ou tel courant musical, mais d’abord d’empêcher la destruction de compositions qui s’en prennent aux monopoles culturels de ceux qui veulent détruire notre identité. Car sans identité musicale propre, un peuple n’existe plus. Ensuite, il s’agit de définir une identité musicale à promouvoir. Non pas en disant ce qu’il faut entendre, mais en redonnant la liberté aux compositeurs et musiciens pour créer et se produire.

Thierry Bouzard
9/05/2016

Voir Aussi :
Thierry Bouzard, Des Chansons contre la pensée unique, édition des Cimes, 2014, 322 pages.

Notes :

  1. Rousseau Jean-Jacques, Dictionnaire de la musique, art Musique, in Œuvres complètes, t. 5, Paris, Gallimard (La Pléiade), 1995, p. 922. Rousseau cite l’exemple du pouvoir de guérison de la tarentule, suivant une opinion commune à l’époque.
  2. http://www.arretsurimages.net/breves/2016-01-10/Ceremonie-Republique-une-place-a-moitie-vide-et-des-plans-serres-id19590
  3. http://lahorde.samizdat.net/2016/04/15/nsbm-peste-noire-lemovice-wolfsangel/

Correspondance Polémia – 9/05/2016

Image : Musique

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