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Retraites : le Bakhmout de Macron ?

Retraites : le Bakhmout de Macron ?

par | 7 mars 2023 | Politique, Société

Par Pierre Boisguilbert ♦ Il y a plusieurs façons de présenter la bataille des retraites ou celle de Bakhmout. La question commune étant : faut- il s’accrocher à un champ de ruines ou renoncer pour ne pas se briser les os ?

Pour les retraites, il vaut mieux suivre BFMTV, et pour Bakhmout LCI. Mais nulle part on ne peut trouver une mise en perspective critique de la réalité des situations et de leurs conséquences. Une fois considéré que le choix éditorial de la hiérarchie des deux chaînes d’information en continu est uniquement lié à une course à l’audience, on remarquera que LCI reste droit dans ses bottes ukrainiennes alors que BFM passe de Palmade au débat sur les retraites avec grande facilité. Du en même temps médiatique.

Sur Bakhmout la situation est assez claire. La ville va tomber aux mains des Russes. Ce que l’on ne sait pas, c’est à quel prix. On ne sait pas non plus si cela à une importance stratégique réelle ou de simple propagande pour revendiquer une victoire symbolique. Pour LCI, c’est simple : même si les Russes gagnent, ils perdent, mais, à force de perdre, ils pourraient finir par gagner. Ils devraient engager Macron comme chroniqueur. « La défense ukrainienne de la ville de Bakhmout est soumise à une pression de plus en plus forte, avec des combats intenses dans et autour de la ville », a tweeté le ministère de la Défense britannique. Il a fait état d’une « progression » du « groupe Wagner et de l’armée régulière russe dans la banlieue nord de la ville désormais vulnérable à des attaques venant de trois côtés ». Quand on connaît l’engagement britannique aux côtés de Kiev, on a tout compris. En conséquence, Kiev « renforce la zone avec des unités d’élite et, lors des trente-six dernières heures, deux ponts clés à Bakhmout ont été détruits, notamment un pont vital reliant la cité à la dernière principale route de ravitaillement », a poursuivi le ministère britannique. Cela ressemble au fameux repli sur des positions préparées à l’avance cher à l’état-major français du désastre de 40.

La question essentielle reste l’intérêt de conquérir un champ de ruines. On serait tenté de dire : aucun. Sauf que Stalingrad aussi était un champ de ruines et que l’armée allemande s’y est cassé définitivement les reins.

La question se pose aussi pour le projet de loi des retraites. C’est aussi un champ de ruines. Il n’en reste rien sauf l’âge de 64 ans. Cela vaut-il la peine de s’y accrocher quitte à briser une économie française déjà mal en point et prendre le risque d’une révolte sociale, inflation aidant, qui pourrait mettre en danger le pouvoir de Macron plus que l’Ukraine ne menace celui de Poutine. On sait qu’il faut faire quelque chose pour les retraites, mais pourquoi cet entêtement sur un texte rejeté par les Français à tort ou à raison ? L’entêtement du pouvoir politique est un mystère de l’histoire et la cause de désastres qui étaient évitables. Le président Macron veut imposer une retraite pour marquer un quinquennat qui sera le dernier, au risque de le voir raccourci. Il ne renonce pas à la bataille alors que l’on voit que sa stratégie mal préparée et mal expliquée est en débâcle et que ses généraux sont loin d’être à la hauteur du conflit.

Le 7 mars et les jours qui vont suivre seront sans doute déterminants pour l’évolution du bras de fer. Les syndicats aussi jouent gros et ne sont pas sûrs de réussir à faire reculer le gouvernement. Mais ils jettent toutes leurs forces dans une bataille à la russe. Macron peut-il résister ? Résister pour quoi faire ? Sauver une retraite n’est plus le projet souhaité ? C’est, semble-t-il, son choix, même si son entourage doute. Il prend un risque énorme, ce n’est pas celui de perdre son Bakhmout, mais de transformer le Bakhmout des retraites en Stalingrad de sa présidence.

Pierre Boisguilbert
07/03/2023

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