Accueil | Europe | Immigration, climat, Euro… Entretien avec Joana Cotar, députée allemande de l’AfD

Immigration, climat, Euro… Entretien avec Joana Cotar, députée allemande de l’AfD

Immigration, climat, Euro… Entretien avec Joana Cotar, députée allemande de l’AfD

par | 16 juin 2022 | Europe, Politique, Société

Par Nicolas Faure, spécialiste de l’Allemagne et traducteur ♦ En Allemagne, l’AfD (Alternative für Deutschland) est un parti qui s’oppose notamment à l’immigration massive. Nicolas Faure, essayiste et traducteur (à ne pas confondre avec Nicolas Faure d’I-Média et Sunrise !) s’est entretenu avec Joana Cotar, l’une des députées de ce parti.
Polémia

De la dictature communiste à l’AfD

Fille d’une mère allemande et d’un père roumain, Joana Cotar est parlementaire à l’AfD et manager événementielle. Elle a passé les premières années de sa vie en Roumanie. En 1978, sa famille a fui le régime communiste de Ceauşescu pour se rendre en Allemagne. Après avoir obtenu son baccalauréat au Burggymnasium de Friedberg, elle a suivi des études de sciences politiques et de germanistique à Mannheim de 1993 à 1999. Alors étudiante, elle a adhéré un temps à la CDU, au comité local de Mannheim-Schwetzingerstadt/Oststadt.
Comme la plupart des membres de son parti, Cotar désapprouve la politique d’accueil des réfugiés du gouvernement fédéral et demande la fermeture des frontières du pays aux migrants. Elle a soutenu dans le passé la CSU dans sa revendication d’un seuil maximal fixé pour les demandeurs d’asile et déplore que le parti s’en soit finalement rétracté.
Elle répond ici à nos questions de politique générale.

Un parti d’opposition surveillé par le renseignement intérieur

Nicolas Faure : Madame Cotar, lorsque l’on essaie de rechercher des articles ou des informations sur des moteurs de recherche comme Google, si l’on écrit AfD, en France comme en Allemagne, le premier mot qui apparaît est celui d’ “extrême droite“. Que pensez-vous de ce terme péjoratif et insultant qui est si souvent attribué à l’AfD ?

Joana Cotar : Je n’associe pas ce mot à mon parti. Nous sommes fermement attachés à l’ordre fondamental libéral et démocratique et nous l’avons formulé sans équivoque dans notre programme de base, le Grundsatzprogramm. Et pourtant, on se rend compte que l’Allemagne est le seul pays démocratique au monde dans lequel un parti d’opposition est surveillé par le service du renseignement intérieur dépendant du gouvernement. C’est à mes yeux un abus de pouvoir et une instrumentalisation politique inadmissible des autorités. C’est précisément contre cela que nous nous élevons et que nous nous battons. Malheureusement, la boue que l’on jette sur nous finit toujours par nous retomber dessus. C’est ainsi que s’explique le résultat de la recherche sur Google que vous évoquez.

Allemagne. L’AfD placée sous surveillance policière, une dérive de Merkel

L’AfD et l’Euro

Nicolas Faure : L’ AfD semble voir dans l’instauration de l’Euro comme monnaie unique une erreur fondamentale, et demande de mettre fin à cette expérience malheureuse. Pouvez-vous nous expliquer cela ?

Joana Cotar : L’erreur fondamentale a été de faire coexister dans une même zone monétaire des régions économiques de puissance différente. Cela a bien fonctionné tant que les pays les plus forts parvenaient à soutenir les plus faibles. Mais avec la crise monétaire, la pandémie et maintenant la guerre en Ukraine, même les grandes économies nationales en Europe ne sont plus assez fortes pour que cela puisse se poursuivre. En conséquence, la BCE a émis et continue d’émettre des milliards en obligations d’État et de faire marcher la planche à billets tambour battant. Tout le monde ressent désormais cette inflation et il semble que personne ne puisse plus l’arrêter, si ce n’est un retour aux monnaies nationales. De cette manière, les monnaies pourraient être dévaluées de manière ciblée dans les Etats les plus faibles, leur compétitivité sur le marché augmenterait à nouveau, et il serait alors possible de faire redémarrer les économies nationales affaiblies.

Avortement

Nicolas Faure : En Allemagne, pour environ 700 000 naissances par an, on compte environ 100 000 interruptions de grossesse. Les futurs parents et les femmes seules en détresse doivent se voir proposer des aides financières et autres avant et après l’accouchement, afin qu’ils puissent décider de garder leur enfant. L’Alternative pour l’Allemagne s’oppose à toute tentative de banaliser l’avortement, de l’encourager par l’État ou d’en faire un droit humain. Que veut dire l’AfD par là ?

Joana Cotar :  Des propositions politiques visent à faciliter l’avortement  en Allemagne. L’AfD s’y oppose fermement. Il existe bien sûr des cas où l’avortement ne peut être évité pour des raisons personnelles. Chaque cas doit être examiné par des médecins en collaboration avec les personnes concernées, comme cela a toujours été fait jusqu’à présent. Cela étant, il ne peut pas non plus y avoir de droit humain à l’avortement. C’est un non-sens de la pensée politique des partis de gauche.

Chemnitz. Un responsable du renseignement allemand écarté pour avoir démenti les rumeurs de chasses aux migrants

Climat

Nicolas Faure : Pour quelles raisons abolir le décret sur les économies d’énergie et la loi sur les énergies renouvelables et la chaleur ?

Joana Cotar : Le délire climatique totalement irrationnel du gouvernement est en train de détruire l’économie et la société allemandes. L’hypothèse selon laquelle la République fédérale d Allemagne, minuscule pays par rapport au reste du monde, pourrait par son comportement changer quoi que ce soit au climat mondial, frise l’imbécillité. L’humanité entière est impuissante à changer cette situation. Pourquoi donc nous entêter, avec des lois et des règlements absurdes, à brider les gens, à les faire se sentir en danger et à répandre en permanence la peur et la panique ? Il serait bien plus important de trouver des moyens et des solutions pour faire face au changement climatique en cours et peut-être même pour l’utiliser à bon escient. Mais trop peu de gens y pensent.

Abandon du nucléaire et hausse de l’éolien, la transition énergétique allemande critiquée

Une immigration qualitative ?

Nicolas Faure : Le droit européen à la libre circulation a entraîné des flux migratoires massifs au sein de l’Union européenne, des États les plus pauvres vers les États les plus riches, en particulier vers l’Allemagne. Dans ce contexte, les systèmes sociaux allemands, toujours plus généreux rendent l’Allemagne attrayante et incitent largement à l’immigration. Pour quelle raison l’ AfD préconise-t-elle une immigration légale modérée en provenance de pays tiers, selon des critères qualitatifs ?

Joana Cotar : Un système social ne fonctionne que si personne n’en retire quoi que ce soit en dehors de ceux qui y contribuent. Cela ne peut fonctionner autrement. À titre d’exemple, une personne qui n’a jamais cotisé ne doit pas s’attendre à pouvoir bénéficier des prestations sociales de l’État. Ces dernières années, le système social allemand n’a fait que déroger à cette règle fondamentale, et c’est la raison pour laquelle il est de plus en plus chancelant. Ce sont par exemple les retraités allemands qui en paient le prix, eux qui, comparativement à leurs voisins européens, se retrouvent souvent en bas de l’échelle sociale. Pour ce qui est de l’immigration en Allemagne, un droit de séjour ne peut être accordé qu’aux travailleurs qualifiés dont nous avons besoin. Tous les autres doivent en revanche retourner dans leur pays d’origine dès que leur titre de séjour, toujours clairement réglementé par la loi, arrive à expiration.

Propos recueillis auprès de VG Thorsten Elsholtz par Nicolas Faure
16/06/2022

Cet article vous a plu ?

Je fais un don

Soutenez Polémia, faites un don ! Chaque don vous ouvre le droit à une déduction fiscale de 66% du montant de votre don, profitez-en ! Pour les dons par chèque ou par virement, cliquez ici.

Voir aussi