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Coupures électriques : le court-circuit médiatique de la Macronie

Coupures électriques : le court-circuit médiatique de la Macronie

par | 13 décembre 2022 | Politique, Société

Par Pierre Boisguilbert ♦ Les journalistes sont aux aguets permanents. Non pas de l’information mais de ce qui peut booster l’audimat de leur chaine en attirant les téléspectateurs. Ils le font dans leur volonté de nous dire ce que nous devons faire pour notre bien. C’est vrai politiquement, mais pas seulement. À chaque reprise de la Covid, c’est la surenchère médiatique pour les gestes barrières et autres masques. Ils en font plus que le gouvernement. Mais cela peut être dangereux. Ainsi, dans la perspective des problèmes énergétiques de l’hiver, les médias ont surjoué les appels à la sobriété gouvernementale. Ils ont été tellement loin que le public a traduit qu’on allait nous couper l’électricité à plusieurs reprises.

La guerre en Ukraine et les problèmes de maintenance sur le parc nucléaire français augurent en effet des difficultés d’approvisionnement en électricité pour l’hiver.

Les médias n’ont rien inventé, mais ils ont été au bout de leur logique de donneurs de leçons en s’appuyant sur des déclarations gouvernementales. C’est la logique enfermiste, celle de la peur devenue ligne éditoriale médiatique. Nombreux sont ceux d’ailleurs qui ce faisant pensent flagorner le pouvoir, expliquant en quoi il a raison de nous inquiéter pour notre bien. Mais trop, c’est trop, devant la réaction de l’opinion le président s’est affolé et il a même pété un câble. Il s’en est pris aux médias qui n’avaient rien compris et envoyé des ministres dire le contraire de ce qu’ils avaient dit précédemment. Il fallait voire le visage des Borne et autre Véran ramant dans l’autre sens en avalant leurs chapeaux. Les journalistes ont compris le message et la coupure d’électricité est devenue un délestage tournant. Cette tyrannie sémantique ne recule devant rien pour camoufler les réalités et les vérités.

Le 1er décembre cependant, des directives précises sont envoyées aux préfets pour se préparer à de possibles coupures d’électricité hivernales. Ces instructions sont dévoilées à la presse surtout la presse amie ou aux ordres. Les perspectives ont alors de quoi inquiéter. Les services de l’État pourraient être appelés à fermer des écoles le matin, si elles ne peuvent pas être chauffées, à annuler certains trains pour éviter qu’ils ne restent bloqués sur les voies, si les panneaux de signalisation s’éteignent. Les Français seraient appelés à éviter de prendre leur voiture, en cas d’extinction de feux de signalisation sur la route. Sur TF1, le 3 décembre, en marge de son déplacement aux États-Unis, Emmanuel Macron affirme que le gouvernement communique simplement sur “un cas extrême”, qu’il est “normal” de préparer, “parce que parfois l’impensable arrive”. Arrière toute. C’est largement insuffisant tout le monde s’affole, les opérateurs téléphoniques, les malades ayant besoin d’assistance électrique, les agriculteurs été même certains utilisateurs de voitures ou trottinettes électriques. Le 6 décembre le président en rajpoute donc une couche. En déplacement en Albanie, il est interrogé sur les possibilités de délestages. “Ce débat est absurde, le rôle des autorités publiques n’est pas de transmettre la peur”, déclare Emmanuel Macron, faisant référence aux propos “entendus ces dernières heures”. “Nous sommes un grand pays, nous avons un grand modèle énergétique, nous allons tenir cet hiver malgré la guerre”, martèle-t-il, dénonçant “les scénarios de la peur”. Pas lui, pas ça. Elisabeth Borne rejette les “propos maladroits” du porte-parole d’Enedis et assure “que les personnes malades à domicile seront toujours prises en charge”. Il faut dire que ce dernier sur BFM TV avait fait fort. Le représentant du distributeur d’électricité déclare : “Les personnes qui sont à haut risque vital ne font pas partie des clients prioritaires définis par les préfectures.” Laurent Méric explique que le courant pourrait être coupé chez ces particuliers. “On a une attention particulière à leur égard, ils ont un numéro de téléphone dédié”, complète-t-il tout de même.

La multiplication des interventions a fini par avoir un effet contraire à celui qu’escomptaient les stratèges du gouvernement. Un député de la majorité reconnaît auprès de Franceinfo un “cafouillage” de communication. Mais il déplore : “On est en train d’anticiper et on nous fait un procès comme s’il y avait déjà des coupures.”

Il n’y a pas encore de coupures, ça viendra puisque c’est démenti, mais entre la communication du pouvoir et ses relais médiatiques ça a déjà disjoncté.

Pierre Boisguilbert
13/12/2022

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