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« Une fin du monde sans importance (vol. II) » : dissection d’une société en voie de décomposition

« Une fin du monde sans importance (vol. II) » : dissection d’une société en voie de décomposition

par | 8 février 2020 | Société

« Une fin du monde sans importance (vol. II) » : dissection d’une société en voie de décomposition

Par Régis Mitjaville ♦ Avec ce deuxième recueil de ses chroniques données à Éléments, pertinemment préfacé et éclairé par Olivier Maulin, Xavier Eman poursuit son portrait au vitriol de la société française contemporaine.


L’ouvrage est la suite d’un premier volume paru en 2016 chez Krisis. Après une incursion dans le roman (Terminus pour le hussard, paru début 2019 chez Auda Isarn), Xavier Eman reprend ici la collation de ses chroniques sous forme de saynètes ciblant sur le mode humoristique et caricatural divers types de notre société en état de décomposition morale avancée.

L’auteur, rédacteur en chef de la revue littéraire Livr’Arbitre et du site Paris Vox, chroniqueur régulier à Éléments, poursuit, dans une Comédie humaine contemporaine, la peinture de notre société à travers les portraits de personnages typiques placés dans des situations à la fois farcesques et tragiques.


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Ses personnages, anti-héros minables, pathétiques et souvent désastreux, constituent une galerie pittoresque de figures contemporaines, allant du présentateur télé sans foi ni loi à la starlette beurette, du CRS aviné cogneur de gilets jaunes à l’activiste vegan, en passant par une sélection de bobos éperdus de conformisme, perdant pied devant leurs épouses ou leurs chefs, dénués de toute conviction sincère, refoulant leurs pulsions et leurs sentiments véritables, qui, selon la loi du genre, se révèlent en catastrophe… Une large section sociale donc, qui brosse en creux le portrait d’une société en perdition.

Ces portraits sont traités d’un ton vif et comique, un peu poivré à l’occasion, ce qui en accentue encore par contraste le fond noir et presque désespéré. La caricature permet, en assurant l’effet comique, de graver des types de l’œil acéré de sociologue. Brillance du style, humour dévastateur, finesse du sociologue : ce petit livre offre une lecture très distrayante, où s’allient heureusement la vivacité du style,la fulgurance de l’observation et la justesse de la réflexion.

Xavier Eman suit, dans son projet, de grands anciens. Balzac a tracé l’ambition : peindre la société de son temps. Pour la nôtre, Muray et Houellebecq l’ont précédé. Mais sa manière est autre, sa série de portraits à la façon de La Bruyère vise à graver nos travers à l’acide du rire : « Castigat Ridendo Mores ». La légèreté du style souligne par contraste la gravité du propos, tracée dans le titre de l’ouvrage.

Ainsi va notre petite société macroniste, libérale et libertaire, qui poursuit chaque jour la « lobotomisation programmée de notre peuple ». Ces tendances n’appartiennent pas à notre seul pays, et c’est d’ailleurs la large implantation de cette sous-culture à travers le monde qui en fait aujourd’hui le plus grand danger. Un vaste ensemble de nations se trouvent embarquées dans cette fuite en avant (quel avant ?) sans perspective, et dont la seule boussole, si c’en est une, est celle d’un universalisme béat où se perdent valeurs et culture, et par où pourrait périr notre civilisation.

Doit-on alors désespérer de l’avenir ? Subsistent de larges espaces de résistance, les États-Unis en sont, quelles que soient les réserves que l’on puisse avoir sur leur président, et en dépit du désolant exemple de leurs universités, foyers du « politiquement correct ». La Russie en fait aussi partie, et maintenant l’Angleterre, retrouvée en elle-même, qui devrait, peut-on l’espérer, montrer à l’Europe la voie du redressement moral.

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Régis Mitjaville
08/02/2020

Source : Correspondance Polémia

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