Dans cette analyse percutante, Pierre Boisguilbert dénonce la duplicité du discours officiel algérien et la lâcheté d’une partie des élites françaises.
Polémia
Un tournant diplomatique pour le Maroc contre l’Algérie
Cinquante ans après la Marche verte, le Maroc enregistre un succès décisif au Conseil de sécurité de l’ONU, constituant un revers sévère pour l’Algérie. Ce vote, survenant peu après la décision de l’Assemblée nationale française de suspendre pour rediscussion les accords franco-algériens de 1968, n’augure rien de bon pour Boualem Sansal. L’écrivain franco-algérien a toujours défendu la marocanité de l’ex-Sahara espagnol et contesté les frontières algériennes, qu’il estime empiéter sur le territoire historique du Maroc. Comme quoi, pour Alger, tout n’est pas à rejeter dans l’héritage colonial.
Boualem Sansal, un écrivain dérangeant ?
Le sort de Boualem Sansal peine à mobiliser les intellectuels et les journalistes : il aime trop la France et la langue française. Toutefois, la situation évolue, comme le souligne Le Figaro.
« Le mardi 4 novembre, les jurés du Goncourt et du Renaudot ont pensé à lui. Les premiers ont tenu à lui rendre hommage en portant un badge “Je suis Sansal” ; ils avaient déjà exprimé leur solidarité avec l’auteur franco-algérien en décembre dernier, au moment de son incarcération, en réaffirmant leur condamnation de toute atteinte à la liberté d’expression. Quant aux jurés du Renaudot, ils lui ont décerné à l’unanimité leur prix dans la catégorie “poche”. En distinguant Vivre. Le compte à rebours (Folio), c’est le romancier au style volcanique qu’ils ont salué… »
Lors d’une conférence de presse, Antoine Gallimard, PDG des éditions Gallimard, rappelait lucidement :
« L’incertitude dans laquelle nous sommes à l’égard de la situation judiciaire de Boualem Sansal ne fait que confirmer qu’elle est d’abord liée à un calendrier politique et diplomatique sur lequel nous n’avons pas de prise. »
Hélas, notre diplomatie non plus n’en a pas. Depuis un an, les médias officiels prônent la modération et la patience ; le résultat est nul.
L’enthousiasme marocain et la crispation algérienne
Cette affaire franco-algérienne n’altère en rien la joie marocaine après la résolution du Conseil de sécurité. L’enthousiasme est massif et populaire. Depuis cinquante ans, le Sahara occidental est pour les Marocains une « Alsace-Lorraine ».
Le site de Medi 1 News, héritier de la radio fondée sous Giscard à la demande du roi Hassan II, illustre bien cette ferveur :
« Le 16 octobre 1975, feu SM le Roi Hassan II annonçait le lancement de la Glorieuse Marche Verte […] Aujourd’hui, cinquante ans après, les provinces du Sud se dressent comme un témoignage vivant d’une transformation profonde et inédite […] un modèle de développement intégré, ouvert sur l’Afrique, l’Atlantique et le reste du monde. »
Face à cela, Alger fulmine. Les tentatives de Libération ou du Monde pour relativiser le vote ne convainquent guère, même leurs lecteurs les plus acquis à la cause algérienne.
Cet enthousiasme dépasse la politique : il gagne le football. Hamza Igamane, nouvel attaquant du LOSC, a publié une photo du roi Mohammed VI avec le message « Allah, Al Watan, Al Malik » (« Dieu, la Patrie, le Roi »). Achraf Hakimi et Neil El Aynaoui ont fait de même.
Ainsi va le monde : le patriotisme est beau, à condition de ne pas être français. Aimer la France, son histoire et sa culture, c’est désormais s’exposer. La preuve : le Sahara marocain et Boualem Sansal.
Pierre Boisguilbert
06/11/2025
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