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« Qui instrumentalise l’Église ? » de Martin Peltier

« Qui instrumentalise l’Église ? » de Martin Peltier

par | 7 octobre 2013 | Médiathèque

Le livre « Qui instrumentalise l’Église ? » n’a pas eu beaucoup d’écho dans la grande distribution. Pourtant, paru au printemps 2012, c’est-à-dire avant l’élection de Hollande, avant la loi Taubira sur le mariage des homosexuels, avant le retrait de Benoît XVI et les nouveautés du pape François, il paraît aujourd’hui rétrospectivement presque prophétique. Parce qu’il s’est posé des questions qui restent actuelles : Qui se sert de l’Église catholique ? Comment ? Pourquoi ? A quoi tendent les controverses dont elle est l’objet ? Que valent les reproches qu’on lui fait ? Qui sont ses ennemis, à l’intérieur et à l’extérieur ? Que veulent-ils ? Accessoirement, comment « lire » les actes et les paroles d’un pape ? Il s’agit là d’un vaste programme, que ce livre remarquablement documenté, et argumenté pied à pied, résume dans un sous-titre exprimant son hypothèse de travail : « Comment certains lobbies tentent d’asservir Rome au politiquement correct. »

Martin Peltier examine les groupes de pression à la manœuvre, certains avec des données nombreuses et probantes, groupes homosexuels, juifs ou chrétiens modernistes, d’autres un peu brièvement (francs-maçons, protestants anglo-saxons). La méthode retenue par tout ce beau monde est l’intimidation. Par le biais de controverses explicites, voire tonitruantes, et par une propagande diffuse, omniprésente dans les médias, ces lobbies tendent à faire honte à l’Église de son passé et de son enseignement pour la terroriser par l’image qu’ils en donnent.

Quant aux buts visés par ladite manœuvre, trois sont principalement recensés :

  • le premier, le plus évident, qui n’a pas besoin d’autre développement, est l’affaiblissement de l’enseignement traditionnel de l’Église sur les questions de mœurs et de foi – on en a vu maint exemple dans l’affaire du mariage gay ;
  • le deuxième est l’asservissement de l’Église à l’idéologie des droits de l’homme et son enrôlement au profit du mondialisme politiquement correct ;
  • le troisième, d’ordre théologique, est la mise sous tutelle de Rome, accompagnée d’un changement radical de sa doctrine et même de ses textes fondateurs, de sorte qu’elle ne soit plus que la servante d’un nouveau superpouvoir moral.

L’ancien chroniqueur religieux du Monde Henri Tincq, l’un des gourous du catholicisme progressiste en France, tombait d’accord avec l’historien René Rémond pour « observer que l’opinion tolère mieux les prescriptions de l’Église dans le champ de la morale collective – justice sociale, droits de l’homme, paix et solidarité – que dans celui de la morale personnelle et sexuelle ». Autrement dit, que le pape s’occupe de ses affaires, ou plutôt qu’il ne s’occupe pas de celles des autres, mais qu’il fasse des déclarations socialistoïdes, qu’il promeuve l’immigration/invasion, et, là, on l’écoutera. La stratégie a été payante : en France comme en Italie, on a vu l’épiscopat en pointe dans la diabolisation des partis nationaux, FN ou Ligue du Nord, pour la défense des roms, des clandestins, etc. L’étude est parfaitement convaincante.

Peltier ajoute que les prélats politiques d’aujourd’hui peuvent faire semblant de se fonder sur un texte de Pie XII, la constitution apostolique Exsul Familia Nazarethana d’août 1952, pour justifier leurs extravagances : la doctrine chrétienne, évidemment non raciste, comporte un droit à l’émigration, assortie de circonstances et de conditions et il suffit d’oublier les circonstances et les conditions pour faire de bon nombre d’églises européennes les complices revendiqués de l’invasion en cours. Le constat va plus loin : certains papes dits « conservateurs », sur le plan de la morale sexuelle, ou du dogme, ou de la liturgie, tels Jean Paul II ou Benoît XVI, peuvent être plus utiles en matière d’invasion que de plus modernistes, parce qu’ils rassurent les catholiques conservateurs, lesquels seront plus enclins à les écouter sur le plan de la « morale collective ».

Le troisième but, sans doute le but ultime, des lobbies qui instrumentalisent l’Église, i.e. sa mise sous tutelle doctrinale et scripturale au profit d’un nouveau magistère moral, demandait une analyse plus fine et aussi plus longue et plus détaillée :

– Une grande première partie est consacrée à l’examen des principales attaques dont l’Église a été la cible depuis les années quatre-vingt. Pourquoi ? Parce que, parmi les reproches qui lui sont ordinairement faits, certains (pédophilie, refus de la capote pour lutter contre le Sida, béatifications diverses, Pie XII, Isabelle la Catholique, célibat des prêtres, ordination des femmes, carmel d’Auschwitz, affaire Williamson, etc.), certains semblent faits de bonne foi. Bien des braves gens se disent, ma foi oui, on a beau ne pas être anticatholique, l’Église ferait bien de faire son mea culpa et de la mettre un peu en veilleuse. Il fallait donc étudier ces controverses en détail pour établir en quoi elles sont faibles, comment, par qui et pour quoi elles ont été agitées.

Peltier démonte les erreurs de la vulgate anti-romaine, les intentions et les trucs de ses promoteurs, officines gaies, juives et modernistes souvent liées. Les chapitres sur la déclaration de Mgr de Berranger à Drancy, le prétendu silence de Pie XII durant la seconde guerre mondiale, la canonisation d’Edith Stein et le carmel d’Auschwitz sont véritablement sans réplique.

On découvre à leur suite une entreprise, qui n’est pas cachée, et qui trouve des complices, tel Christian Terras, directeur de la revue « catholique » Golias, pour changer de fond en comble les textes chrétiens, leur exégèse, et en particulier la christologie, afin que le judaïsme conquière le primat intellectuel et moral parmi les religions. Après le prétendu « enseignement du mépris » viendrait l’enseignement de la prosternation : la Shoah devant remplacer la Croix, Auschwitz le Golgotha. Benoît XVI était judéophile et plutôt immigrationniste, mais il a préparé pour Jean Paul II la déclaration Dominus Jesus ; il n’était donc pas du tout malléable ni même compatible de ce côté-là. Son retrait a sûrement fait plaisir.

Le livre se termine sur des questions, dont la principale est : Comment se défend l’Église, ou : Se défend-elle ? Ou encore : Comment lire le pape, sa politique et sa doctrine ? A l’époque, c’était Benoît XVI, ce n’était déjà pas facile ; aujourd’hui, avec François, ça ne s’est pas simplifié. L’ouvrage montre là son ambiguïté : l’auteur a deux regards, celui d’un observateur laïc et celui d’un croyant. L’observateur convainc, le croyant est parfois pathétique. Les catholiques le comprendront, les autres retiendront une œuvre riche, dépaysante, très utile dans de nombreuses controverses, et qui, sans révisionnisme proclamé, fait litière d’un nombre impressionnant de mythes et d’arguments faux.

 Marcelle Puttemans
07/10/2013

Martin Peltier, Qui instrumentalise l’Église ?, éditions Godefroy de Bouillon, 315 p.

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