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Blanquer : au cœur de l’usine à simulacre ?

Blanquer : au cœur de l’usine à simulacre ?

par | 20 septembre 2017 | Politique, Société

Claude Meunier-Berthelot, enseignante, essayiste

♦ « J’étais chargé de préparer les discours, j’étais au cœur de l’usine à simulacre. » Ainsi parle un homme qui a travaillé auprès de Jean-Michel Blanquer lorsque celui-ci était directeur de cabinet adjoint de Gilles de Robien, le ministre centriste qui déjà avait annoncé, en 2005, le retour aux méthodes purement syllabiques d’apprentissage de la lecture.

Bis repetita ? Aujourd’hui le parler chaud de JM Blanquer suscite l’enthousiasme de la droite et de la bourgeoisie macronienne. Et si tout cela n’était qu’un vaste leurre ?

Un leurre qui ne dupe pas Claude Meunier-Berthelot. Décryptage sans concession des actes passés du ministre et de ses vraies priorités actuelles, par-delà le discours.
Polémia


Le mythe Blanquer

Il est désespérant de voir se répandre dans la « grande presse », et jusque dans les commentaires de personnalités de qui l’on serait en droit d’attendre un plus grand discernement, tous les commentaires élogieux qui accueillent – « avec soulagement », vont même jusqu’à dire certains – la nomination au poste de ministre de l’Education nationale de Jean-Michel Blanquer ainsi que les premières mesures annoncées ou prises.

Cette véritable psychose collective est d’autant plus désespérante qu’elle induit en erreur l’ensemble du public en attente de celui qui va restaurer la qualité du système éducatif qu’il pense avoir trouvé à tort en lui et que nous perdons ainsi un temps précieux que nous n’avons pas, non seulement en n’opposant pas de résistance mais en gratifiant le ministre des plus belles intentions.

Comment se fait-il que ce mythe se répande au sujet d’un ministre dont le lourd passé au sein de l’administration de l’Education nationale a laissé tant de marques durables et préjudiciables à l’avenir de notre société ?

Comment se fait-il également que les premières mesures annoncées ou prises de ce ministre, qui s’inscrivent dans le prolongement de ses actions antérieures, reçoivent un accueil empressé alors qu’elles sont toutes porteuses d’excellence uniquement pour les élèves des REP et REP+ (Réseaux d’éducation prioritaire) – populations issues de l’immigration – sans aucune incidence positive pour nos enfants mais, au contraire, prises à leur détriment ?

Raisons de la méprise

Le public se méprend parce qu’il n’appréhende pas la question de l’Education nationale dans son ensemble et sur un temps long. En conséquence, beaucoup ne saisissent pas les tenants et aboutissants de la situation, ni l’impact des décisions annoncées et parfois prises.

Egalement parce que la désinformation est omniprésente, notamment dans les grands médias, à cela s’ajoutant le langage subversif de nos gouvernants qui nous porte à ne pas percevoir la toxicité des mesures et à considérer qu’elles sont bénéfiques pour nos enfants, les intentions étant toujours louables, à l’opposé de l’effet prétendument recherché.

Egalement parce que beaucoup se contentent d’une lecture rapide des discours de nos gouvernants et que, « le diable étant dans les détails », la réalité apparaît souvent de façon incidente au détour d’une phrase ou en fin de discours : « In cauda venenum ».

Par surcroît, beaucoup ignorent le passé de Jean-Michel Blanquer.

Sa carrière professionnelle ?

Au sein de l’Education nationale… entre autres…

De 2006 au 21 mars 2007, JM Blanquer devient directeur adjoint du cabinet de Gilles de Robien, époque à laquelle le ministre a voulu rétablir la méthode alphabétique de lecture. Quand on sait, de l’aveu même de Gilles de Robien, qu’il a été court-circuité par son administration dont faisait partie Jean-Michel Blanquer, on peut être en droit de se poser quelques questions…

Puis, de 2007 à 2009, il devient recteur de l’Académie de Créteil et c’est lui l’initiateur des 20.000 places d’internats d’excellence réservées aux élèves issus de l’immigration, politique mise en cause à la fois par l’Inspection générale  et par la Cour des comptes, d’une part en raison de l’atteinte au principe d’égalité, d’autre part en raison du coût prohibitif du projet, les dépenses induites dépassant tous les délires : JM Blanquer proposait même de rémunérer les élèves !

Toujours à ce poste, il est à l’origine des « conventions d’éducation prioritaire » qui dispensent les élèves relevant de la politique de la ville et des ZEP du concours de recrutement pour intégrer Sciences Po, l’admission se faisant – pour eux seulement – sur dossier.

A la suite de controverses sur cette politique, il abandonne ce poste en 2009 et devient directeur général de l’enseignement scolaire au ministère de Luc Chatel jusqu’en 2012. Dans cette fonction, JM Blanquer supprime 80.000 postes d’enseignant et met en œuvre la réforme du lycée qui constitue une véritable révolution culturelle puisqu’elle repose, entre autres, sur :

  • un appauvrissement des contenus, matérialisé par une réduction importante des horaires de cours remplacés par des pédagogies de projet…
  • une autonomie des établissements scolaires non plus dans le cadre d’une déconcentration mais d’une décentralisation où il n’y a pas d’obligation de résultat mais seulement de moyens, à savoir des activités en remplacement des cours ;
  • une désagrégation de la transmission de la culture française avec une survalorisation de la LVE au détriment du français ;
  • une valorisation de l’engagement lycéen dans et hors établissement…

Ce qui explique que JM Blanquer veuille modifier le bac, basé essentiellement sur le contrôle continu, véritable « auberge espagnole ».

De 2013 à 2016 , il devient directeur général de l’ESSEC, Ecole en pointe pour la politique d’ « éducation prioritaire » et à l’origine d’une multitude de dispositifs en faveur des élèves des ZEP. 500.000 d’entre eux ont déjà bénéficié de ces différents dispositifs.

Outre ce cursus, il faut signaler que JM Blanquer est très proche de l’Institut Montaigne, institut proche du CAC 40 et des cercles mondialistes dont le club  Bilderberg.

D’ailleurs, il appartient au comité directeur d’ « Agir pour l’école », organisation satellite de l’Institut Montaigne dédiée à l’école élémentaire qu’il a aidée pour lancer un projet « lecture » dans les écoles des quartiers populaires « voulant sauver les gamins des banlieues en contournant [ce qu’il considère comme] les “archaïsmes” de l’école publique » !

C’est dire si nos hommes politiques savent bien ce qu’ils font pour nos enfants, très préoccupés, par contre, d’en préserver « les  gamins des banlieues ».

La « grande presse » en délire…

Si l’on se reporte aux manchettes de différents journaux, nous aurions enfin trouvé l’homme de la situation pour sauver le système éducatif :

  • Valeurs actuelles du 1er juin 2017: « Un hussard noir rue de Grenelle  » ! « Excellence au programme… le projet éducatif éloigne de la sempiternelle démagogie égalitariste, retour aux fondamentaux, condamnation franche de la méthode globale, retour de la chronologie dans les cours d’histoire, revalorisation de l’épreuve du bac… » ;
  • Le Parisien du 8 juin 2017: « Le redoublement fait surface Blanquer à l’Education nationale, c’est une vraie rupture idéologique, le pédagogisme progressiste n’est pas son truc … retour aux fondamentaux … efface le tableau du quinquennat précédent … éclatement du cadre national pour les rythmes scolaires, inflexion importante pour le redoublement, stages de remise à niveau, devoirs faits au collège… » ;
  • Libération du 8 juin 2017 parle de « casse » et de « revirement» : « rythmes scolaires à la carte, réforme du collège assouplie, autonomie des établissements… » ;
  • Le Point du 22 juin 2017 : JM Blanquer serait « l’homme qui veut arrêter les bêtises », serait également celui du « détricotage», du rétablissement des classes bi-langues et du retour du redoublement, souhaiterait « que tout le monde maîtrise l’orthographe »… ;
  • Wikipedia : La première action de JM Blanquer serait de revenir sur une partie de la réforme du collège en publiant un décret qui rétablirait les classes bi-langues, renforcerait les langues anciennes, rendrait facultatifs les E.P.I., augmenterait l’autonomie des établissements…

Revenant sur terre… Quelles décisions ? Quelles réalités ?

1/ – L’école primaire

Pour cette année, les classes de CP (cours préparatoire) sont dédoublées mais pour les REP+ seulement, sachant que les REP+ sont les « réseaux d’éducation prioritaire renforcés » dans lesquels sont scolarisés ceux que nos gouvernants appellent les « migrants » et ce que le système éducatif appelle les « élèves allophones nouvellement arrivés ». 2500 classes et 2500 postes sont redéployés, à raison de 12 élèves par classe, ce qui fait un total de 60.000 élèves, sachant qu’à la rentrée 2018 seront également dédoublées les classes de CP (cours préparatoire) et de CE1 des REP et des REP+ (1100 en tout sur le territoire national) : 12.000 classes seront concernées, à raison de 12 élèves par classe, ce qui donne un total de 144.000 élèves.

Dans ces classes seulement ce dédoublement est accompagné du maintien du dispositif « plus de maîtres que de classes » et de « la qualité de la pédagogie déployée dans ces classes … enjeu majeur », a bien précisé JM Blanquer, son objectif étant de « garantir pour chaque élève, à la sortie du CP, l’acquisition des savoirs fondamentaux ».

Rappelons que, pour nos enfants, cet objectif doit être atteint seulement fin de troisième !

Pour ce qui est de la méthode de lecture sur laquelle JM Blanquer reviendrait, dit-on. En réalité, le 28 août sur BFM-TV-RMC, il a simplement dit : « Il y a une vieille querelle entre méthodes globale et syllabique qui a été tranchée en faveur de la syllabique » – et non « qui est désormais » –, ce qui veut dire « Circulez, il n’y a rien à voir » ; il considère donc que la méthode utilisée est syllabique et qu’il n’y a rien à changer : les méthodes de nature globale sont et seront donc toujours utilisées mais « vendues » aux parents comme syllabiques.

En ce qui concerne les « rythmes scolaires », JM Blanquer confère davantage de liberté dans l’organisation de la semaine scolaire, ce qui est une pure question de forme. Par contre, il ne revient nullement sur la question de fond, à savoir : Pourquoi y a-t-il eu changement des rythmes scolaires ? Tout simplement pour introduire des activités périscolaires dans l’horaire scolaire au détriment des heures de cours et transformer l’école en lieu de vie, et ceci, seulement pour nos enfants. De cela, il n’est nullement question.

Pour ce qui est du redoublement, JM Blanquer le réserve aux REP car il précise que « ce redoublement n’est possible … qu’en complément d’autres mesures de lutte contre l’échec scolaire ». Or, les « autres mesures de lutte contre l’échec scolaire » – accompagnement toute l’année, stages de soutien –concernent uniquement les élèves des REP.

A cet égard, en juin, JM Blanquer avait annoncé des stages de remise à niveau pour fin août – « au moins dans les REP », avait-il bien précisé. D’ailleurs, le redoublement ne se justifierait absolument pas dans le système « refondé » pour nos enfants puisque basé sur une obligation de moyens – des activités en remplacement des cours – et non de résultat.

2/ – Le collège

JM Blanquer prévoit d’instaurer le programme « devoirs faits » qui consiste à proposer aux collégiens volontaires « un soutien gratuit après la classe, l’objectif étant de s’appuyer sur les expériences qui fonctionnent, notamment en éducation prioritaire », dit-il.

Ce système fonctionne donc déjà dans les REP et non pour nos enfants et continuera à fonctionner ainsi, car dans le collège « refondé » pour nos enfants, le principe de l’ « interdisciplinarité » est maintenu – « interdisciplinarité » signifiant activité se substituant au cours et dont JM Blanquer estime qu’elle « va dans le bon sens » – pour nos enfants, ce qu’il faut traduire par « dans le sens d’une école lieu de vie » ! Dans cette perspective, il n’y a pas de transmission de savoir, simplement la construction d’un projet par l’élève ; il n’y a donc pas de devoirs et, en disant « devoirs faits », on laissera croire aux parents qu’ils l’ont été à l’école.

JM Blanquer prétend vouloir donner davantage de liberté aux équipes pédagogiques mais c’était déjà prévu dans le système éducatif « refondé » pour nos enfants où il s’agit d’activités à réaliser et non plus de transmission de savoir ; les activités se feront en fonction du contexte local. Cela n’apporte rien de plus à la qualité du système éducatif.

JM Blanquer rétablirait les classes bi-langues ?

En réalité, elles n’avaient pas été supprimées mais au contraire élargies, puisque toutes les classes de collège le deviennent en vertu de la circulaire de rentrée 2017 de Najat Vallaud-Belkacem : « Les EILE (Enseignement lnternational de langues étrangères) sont ouverts à partir du CE1 … au collège, la continuité est assurée principalement dans le cadre de dispositifs bi-langues … pour l’année scolaire 2017-2018, l’objectif est le passage de tous les pays de langue arabe au nouveau dispositif EILE » ; l’enseignement de l’arabe se faisant par la lecture du Coran, il s’agira, en plus, d’un enseignement religieux !

JM Blanquer rétablirait un véritable enseignement du latin et du grec ? En réalité, il n’a pas dit qu’il revenait sur l’incorporation, par N.V. Belkacem, du latin et du grec dans les « enseignements pratiques interdisciplinaires » ; il a simplement déclaré : « Les établissements qui le souhaitent peuvent faire évoluer l’organisation par la mise en place d’un véritable enseignement du latin et du grec », c’est-à-dire qu’en réalité ceux qui veulent continuer à faire cours peuvent le faire, il s’agit d’un simple assouplissement ; il n’organise pas le rétablissement du latin et du grec ; il ne prend aucune décision à cet égard et, notamment, il n’envisage pas le rétablissement du CAPES de lettres classiques supprimé en 2015.

Au cours de son entretien à Valeurs actuelles du 31 août 2017, nous apprenons que « des cérémonies de remise des prix existent dans certains cas », dit JM Blanquer « pudiquement » au journaliste qui l’interroge. Il oublie seulement de préciser que c’est uniquement dans les REP puisque c’est uniquement dans ce cadre que l’excellence est recherchée.

Conclusion

La politique éducative de JM Blanquer est la continuité de la politique éducative de N.V.Belkacem et de celle engagée depuis des années par tous les ministres de l’Education.

Toutes les mesures cohérentes et porteuses d’excellence sont pour les REP et non pour nos enfants. D’ailleurs, JM Blanquer le révèle dans son entretien à Valeurs actuelles du 31 août 2017 :

« L’Ecole doit apporter une attention spécifique aux plus fragiles et donner plus à ceux qui ont besoin de plus. C’est la clé de la véritable égalité … donner des savoirs solides et une culture générale toute ma philosophie consiste à tirer le système vers le haut au bénéfice des plus fragiles, car c’est d’abord à eux que bénéficie une telle approche. »

Sachant que « les plus fragiles », dans le langage de nos gouvernants, ce sont les élèves des REP, il faut bien s’imprégner de cette réalité dévastatrice de notre identité et de la trahison de ceux qui nous gouvernent.

Ceux – beaucoup trop nombreux – qui pensent que JM Blanquer veut restaurer la qualité du système éducatif pour nos enfants sont dans l’erreur la plus totale : subsistent bien deux systèmes éducatifs parallèles en vertu de la loi de « refondation » de l’Ecole du 7 juillet 2013 :

  • un pour nos enfants, basé sur le constructivisme, sans obligation de résultat ;
  • un pour les REP, basé sur la transmission du savoir et la recherche de l’excellence des résultats, politique élitiste s’il en est !

Fabriquer une élite avec les populations immigrées et faire de nos enfants les larbins : voilà la poursuite de l’objectif du mondialiste et immigrationniste Blanquer, politique qu’il poursuit avec une délectation d’autant plus grande qu’il est applaudi pour ce qu’il ne fait précisément pas pour nos enfants !

Notre devoir est d’ouvrir grands les yeux, de ne pas refuser de voir la funeste réalité en face pour prendre impérativement, et en urgence, les moyens de combattre cette politique destructrice qui met gravement en péril, non seulement l’avenir de nos enfants, mais celui de la société française.

La destruction du système éducatif pour nos enfants se poursuit et s’amplifie pendant que, dans le même temps, les mesures prises visent à amplifier l’excellence des résultats dans les REP et REP+.

Nous avons donc tout intérêt à nous pencher, à la fois sur le passé de JM Blanquer et sur l’impact des mesures prises pour comprendre la réalité de la situation et ne pas nous laisser abuser.

Claude Meunier-Berthelot
19/09/2017

Voir aussi : Un « nouveau » ministre de l’Education : le clone Blanquer

Correspondance Polémia – 20/09/2017

Image : le nouveau ministre de l’éducation à l’école

Claude Meunier-Berthelot

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