Par Camille Galic, journaliste, essayiste ♦ « C’est justement ici que se trouve la clef, celle que nous négligeons le plus, la clef la plus simple, la plus accessible pour accéder à notre libération : ne pas participer nous-mêmes au mensonge ! Le mensonge peut avoir tout recouvert, peut régner sur tout, ce sera au plus petit niveau que nous résisterons : qu’ils règnent et dominent, mais sans ma collaboration ! ». Ainsi parlait Soljenitsyne, qui avait découvert en Occident que le goulag de la Pensée unique est encore plus terrible que le goulag tout court puisque beaucoup de ceux qui y sont enfermés ignorent même qu’ils en sont prisonniers. C’est pourquoi, dans son Manuel de lutte contre la diabolisation, Jean-Yves Le Gallou le place sur le podium des « grands diabolisés » aux côtés de Jeanne d’Arc, d’Enoch Powell, « le prophète foudroyé de la vieille Angleterre » et, moins évident, de Charles De Gaulle, « l’homme de l’indépendance vis-à-vis de l’ordre mondial ».
Dans l’article qu’il a consacré ici à ce précieux Manuel, Rémi Soulié insistait à juste titre sur le style de Le Gallou, « bien affuté, tranchant comme un rasoir », qui retourne contre eux « l’épée de plomb » des nouveaux Chérubins cornaqués par le philanthrope-ploutocrate George Sörös et son coreligionnaire Sumner Rothstein-Redstone, cet empereur de l’industrie du spectacle US qui a récemment fait décerner un BET Award à la pasionaria noire Assa Traoré (la sœur du « martyr » Adama), la faisant ainsi accéder à une notoriété mondiale. Tous les lecteurs de ses nombreux livres — Le Racisme antifrançais, La Tyrannie médiatique, Immigration – La catastrophe, etc. —, tous les habitués des Bobards d’or et des Journées de la dissidence le savent : le président de Polémia a le sens de la formule, et son punch est aussi efficace que sa langue est bien pendue. Comme quoi on peut être énarque et, « en même temps », bon tribun, bon vivant et joyeux compagnon à l’entrain communicatif. De ce point de vue, ce Manuel qui pourrait être didactique et même débilitant — car, pour ceux qui la subissent, la diabolisation est une véritable ordalie —, se lit avec un réel plaisir.
Un juteux business
Mais pas que. Ce petit livre, qui contient vingt et une recettes pour faire échec à la bien-pensance laïque et obligatoire, démontre ainsi très bien que, sous ses oripeaux citoyens, humanistes, universalistes, etc., la diabolisation n’est pas seulement une épreuve de force à ceux qu’on veut éliminer mais aussi un business, qui « fait vivre bien des activistes dont le gagne-pain est la lutte contre les “racistes”, les “ xénophobes”, les “climatosceptiques”, les “homophobes”, les “négrophobes” » … et désormais contre les covidosceptiques.
Démontant cette « économie de la diabolisation » que ses victimes doivent dénoncer pour la retourner contre elle, Le Gallou évoque la manne déversée à la myriade des associations par l’Union européenne, les États, les grandes métropoles telle Paris qui « a prévu d’attribuer, en 2020, 283 millions d’euros à 2 600 associations ». Dont beaucoup « vivent de chantage » puisque « accorder de généreux subsides, c’est souscrire une police d’assurance contre la diabolisation ». Ce « racket » n’épargnant pas les entreprises qui, pour éviter des campagnes hostiles sous prétexte de discrimination raciste ou sexiste, doivent en passer par les fourches caudines de SOS Racisme et de l’officine créée par Caroline de Haas, cette cofondatrice de l’association Osez le féminisme ! puis, aux élections européennes de 2014,, tête de liste en Île-de-France de la liste « Féministes pour une Europe solidaire » — 0,29 % des suffrages exprimés. Bien qu’elle se soit ridiculisée en mai 2017 en préconisant d’ « élargir les trottoirs » dans le nord de Paris pour éviter aux femmes d’être persécutées par les migrants, Mme De Haas reste la terreur de nombre de patrons n’ayant pas suffisamment féminisé ou « dégenré » leur encadrement.
Enfin, quel plaisir pour quelqu’un qui, comme moi, a croulé sous les procès intentés en vertu des lois Pleven, Gayssot and Co, de lire sous la plume de Le Gallou la dénonciation de bataillons d’avocats médiocrissimes, mais qui se sont enrichis en devenant des « mercenaires de la nébuleuse arc-en-ciel » ! « Leur couper les robinets d’argent, voilà le combat à mener », nous enjoint notre ami.
Diaboliser les diabolisateurs et ne jamais hurler avec les loups
Mais comment ? En se gardant des provocations inutiles (quand je soumettais à mon ami et avocat Eric Delcroix un dessin ou un article qui me paraissait un peu dangereux et qu’il me disait « C’est plaidable », je comprenais qu’un nouveau procès était possible, pour le seul bénéfice des associations parties civiles et de leurs défenseurs). Mais, surtout, en « diabolisant les diabolisateurs » ! Là encore, comment ? En imitant le Hongrois Viktor Orban qui, las de subir les empiètements, les injonctions et les menaces de Sörös, a décidé, ce qui lui a valu d’être taxé d’antisémitisme, « de ne pas rester en position d’accusé mais de se poser en accusateur ». Résultat : « Non seulement Orban a remporté la majorité absolue au Parlement hongrois, mais il n’a pas été exclu du PPE », la nébuleuse conservatrice au Parlement européen, bien qu’il ait tout récemment répété : « Les flux migratoires ne doivent pas être gérés, ils doivent être arrêtés. La Hongrie doit rester une nation européenne et chrétienne. » A l’inverse est édifiante la déchéance de l’Italien Gianfranco Fini, fossoyeur du MSI par ses reniements, contraint d’abandonner la politique en 2013 et tombé dans l’obscurité après une succession d’échecs cinglants.
L’exemple est à méditer par les politiques trop frileux : contre la diabolisation guettant quiconque va à contre-courant, ou se borne à émettre simplement des arguments de bon sens, protester de son attachement aux sacro-saintes valeurs républicaines ne sert de rien. Marine Le Pen a pu le constater qui, ayant exclu des militants et des cadres mal-pensants, condamné les propos « racialistes » de sa nièce Marion Maréchal ou assimilé le Grand Remplacement à un phantasme, a néanmoins été cataloguée « pire que son père » par le ministre de la Justice Dupont-Moretti, du coup unanimement applaudi par la Médiocratie. Avant d’être accusée de « nazisme », rien que ça, pour avoir placé la convention nationale de son parti à Fréjus début septembre sous le mot d’ordre « Français, réveillez-vous ! »
Si le conseil vaut pour les politiques, il vaut aussi pour le reste de la population. Inutile en effet, pour se dédouaner et échapper à l’opprobre, d’abdiquer son libre-arbitre et de dénoncer le voisin. Une fois que le sparadrap a été apposé, toutes les odes au vivre-ensemble, tous les tombereaux de cendres pour l’anniversaire du Vel’ d’Hiv’ et les génuflexions exigées par le mouvement Black Lives matter ne suffiront pas plus à le décoller, tout comme est indélébile le sang du roi Duncan sur les « petites mains » de Lady Macbeth. Il faut donc faire face, sans inconscience — l’enjeu est trop grave pour qu’on « se fasse plaisir » — mais avec détermination. Pour cela, il faut s’« édifier des citadelles intérieures » contre toute négation de son identité.» Afin d’« affronter l’adversité », bien sûr, mais aussi pour « supporter la lâcheté générale » et ne pas y succomber en commettant le péché suprême, qui est de hurler avec les loups contre ses propres amis.
Ce Manuel de lutte contre la diabolisation est aussi un manuel de remobilisation. Et donc de survie intellectuelle et morale.
Camille Galic
03/12/2020
Manuel de lutte contre la diabolisation, La Nouvelle Librairie Editions, collection Cartouches. 76 pages, 7 €.
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