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« Bobard protéine » : le bobard pur bœuf de Lisa Beaujour, Nora Bouazzouni et Aude Lancelin

« Bobard protéine » : le bobard pur bœuf de Lisa Beaujour, Nora Bouazzouni et Aude Lancelin

par | 11 février 2018 | Politique, Société

Les premiers candidats des très convoités Bobards d’Or ont été dévoilés. Et le cru 2018 commence très fort puisque, galanterie oblige, ce sont trois journalistes féminines (et féministes) qui ouvrent le bal : Lisa Beaujour, journaliste pour France Info, Nora Bouazzouni, journaliste indépendante, et Aude Lancelin, journaliste chez Le MédiaTV, média proche de la France Insoumise. Les hommes sont-ils plus grands en moyenne que les femmes car ils les ont privées de protéines depuis la nuit des temps ? C’est la thèse qui a été relayée par ces journalistes qui ont repris sans vérification une position défendue par une militante féministe. Un bobard pur bœuf !


[colored_box bgColor=”#f9d309″ textColor=”#333333″] Candidates : Lisa Beaujour (France Info), Nora Bouazzouni (L’Obs) et Aude Lancelin (Le Un)[/colored_box]

[colored_box bgColor=”#e50e49″ textColor=”#FFFFFF”]Comme annoncé par un grand nombre de nos amis parmi les médias de la réinformation, notre soirée consacrée aux Bobards d’Or se déroulera le lundi 12 mars 2018, dans le cadre prestigieux du Théâtre du Gymnase, situé au 38 boulevard Bonne-Nouvelle à Paris 10e arrondissement. Vous pouvez réserver votre place depuis le site internet de l’événement : bobards-dor.fr[/colored_box]

Une source unique

Tout part de la thèse de Priscille Touraille, une chercheuse en anthropologie spécialisée en « problématique du genre ». En 2005, elle publie une thèse sous la direction de Françoise Héritier, proposant d’expliquer la différence de taille entre les hommes et les femmes d’une manière étonnante. Les hommes auraient privé les femmes de protéine depuis le paléolithique.

Le 5 novembre 2017, à la faveur de la publication d’un entretien de Françoise Héritier au Monde quelques jours avant sa mort, cette théorie est réapparue.

22 novembre 2017 : Dans un éditorial d’Aude Lancelin, Le Un reprenait cette théorie, se basant sur l’entretien de Françoise Héritier, la qualifiant de « scoop anthropologique ».

8 décembre 2017 : Dans la même journée, L’Obs et France Info produisaient deux vidéos très vues sur le sujet.

La vidéo de France Info a été réalisée dans le cadre d’une capsule vidéo « Le monde de Lisa ». Destinée à être partagée le plus possible sur les réseaux sociaux, elle est courte et dynamique. Elle a été vue plus de 620 000 fois sur Facebook.

Pourquoi les femmes sont-elles plus petites que les hommes ?

Dans cette vidéo de France Info, la journaliste Lisa Beaujour explique doctement que « cette hypothèse est considérée comme la plus raisonnable ». Elle interroge directement Priscille Touraille et Nora Bouazzouni, journaliste, féministe et auteur d’un livre inspiré par la thèse de… Priscille Touraille !

Chez L’Obs, même principe de vidéo « virale » (destinée à être partagée sur les réseaux sociaux). Dans un format court, c’est uniquement une journaliste qui est interrogée en plan serré pendant plus de 3 minutes. Et cette journaliste n’est autre que… Nora Bouazzouni. Elle développe évidemment la théorie de… Priscilla Touraille.
Cette vidéo a elle aussi été vue plus de 620 000 fois sur Facebook.

Pourquoi les femmes sont plus petites que les hommes ?

“Les femmes sont plus petites car elles ont été privées de viande depuis la nuit des temps”

Publié par L’Obs sur vendredi 8 décembre 2017

Une théorie absurde selon les spécialistes

Problème : aucun de ces grands médias n’a jugé bon de contacter des spécialistes de la question pour faire semblant d’avoir un minimum de cohérence journalistique.

L’intox – volontaire ou non – avant tout !

Heureusement, d’autres ont eu plus de courage.

Le 14 décembre 2017Solveig Mineo publiait sur Bellica un article expliquant qu’en « douze ans d’existence, cette théorie n’a été appuyée par aucun spécialiste en biologie évolutive. »

Le 22 décembre 2017, Peggy Sastre, journaliste scientifique pour Slatepubliait un article complet sur la question après avoir interrogé plusieurs spécialistes de biologie évolutive. Le verdict était implacable : cette théorie était soit inconnue des spécialistes, soit considérée comme « absurde » ou « fumeuse ».

David Schmitt, psychologue évolutionnaire à l’université Brunel de Londres et spécialiste de l’étude transculturelle des différences sexuelles, trouve l’hypothèse « vraiment bizarre » selon les propos recueillis par Peggy Sastre.
Michel Raymond, directeur de recherche au CNRS et responsable de l’équipe Biologie Évolutive Humaine au sein de l’Institut des Sciences de l’évolution de l’université de Montpellier qualifie ainsi cette théorie de « fumeuse ».

Peggy Sastre a également interrogé Robert Trivers. Et, pour celui qui est considéré comme « le Darwin du XXe siècle », l’hypothèse de Touraille est du « grand n’importe quoi, du début à la fin. Le dimorphisme sexuel n’a pas commencé avec notre lignée à l’époque paléolithique –les mâles sont plus grands et plus gros que les femelles chez TOUS nos plus proches cousins, que ce soit chez les deux espèces de chimpanzés, les gorilles ou les orangs-outangs. Ce qui équivaut à 17 millions d’années d’histoire, avec un dimorphisme sexuel produit de la sélection sexuelle. Chez les grands singes, seuls les gibbons présentent un dimorphisme sexuel faible –et encore, qui va dans la même direction– et ils sont connus pour être fortement monogames ».

Un bobard inquiétant

Ce bobard est symptomatique d’un biais médiatique alarmant. Confrontés à des théories délirantes mais présentées comme sérieuses, les journalistes français semblent avoir du mal à vérifier leurs sources.

L’occasion était trop belle pour eux de démontrer que les différences sexuelles n’étaient pas le fruit de la biologie mais bien d’une construction sociale, patriarcale de préférence.

Ce bobard est donc une preuve de plus que des journalistes sont assez militants pour que plusieurs salles de rédactions de médias soient incapables d’effectuer une petite recherche sur le sujet ou même simplement de décrocher leur combiné pour appeler un spécialiste de la question.

Le pire dans ce bobard est peut-être que les vidéos virales utilisées pour propager cette fausse nouvelle ont été vues à plus d’un million de reprises en cumulé. Grâce à leur format court et dynamique adapté au partage, ces vidéos ont diffusé massivement cette théorie « absurde ».

A l’heure actuelle, ces vidéos d’intoxication – volontaire ou non – sont toujours en ligne, sans correctif apparent.

Source : Site officiel des Bobards d’Or

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