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Mélenchon contre les « tyrans médiatiques » et surtout les « blonds aux yeux bleus »

Mélenchon contre les « tyrans médiatiques » et surtout les « blonds aux yeux bleus »

par | 29 mars 2013 | Politique

Mémorable empoignade le 26 mars au journal matinal de France Inter entre le journaliste-animateur Patrick Cohen et Jean-Luc Mélenchon, invité du jour après sa sortie du samedi précédent, lors du congrès du Parti de gauche à Bordeaux, où il avait accusé le « salopard », Pierre Moscovici, de se comporter comme « quelqu’un qui ne pense pas français, qui pense dans la langue de la finance internationale ». C.L.

 Judaïsme et capitalisme sont-ils synonymes ?

« Un vocabulaire des années 1930 que l’on ne pensait plus entendre de la bouche d’un républicain », s’était aussitôt indigné Harlem Désir, premier secrétaire du Parti socialiste, dans un amalgame hardi et plutôt maladroit entre judaïsme et capitalisme apatride, cependant que le ministre des Finances lui-même, rappelant son père déporté à Auschwitz et refusant de croire à un simple « dérapage », taxait implicitement Mélenchon d’antisémitisme. Ce à quoi l’agresseur-agressé répliquait en affirmant « tout ignorer de la religion du ministre » (de même feu Georges Frêche, président du Conseil régional de Languedoc-Roussillon, avait-il feint d’ignorer les origines de Laurent Fabius auquel il avait attribué « une tête pas très catholique »), avant de proclamer que « si Pierre Moscovici était victime d’antisémitisme », lui-même et le Parti de gauche « seraient au premier rang pour le défendre ».

Un nouveau tribun du peuple, mais quel peuple ?

L’incident ayant été de nouveau évoqué longuement sur France Inter par Patrick Cohen – épinglé le 19 mars aux « Bobards d’Or » pour avoir sommé son confrère Frédéric Taddeï de cesser d’inviter des personnalités aussi sulfureuses que Dieudonné ou Alain Soral (1) dans son émission de France 3, Jean-Luc Mélenchon éructa, explosa. Il se déchaîna contre les « curés médiatiques » qui tentent d’imposer leur credo, contre les « tyrans médiatiques » qui se rassemblent éplorés « autour de la momie d’Hessel », le prophète des « Indignés », mais pour lesquels « il faut s’indigner dans le langage de la bonne société, il faut dire prout-prout, parler gentiment » alors que « ce n’est pas comme ça que s’exprime la colère du peuple » : « Les gens en ont par-dessus la tête, ils ont besoin d’avoir des dirigeants qui parlent dru et cru, qui disent les choses comme elles sont. »

Alors, bravo « Méluche » pour sa lecture attentive, voire son appropriation de La Tyrannie médiatique si efficacement démontée, et flétrie, par Jean-Yves Le Gallou dans son dernier livre ?

Pas si vite ! Et pas question de se laisser prendre au jeu de dupes que nous jouent Mélenchon et les médias, les seconds permettant par leurs fulminations au premier de s’emparer en toute légitimité de la « fonction tribunicienne », si longtemps exercée par Jean-Marie Le Pen. Quitte à ce qu’un homme politique incarne la révolte populaire contre la Pensée unique en matière économique – et éventuellement la subvertisse – en parlant « dru et cru », mieux vaut que ce soit quelqu’un du sérail, dont la doxa soit impeccable en matière d’antiracisme et de métissage universel, ce qui est finalement l’essentiel pour les maîtres de la « finance internationale » anxieux de dissoudre au plus vite les identités nationales dans le village planétaire.

La Normandie ou « l’horreur absolue »

Or, sur ce plan, M. Mélenchon donne toutes garanties. Invité le 24 mars, soit le lendemain même du « scandale bordelais », de l’antenne marocaine Hit Radio, ce natif de Tanger, dont le père et la grand-mère espagnols parlaient arabe et desquels, « tout petit », il avait appris « le sens de l’ouverture », ne racontait-il pas complaisamment comment cela avait été « l’horreur absolue » pour la famille quand elle s’était retrouvée en Normandie, dans ce pays de Caux aux « campagnes extraordinairement arriérées » où « personne ne parlait une langue étrangère » mais où régnait « un alcoolisme épouvantable » ?

Et l’ultra-cosmopolite Mélenchon d’enfoncer le clou : « Je ne supporte plus de vivre autrement que quand les gens sont mélangés… Je ne pourrais pas vivre dans le Ve ou le VIe arrondissement de Paris. Je ne peux pas survivre quand il n’y a que des blonds aux yeux bleus. »

Un racisme anti-Blancs digne de BHL

Vous avez dit racisme viscéral et primaire, digne des rappeurs les plus excités ? Mais, bizarrement, cette déclaration de guerre à la France des clochers (et des monuments aux morts) qui, que l’on sache, est encore majoritaire, n’a fait aucun buzz. Ce qui est d’ailleurs logique puisque cette pétition de principe, si semblable à celle de l’éditocrate Bernard-Henri Lévy dans la première livraison du Globe de Pïerre Bergé (« Bien sûr, nous sommes résolument cosmopolites. Bien sûr, tout ce qui est terroir, béret, bourrées, binious, bref, franchouillard ou cocardier, nous est étranger, voire odieux »), apparaissait tout à fait naturelle et normale aux « curés médiatiques » dans la perspective du « monde à créer » dont le coprésident du Parti de gauche attend l’avènement avec impatience. Sans doute n’en aurait-on même rien su si le précieux site fdesouche.com n’avait mis la vidéo en ligne sur son site. On conviendra pourtant que l’assaut est bien plus violent, et ciblé, que celui visant le ministre des Finances. Mais sans doute s’agissait-il, en gonflant la non-affaire Moscovici, de montrer à l’ancien sénateur de l’Essonne que le sentier de son éloquence était balisé.

Que, blonds ou pas, les derniers résistants du « terroir » ne se fassent donc aucune illusion : ce n’est jamais en leur faveur que s’exprimera le zélateur du « parler dru et cru ».

Claude Lorne
27/03/2013

Notes

(1) L’offensive du censeur Cohen, vite relayée par Roger-Pol Droit sur le site du Monde, semble avoir réussi : le vendredi 22 mars au soir, les invités de Taddeï étaient Marcela Iakub, Alain Finkielkraut et Daniel Cohn-Bendit.

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