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Conférence de presse « normale » : Hollande ou l’art politicien de durer ?

Conférence de presse « normale » : Hollande ou l’art politicien de durer ?

par | 22 novembre 2012 | Politique

De Hollande à Sarkozy, grande continuité des politiques mais changement des méthodes. À l’activisme médiatique de Sarkozy succède la fausse bonhommie politicienne de François Hollande. Bon connaisseur du monde politique, Bruce Denisse décrypte ici la dernière conférence de presse du Raminagrobis de l’Élysée :

« En politique, il n’y a pas de problème que l’absence de solution ne finisse par résoudre ».

Aux qualités d’une naissance normande (p’têt’ ben qu’oui, p’têt’ ben qu’non) l’actuel président de la République a ajouté une carrière politique en Corrèze dont la célébrité locale de la IVe République, le petit père Queuille, a laissé pour la postérité cette phrase magique : « En politique, il n’y a pas de problème que l’absence de solution ne finisse par résoudre ». Né, baptisé et engagé en politique sous de pareils auspices, il n’y a rien d’étonnant à ce que, depuis six mois, l’ensemble de la presse le brocarde pour son inaction, voire son inactivité, alors que le monde médiatique venait de vivre depuis des années dans la surexcitation, la réponse immédiate à des difficultés au final jamais résolues et les conférences de presse improvisées, sur tout et sur rien, trop souvent dans une rhétorique dont la caractéristique essentielle était de masquer une ignorance crasse sur la plupart des sujets.

C’est pourquoi la conférence de presse de François Hollande du mardi 13 novembre 2012 a montré, de ce point de vue, une étonnante déstabilisation des journalistes, tellement habitués à prendre la forme pour le fond qu’ils étaient incrédules devant ce retour à la normale. C’est pour cela qu’il ne faut pas se méprendre : j’ai, personnellement, et sans porter de jugement de valeur, assisté à un vrai retour du politique dans cet exercice si particulier et dont j’ai retenu cinq points essentiels, car il faudrait plus d’espace pour prétendre à l’exhaustivité.

Vote des étrangers, la balle est passée aux centristes

Le vote des étrangers aux élections municipales : manifestement, il s’en moque, car si c’était bien dans son programme, comme ce le fut un temps dans celui de Nicolas Sarkozy, il n’ira pas au référendum s’il n’a pas de majorité des trois cinquièmes au Parlement. Il est assuré du soutien de ses troupes. La balle est donc dans le camp de droite. Combien seront débauchés ? Chirac n’a-t-il pas voté l’abolition de la peine de mort en 1981, alors que celle-ci était dans le programme de Mitterrand et non dans le sien ? Sur ce sujet, le feu est désormais dans le camp d’en face, et la voie parlementaire est exclusive de toute alternative. On peut donc s’attendre à ce qu’il fasse la même réponse pendant 5 ans, sauf capitulation d’une poignée de « modernes », face aux « conservateurs », ce qui promet des soirées animées aux groupes UMP et UDI. Bravo l’artiste !

Mariage LGBT : le grand débat

La stratégie d’entrisme, dans tous les partis politiques, de ce groupe de pression allergique à la biologie est un modèle du genre, si l’on ose dire ! La transformation en problème juridique d’une question dans laquelle la procréation assistée divise le monde médical lui-même relève du grand art. Il y aura donc un débat exhaustif, où les rabbins, les évêques et les imams (de France) seront appelés à se prononcer. Après tout, sous prétexte que la tremblante du mouton ne pouvait pas se transmettre aux bovidés, on a transformé de paisibles ruminants en carnivores avec à la clef l’affaire de la vache folle ! Tout est possible ! Et le Parlement français s’apprête à transformer officiellement des hommes en femmes, chose que le Parlement britannique lui-même n’a pas encore osé faire ! Manifestement, ce n’est pas non plus une question prioritaire, car le Conseil constitutionnel sera saisi dans tous les cas de figure. Et l’on peut tout attendre d’un groupe de sages amateurs de corridas, y compris de ne pas être sensibles aux charmes du LGBT.

Nucléaire : on reverra ça en 2025

En 2025, le nucléaire ne devrait plus représenter que 50% de notre « mix-énergétique ». Cela tombe bien : en 2022, François Hollande ne sera plus là, et les centrales du plan « Giscard » décidé les 28 janvier et 1er février 1975 auront tout juste 50 ans entre 2025 et 2035. Les Verts peuvent donc râler tout leur saoul : on n’arrête pas une centrale avant sa fin de vie… Si ça n’est plus une filière d’avenir immédiat, ce n’est pas un problème immédiat non plus. 

Ministres : méfiance (justifiée) à l’égard de la « société civile »

Rappel : nul n’est indispensable au gouvernement, pas plus les « Verts » que Louis Gallois. Longue, en effet, est la cohorte des représentants de la société civile dont l’appel, pour les gouvernements de droite ou de gauche, aux compétences supposées, s’est achevé en tragi-comédie dans le meilleur des cas. Des « jupettes » à Fadela Amara et Rama Yade, en passant par Francis Mer, Kofi Yamgnane ou Jean-Jacques Servan-Schreiber, les fausses-valeurs rétamées par la cruauté d’un monde qui n’est pas le leur n’incitent guère, en période de crise, à distribuer des portefeuilles ministériels comme on donne des hochets. Avis aux téméraires qui n’ont pas encore compris que les cimetières sont remplis de gens indispensables et que ceux qui écrivent des rapports ne sont nullement pressentis pour les mettre en œuvre. Gallois comme les autres.

Retour à la loi ?

Rappel à la loi pour Notre-Dame des Landes – on est loin de la force injuste de la loi de François Mitterrand : la décision est prise, les recours sont épuisés et les chiens aboient, la caravane passe. Les risques de voir François Hollande contester les décisions de justice sont nulles. Aurore Martin qui circulait en Pays basque en se croyant à l’abri l’a appris à ses dépens.

Retour à la politique ?

Ce retour du politique, que la loi de finances pour 2013 illustre de façon violente pour beaucoup, montre, s’il en était encore besoin, que la technostructure a repris les rênes et que son porte-parole, désormais pour cinq ans à l’Elysée, manie l’humour pour dissimuler une volonté de fer et n’a pas le complexe du cancre des beaux quartiers vis-à-vis de ceux qui savent que la gestion d’un pays comme le nôtre n’est pas un jeu mais un sacerdoce. Après six mois de rodage, le diesel est en route. Gare à ceux, à gauche, qui ne l’auraient pas compris.

Bruce Denisse 
20/11/2012

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