Tramway des Maréchaux : un bilan « fortement négatif » selon un rapport d'universitaires

samedi 16 février 2008

Une étude universitaire résumée dans « le Perroquet libéré » vient d’établir que le bilan à la fois socio-économique (gain de temps, gain de confort) et écologique du tramway des Maréchaux à Paris était négatif. Ce n’est pas une surprise pour Polémia qui avait souligné dès 2003 les inconvénients du projet retenu : « Tramway des Maréchaux : un conformisme idéologique coûteux » (http://www.polemia.com/article.php?id=648)

Il est intéressant de rappeler qu’à l’époque les dirigeants des groupes UDF et UMP du conseil régional d’Ile-de France étaient aussi très critiques vis-à-vis du projet. Mais lors du vote décisif ils s’y rallièrent par crainte de passer pour « ringards ». Au détriment de toute rationalité, un investissement de 300 millions d’euros a donc été décidé pour de simples raisons de communication et de soumission à la tyrannie médiatique.

L’analyse effectuée aujourd’hui est sans appel : les conséquences négatives l’emportant dès la première année de fonctionnement sur les conséquences positives – Polémia

 

Tramway des Maréchaux : un bilan « fortement négatif » selon un rapport d'universitaires.

Dans une étude qui vient d'être rendue publique, trois universitaires spécialistes des transports dressent un bilan sévère de l'installation du tramway des Maréchaux, décidée sous Jean Tibéri et réalisée à grand renfort de communication par Bertrand Delanoë.

Sa mise en service n'aurait engendré aucun report de la voiture vers les transports en commun. Pire, elle aurait fortement aggravé la congestion dela circulation automobile sur le périphérique. Ce faisant, elle aurait contribué à une augmentation sensible des rejets de CO2.

La dimension strictement parisienne du projet, associée au choix idéologique du boulevard des Maréchaux pour prendre de la place à la voiture,a un coût estimé par le rapport à 900 M €.

Trois chercheurs, les Professeurs Prud'homme (Paris XII), Kop (Paris I) et le doctorant Koning (Paris I), ont effectué une recherche sur le tramway des Maréchaux ouvert il y a un an entre Ivry et Garigliano. Cette recherche s'appuie notamment sur une enquête auprès de 1000 usagers du tramway.

Parmi les principales conclusions de ce travail scientifique et indépendant, il est à retenir les plus marquantes:

 - le tramway a représenté un investissement de 315 millions d'euros financé sur fonds publics. Il augmente donc les impôts - ou la dette publique - de ce montant.

- le tramway n'a pratiquement pas entraîné de report modal. Seulement 2,6% des usagers du tramway étaient préalablement des usagers de la voiture. Le tramway a réduit le nombre de déplacements en voiture dans Paris de moins de 1/1.000

- le tramway (et les rétrécissements de voies qui l'ont accompagné) a diminué de 40% les déplacements automobiles sur les boulevards des Maréchaux. Pour l'essentiel, les automobilistes ainsi évincés se sont reportés sur le boulevard périphérique adjacent. Le trafic a en effet augmenté bien davantage sur la partie Ivry-Garigliano du périphérique que sur le reste du périphérique.

- le tramway a engendré des gains pour les usagers du tramway qui en sont satisfaits : des gains de temps (4 M €/an), de confort difficiles à estimer (4 M €), ainsi qu'un gain de décongestion du métro, encore plus difficile à mesurer (4 M € également).

- le tramway a entraîné des pertes de temps pour les automobilistes qui continuent d'utiliser les Maréchaux et qui roulent moins vite (-7 M €), pour ceux qui rentrent dans Paris et doivent s'arrêter pour laisser passer letramway (-2 M €), et surtout pour les usagers du périphérique. Le périphérique est en effet une voie souvent congestionnée et l'augmentation du nombre de véhicules entraîne des ralentissements qui font perdre du temps (peu) à tous les utilisateurs (nombreux) du périphérique. Les calculs effectués font apparaître un coût important à ce titre (-33 M €).

- le tramway a contribué à augmenter les rejets de CO2 à Paris. Les rejets de CO2 au km augmentent lorsque la vitesse diminue. D'un côté, le tramway engendre une diminution des rejets de CO2 du fait du remplacement des autobus au gazole par un tramway à l'électricité, et du faible transfert modal. D'un autre côté, il engendre une augmentation des rejets de CO2 du fait de la réduction de la vitesse des voitures qui continuent d'utiliser les Maréchaux, de l'allongement des parcours des véhicules qui se sont reportés sur le périphérique, et surtout du fait du ralentissement (faible) de tous les véhicules (nombreux) qui utilisent le périphérique. Au total, le tramway augmente les rejets de CO2 d'un peu plus de 3.000 tonnes par an.

Au total, le solde des gains et des pertes sociales annuelles engendrés par le tramway est négatif (-28 M € par an). En termes d'utilité économique, sociale et environnementale, l'investissement initial ne sera donc jamais récupéré. La somme actualisée (à 4%, sur 30 ans) des gains et des coûts, y compris le coût d'investissement, s'établit à près de -900 M €. Ce petit milliard peut être considéré comme une mesure du gaspillage que représente le tramway.

En termes d'économie politique cependant, le projet est probablement intéressant pour la municipalité de Paris. Les principaux bénéficiaires sont les usagers du tramway, qui sont majoritairement des Parisiens, c'est-à-dire des électeurs. Les coûts sont pour les automobilistes, qui sont principalement des banlieusards, et qui ne votent pas à Paris. Le bilan environnemental est négatif, mais il est discret : les voitures en moins sur les boulevards des Maréchaux se remarquent davantage que les voitures en plus sur le boulevard périphérique. Il n'est donc pas surprenant que le projet ait eu, et garde, la faveur d'à peu près tous les élus de Paris. Cette opposition entre l'intérêt de la partie (Paris) et du tout (l'agglomération) éclaire les débats actuels sur l'utilité d'un « Grand Paris ».
http://www.leperroquetlibere.com/
23/01/08
Correspondance Polémia
07/02/08

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