Peugeot contraint de renoncer au marché iranien

samedi 21 juillet 2012

Haro sur les dirigeants industriels de Peugeot à qui l’on reproche, essentiellement le président de la République et son ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg, la fermeture de l’usine d’Aulnay et les licenciements qui en seraient consécutifs. Tout est bon : les mauvaises performances commerciales, la vente à l’export de types de véhicules en fin de série, ne pas avoir su, comme l’aurait fait Volkswagen, adapter sa stratégie industrielle aux nouveaux marchés et enfin laisser planer le spectre d’une OPA sur le groupe après avoir été déjugé avec une action qui a chuté de 77% en un an, le tout assorti d'une accusation publique de mensonge.
Benjamin Pelletier, formateur – management interculturel chez Freelance, chargé de cours à l’Ecole Centrale de Paris, à l’Ecole de guerre économique…, écrivain, donne un éclairage géopolitique sur la cabale lancée contre Peugeot, sans doute plus près de la réalité que les invectives partisanes du ministre, largement reprises par nos grands médias nationaux.
Avec l'aimable autorisation de l'auteur que nous remercions, nous reproduisons la première partie de son article et nous invitons nos lecteurs à se rendre sur son site Gestion des Risques Interculturels pour en lire l'intégralité.
Polémia

 

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Peugeot divorce de l’Iran…

Peugeot PSA a pris la décision en février dernier de suspendre ses livraisons en Iran pour le mois de mars. Puis, la décision a été reconduite pour avril et tout laisse à penser que Peugeot va se désengager définitivement du marché iranien. A première vue, on pourrait penser qu’une telle décision a été motivée par de mauvaises performances commerciales ou la mise en œuvre d’une nouvelle stratégie où l’Iran n’aurait plus sa place.

Il n’en est rien. En Iran, le groupe français détient près de 30% du marché, lequel représente 22% des volumes de la marque. Son partenaire Iran Khodro commercialise en effet avec succès des Peugeot 405 et 206, assemblées en Iran à partir de pièces détachées fabriquées sur le site de Vesoul en France.

La présence de Peugeot en Iran date de 1978. Le groupe français a su s’inscrire dans le paysage local, à tel point que la Peugeot 504 du président Ahmadinejad a connu son quart d’heure de célébrité lorsque ce dernier l'a mise aux enchères en 2010 pour financer un programme immobilier

Pourquoi donc Peugeot quitte l’Iran alors même que ce pays représente son premier débouché pour les véhicules particuliers devant la France (458 000 ventes en Iran contre 441 790 en France en 2011) ?

en se mariant avec General Motors

Pour comprendre les raisons de cette décision, il faut revenir au 29 février dernier, date à laquelle Peugeot a annoncé avoir conclu une alliance avec General Motors (GM). Suite à la montée du groupe américain dans le capital de Peugeot à hauteur de 7%, les deux constructeurs s’engagent à développer des plateformes de production commune et à créer une coentreprise dans les achats. L’objectif est de parvenir à des synergies annuelles de deux milliards de dollars.

Quand, quasiment au même moment, Peugeot annonce interrompre ses livraisons à l’Iran, il se défend de toute pression de GM et met en avant les problèmes de financement de ses activités en Iran du fait des sanctions internationales sur les transferts bancaires entre l’Europe et l’Iran :

« Cette décision n’a pas été prise pour répondre à des pressions de GM. Nous faisons face à une situation géopolitique compliquée et les sanctions mise en place, notamment vis-à-vis des banques, ne nous permettent plus de garantir le financement de nos activités sur place. »

Les activités de Peugeot en Iran existaient depuis 34 ans, survivant à la révolution islamique, à la guerre Iran-Irak, aux deux guerres du Golfe et aux sanctions internationales. Mais, soudainement, au moment même où l’alliance avec GM est conclue, ce n’est plus le cas – et il n’y aurait aucun rapport de cause à effet ? Voilà qui est difficile à croire.

D’autant plus que de nombreux médias ont souligné le rôle actif tenu par un lobby américain anti-Iran pour faire pression sur les deux constructeurs afin que le Français cesse ses activités en Iran. Il s’agit de l’UANI ((United Against Nuclear Iran) Si l’on s’en tient aux articles parus dans la presse française, on apprend seulement qu’il s’agit d’un lobby qui « fait pression sur des entreprises du monde entier pour qu’elles arrêtent de commercer avec l’Iran » (L'Usine Nouvelle) , que c’est un « lobby hostile à l’Iran » (Le Monde), dont le directeur se nomme Mark Wallace, lui-même est décrit simplement comme « ancien ambassadeur américain aux Nations unies » (Figaro , Echos, Monde).

L’UANI, une force de frappe considérable

Or, à bien regarder les profils des dirigeants de l’UANI et des membres du comité consultatif, on réalise que cette organisation – qui se présente comme « non partisane »– est aussi impartiale que les Ultras du PSG quand l’OM joue au Parc des Princes. Peugeot a ici affaire à une véritable puissance nucléaire du lobbying et des relations publiques, avec en prime des connexions extrêmement étroites avec le monde du renseignement. Voici quelques profils :

  • Mark Wallace, directeur. Il a fondé l’UANI en 2008 avec l’ancien directeur de la CIA James Woolsey, actuellement membre de son comité consultatif, Richard Holbrooke (décédé), dernièrement envoyé spécial des Etats-Unis pour l’Afghanistan et le Pakistan, et Dennis Ross , impliqué dans le processus de paix israélo-palestinien, proche des Démocrates tout comme de George Bush. L’épouse de Mark Wallace a été la directrice de la communication de George Bush et conseillère principale auprès de John McCain lors de sa campagne de 2008…

Lire la suite sur le site de Benjamin Pelletier.

Benjamin Pelletier
Gestion des Risques Interculturels
9/06/2012

Correspondance Polémia – 21/07/2012

Image : Usine Khodro à Téhéran, assemblage de la Peugeot 206 - photo upi.com

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