L’association pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN), proche de l’UDC, a organisé une université d’été romande sur le thème « L’Europe contre l’Union européenne ». Nous donnons ici de larges extraits de l’intervention de Jean-Yves Le Gallou consacrée à la novlangue européenne.
Polémia
La meilleure analyse de la situation politique de l’Europe contemporaine se trouve chez Georges Orwell. Dans 1984, cet auteur britannique décrivait prophétiquement (dès 1948) un régime totalitaire qui contrôlait la population en appliquant cinq règles :
2011=1984
Eh bien, nous y sommes :
La Novlangue contemporaine : restreindre les limites de la pensée
Dans le roman de George Orwell, 1984, le héros du livre s’appelle Winston ; l’un de ses collègues, Syme, est en charge du dictionnaire de Novlangue ; Syme explique ainsi le but de la Novlangue : « Ne voyez-vous pas que le véritable but de la Novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? A la fin nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. »
La fondation Polémia a en quelque sorte actualisé le travail du linguiste de 1984 ; elle a publié un petit dictionnaire qui comprend environ 300 mots parmi les plus employés aujourd’hui par l’élite dirigeante et notamment les médias.
Ce dictionnaire de Novlangue contemporaine comprend cinq types de mots :
Le « moulag », un goulag verbal
Voici comment fonctionne ce goulag verbal, ce goulag mou.
Eh bien, ce goulag mou, ce « moulag », nous le connaissons aujourd’hui en Union européenne.
Le vocabulaire de l’Union européenne repose sur une triple pratique :
Les mots tabous
- Le mot peuple n’apparaît guère qu’une fois dans le Traité consolidé issu des négociations de Lisbonne, je cite : « Les peuples d’Europe en établissant ente eux une union sans cesse plus étroite ont décidé de partager un avenir pacifique fondé sur des valeurs communes ». Une affirmation au demeurant inexacte puisque les peuples français et néerlandais ont rejeté par référendum le texte qui leur était proposé en 2005 ; qu’à la suite de ce vote, le référendum prévu en Pologne a été supprimé et qu’en 2007 le peuple irlandais a refusé, lui, le traité de Lisbonne qui reprenait quasiment le même texte. En fait, les institutions de Bruxelles n’aiment pas l’expression collective des peuples, ils lui préfèrent le concept individualiste de « citoyen » : on y reviendra !
- Le mot référendum est aussi honni dans la logique de l’Union européenne : on y préfère le droit de pétition devant le Parlement européen, sans aucun effet pratique. Ces mêmes « citoyens de l’Union » (article 8B, alinéa 4), je cite : « au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatif d’États membres, peuvent prendre l’initiative d’inviter la Commission européenne dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de l’Union est nécessaire aux fins de l’application des traités ». Je laisse aux Suisses, familiers de la démocratie directe, le soin de décrypter à quel point le pouvoir des pétitionnaires est encadré !
- Le mot identité n’apparaît lui aussi que marginalement.
L’identité européenne n’est nulle part définie. Si ce n’est négativement dans la mesure où la référence chrétienne a été délibérément évacuée, notamment selon Valéry Giscard d’Estaing, rédacteur du premier projet de Constitution, pour ne pas heurter les religions minoritaires, qui précisément ne sont pas constitutives de l’identité européenne.
L’identité nationale elle est évoquée marginalement ; mais sans contenu réel pour au moins trois raisons :
- Le mot « préférence » a lui aussi disparu alors même que la notion de « préférence communautaire » était au cœur du premier Traité de Rome. Deux mots se sont imposés à sa place : libre circulation (y compris pour les ressortissants et les marchandises des pays tiers) et non discrimination.
- Quant au mot frontière, il apparaît certes mais… négativement :
Les mots trompeurs
- Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dont je vous parle – traité de Lisbonne consolidé – est le produit d’un tour de passe-passe. Le projet de Constitution européenne a été rejeté par les Français et les Néerlandais : il n’a donc pas été ratifié. Un nouveau texte a été approuvé à Lisbonne puis ratifié sans référendum par les Parlements. Ce texte a été présenté aux opinions publiques, notamment à l’opinion française, comme un « mini-traité ». Sic ! Or c’est une maxi-Constitution, c’est un document de plusieurs centaines de pages qui, à quelques détails près, reprend le texte de la défunte Constitution européenne. Le traité consolidé qui en est issu, ce sont 358 articles, 37 protocoles additionnels, 65 déclarations ! Mesurez ici l’ampleur du déni de démocratie ! Rejeté par référendum, approuvé par les parlements.
- Ce texte consacre aussi un chapitre à la politique extérieure et de défense commune. A ce titre, on parle de « défense européenne » : un mensonge absolu dans la mesure où l’article 42 précise, je cite, « La politique de l’Union […] respecte les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’OTAN et elle est compatible avec la politique commune et de sécurité arrêtée dans ce cadre ». Le mot « défense européenne » camoufle ici une vassalité absolue aux États-Unis d’Amérique. Le mot OTAN lui-même relève aujourd’hui de la Novlangue puisqu’il sert à légitimer des interventions d’agression sur le théâtre asiatique (Afghanistan) ou africain (Libye).
Jean-Yves Le Gallou
Polémia
27/08/2011
A suivre, voir : La Novlangue de l’Union européenne (deuxième partie et fin)
Version pdf du texte complet
Version Pdf : Dictionnaire de Novlangue (Mise à jour janvier 2009)
La brochure, Dictionnaire de Novlangue, peut être commandée à Polémia, 60ter rue Jean-Jacques Rousseau, F 92500 Rueil-Malmaison, au prix de 15 euros franco de port.
Image : 1re de couverture du Dictionnaire de Novlangue