Insécurité : la fuite vers la technologie

lundi 25 octobre 2010

La technologie a bonne presse dans la lutte contre l’insécurité. Elle donne l’image du progrès, de la science, de l’absence d’arbitraire humain et les gouvernements n’hésitent pas investir de plus en plus dans des techniques comme la vidéo-surveillance ou le scannage des valises dans les aéroports. De plus, l’utilisation de technologies croissantes est bénéfique pour les industriels qui les produisent. La seule victime semble être le contribuable et, avec lui, l’équilibre des finances publiques.

Les obstacles technologiques ne modifient pas les états d’esprit

Pourtant certains rapports émettent de fortes critiques sur ces méthodes qui ne peuvent en soi résoudre le problème de l’insécurité. La technologie permet de limiter les dégâts mais ne permet aucunement de remédier aux causes de la montée de la malveillance. L’origine du terrorisme est dans l’état d’esprit des terroristes et les obstacles technologiques ne modifient pas fondamentalement les états d’esprit. L’inconvénient du tout-technologique est d’empêcher de se poser des questions sur les origines psychologiques de la délinquance ou du terrorisme.

Fuite vers la technologie, fuite des réalités humaines ?

La fuite vers la technologie est aussi une fuite à l’égard des réalités humaines que l’on ne veut surtout pas voir pour des motifs d’ordre idéologique.

On ne veut pas voir que l’humanité est plus diverse qu’on ne le croit, que l’agressivité est une donnée inhérente à la nature humaine, que la culture seule apporte des barrages efficaces à cette agressivité, que les institutions encadrent les individus et les empêchent de dériver vers la satisfaction des pulsions de la partie reptilienne de leur cerveau.

La société moderne, sécularisée, où la famille est de plus en plus éclatée, où les mœurs sont conditionnées par les médias de masse qui n’ont guère d’autre rationalité que financière, où l’immigration anarchique de personnes culturellement déracinées se poursuit malgré les tentatives de la contenir, est une société propice au développement des comportements violents et criminels.

En France, le nombre des crimes et délits est resté stable de 1946 à 1968 et s’est mis à quadrupler depuis lors. Pourquoi ? La réponse à cette question ne peut être technologique, elle ne peut être qu’humaine. L’humanisme classique qui était la colonne vertébrale de l’éducation laïque comme religieuse sous la IIIe République n’est plus à la mode. On veut former des jeunes aux techniques professionnelles avant tout : anglais et informatique d’abord ; l’histoire, la philosophie (qui comporte la morale), les langues anciennes (avec les exemples humains que donnaient les Anciens) semblent ringardes aux tenants du tout-technologique.

Tout se passe comme si on voulait faire des hommes des « animaux technicisés », selon la forte expression du philosophe Martin Heidegger. La technique au service des instincts !

Déracinement et comportements immoraux

La technologie a ses mérites qu’il ne faut pas méconnaître. Mais tant qu’on n’aura pas une vraie politique d’enracinement des citoyens, enracinement géographique, historique, civique, linguistique, juridique (extension des droits de propriété), on aura ce qui n’est pas séparable du déracinement : la montée des comportements immoraux, non pas nécessairement irrationnels mais dont le calcul rationnel du plaisir maximal à court terme exclut toute barrière morale, tout sens des responsabilités, tout investissement dans le temps.

Le mot d’ordre contre l’insécurité ne devrait pas être : toujours plus de moyens mais plutôt toujours plus d’enracinement. On se moque des Suisses avec leur sens civique qui n’exclut pas la délation, avec leur enracinement local qui surprend notre jacobinisme, avec ce qui semble un provincialisme qui pourtant n’exclut aucunement la modernité économique, mais on devrait s’en inspirer. Le déracinement, voilà l’ennemi essentiel de la cohésion sociale. L’enracinement, c’est la garantie de la paix civile, de la sûreté et, en définitive, de la liberté !

Yvan Blot
Octobre 2010

Correspondance Polémia – 25/10/2010

Image : Videosurveillance

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