De Zohra Dati à Solal Sarkozy : comment choisir un prénom ?

jeudi 21 janvier 2010

En appelant sa fille « Zohra » Rachida Dati a montré l’importance qu’elle attachait à ses origines arabes. En appelant son fils « Solal », Jean Sarkozy a pris pour modèle le héros juif d’une organisation internationale (dans « Belle du Seigneur » d’Albert Cohen). Il a en quelque sorte montré la voie à « celui qui va faire son chemin » (Solal en hébreu). Il lui a rappelé sa double lignée sépharade par sa mère, née Jessica Sébaoun, et son arrière grand-mère paternelle, Andrée Mellah, juive de Salonique. Un choix dont Nicolas Sarkozy a déclaré qu’il « l’adorait ».

Dans les hautes sphères du pouvoir, voici donc rappelé l’importance de la lignée dans le choix d’un prénom. Une occasion de relire le « Dictionnaire des prénoms, d’hier et d’aujourd’hui, d’ici et d’ailleurs » d’Alain de Benoist présenté ci-dessous par son auteur.

Polémia

« Choisir un prénom : tâche à la fois simple et redoutable ! Pour combien de parents, ce choix n’a-t-il pas été (et n’est-il pas encore) une manière de casse-tête ? Le nombre des prénoms auxquels il est possible d’avoir recours est considérable, l’unanimité dans la famille est longue à s’établir, et la liste dressée va bientôt s’allonger rapidement. Au fil des semaines, on hésite, on se ravise, et finalement il arrive bien souvent que l’on arrête son choix un peu au hasard, parce qu’il faut bien en finir.

Un choix important pour donner du sens

C’est pourtant un acte important que le choix d’un prénom, et il est certainement regrettable que ce choix, qui va marquer un enfant, puis un homme ou une femme pendant toute son existence, se fasse trop souvent de façon hasardeuse, négligente, fantaisiste ou encore en fonction d’engouements superficiels ou de modes éphémères, qui auront déjà été disparus quelques mois après la naissance de l’intéressé.

Nomen, omen, un prénom, un présage

Après tout, prénommer, comme nommer ou dénommer, c’est qualifier, c’est donner du sens. Le prénom est un bien symbolique. Il reflète la part de dénomination qui revient à chacun d’entre nous. Nous ne pouvons pas, en général, choisir le nom de famille de nos enfants, mais nous pouvons (et nous devons) choisir leurs prénoms. Les Anciens disaient : « Nomen, omen » (Un nom, un présage). C’est en tout cas une vieille idée que nommer les êtres et les choses, c’est en quelque sorte les faire accéder à une nouvelle forme d’existence, en les dotant d’une signification du point de vue spécifiquement humain. C’est pourquoi, dans toutes les sociétés traditionnelles, le prénom a une importance qui va très au-delà de l’usage quotidien.

Un idéal, une lignée, un héritage

Choisir un prénom, c’est indiquer une direction à suivre, un idéal à atteindre. La croyance la plus fréquente est que le prénom possède une influence qui s’attache à l’âme et à la personnalité de celui qui le porte. Le prénom peut aussi placer l’enfant sous le patronage d’un saint ou d’un personnage illustre. Enfin, il rattache l’enfant à sa famille, à sa lignée, à sa région ou à son pays d’origine. Le sens des prénoms, que l’étymologie nous permet de connaître, devient alors essentiel. Les prénoms cessent d’être de simples sons pour devenir représentatifs d’une idée. A l’origine, le prénom est un marqueur culturel et social, qui renvoie à des croyances religieuses aussi bien qu’à des sensibilités régionales ou nationales, à des logiques familiales, à des modes de vie, à des façons différenciées d’apprécier l’existence. Par le prénom qu’il porte, l’enfant se rattache à tout un environnement historique et spirituel, à tout un héritage : il continue sa famille, il est un maillon d’une longue chaîne qui le rattache à ses ancêtres, c’est-à-dire à tous ceux qui ont contribué, en partie, à façonner son corps et son caractère, à déterminer ses qualités et ses défauts.

Un patrimoine symbolique

« Dans ses noms, un peuple révèle son visage », écrivait vers 1930 l’essayiste Bogislav von Selchow. Le répertoire des prénoms que l’on trouve au sein d’une culture constitue un précieux patrimoine symbolique : les noms portés dans un peuple font partie de l’âme de ce peuple.

(…) Non, ce n’est pas un acte sans importance que de donner à un enfant le nom qui, au sein de la famille, le caractérisera comme cet être unique et irremplaçable et qui, en même temps, le reliera à ceux qui l’ont précédé. C’est même, d’une certaine manière, contribuer à son immortalité. Comme le proclame fièrement l’Edda scandinave : « Les hommes meurent, les bêtes meurent, mais ce qui ne meurt jamais, c’est le nom d’un homme de bien.»

Depuis les années 1950, les habitudes en France ont considérablement changé quant au choix des prénoms attribués aux enfants. Ce domaine, comme tous les autres, n’a pas été épargné par les transformations de la société et l’évolution des mœurs. L’habitude s’est également prise (dans l’entreprise, à la télévision ou ailleurs) d’appeler de plus en plus par leur prénom des personnes auxquelles on ne s’adressait auparavant qu’en utilisant leur nom de famille. Raison de plus pour s’efforcer de faire un choix en toute connaissance de cause. Quand les choses ne vont plus de soi, ne faut-il pas être deux fois plus responsable ?

Un dictionnaire qui aide à retrouver les origines

Telle est la raison d’être de ce dictionnaire : aider les parents à faire leur choix, en leur donnant une liste aussi complète que possible des prénoms utilisés de nos jours en France, en précisant leur origine, leur histoire et leur sens. Ce livre comprend deux grandes parties. La première se compose d’un certain nombre de renseignements et d’informations générales sur les prénoms : dans quelles circonstances les prénoms ont fait leur apparition, quelles ont été leurs fréquences d’attribution, ce qu’il en est aujourd’hui, quelle est la meilleure manière de faire son choix, quelles sont les règles à observer vis-à-vis de l’état civil, etc. La seconde partie contient le dictionnaire proprement dit. Vous y trouverez tous les prénoms que vous cherchez, classés par ordre alphabétique avec, pour chacun d’eux, l’indication des formes dérivées ou apparentées et des diminutifs, des précisions sur leurs origines étymologiques, des indications historiques, etc. Les formes dérivées figurent également dans le dictionnaire, assorties d’un renvoi à la notice principale, ainsi qu’un certain nombre d’encadrés ayant trait à différentes catégories de prénoms (prénoms régionaux, prénoms arabes, prénoms juifs, etc.) »

Par Alain de Benoist

Dictionnaire des prénoms, d'hier et d'aujourd'hui, d'ici et d’ailleurs

26/03/2009

Correspondance Polémia 21/01/2010

Alain de Benoist, Dictionnaire des prénoms, d'hier et d'aujourd'hui, d'ici et d’ailleurs, ed. Picollec, 26/03/09

Commande: http://www.alaindebenoist.com/pages/librairie.php

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