Dette française : les gouvernants achètent des clientèles électorales et du temps d’antenne en hypothéquant l’avenir (édito 07/2009)

dimanche 5 juillet 2009

Le déficit public français va dépasser 7% du produit intérieur brut. 40% des dépenses de l’Etat seront payées par emprunt en 2010. Une situation, certes, voisine de celle des grands pays anglo-saxons : Etats-Unis et Grande-Bretagne. Avec cette différence : la France est beaucoup moins touchée qu’eux par la crise des banques. Les causes du déficit français sont ailleurs : dans des choix politiques de court terme.

30 ans de dérive clientéliste

Depuis la fin de la politique de « rigueur » conduite par Raymond Barre, tous les budgets français ont été en déficit. L’idée maîtresse des gouvernements successifs a presque toujours été de distribuer des avantages à leurs clientèles électorales, tout en reportant à demain les réformes nécessaires pour maîtriser l’évolution des comptes sociaux.

2007 : une campagne électorale aux conséquences financières lourdes

A l’ouverture de la campagne présidentielle de 2007 la France connaît un déficit budgétaire élevé, proche de la limite maximale des 3% du PIB imposée par le Traité de Maastricht. Pourtant les deux seuls candidats présentés par les médias comme susceptibles d’être élus, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, firent chacun des promesses électorales à hauteur de 40 milliards d’euros. L’élection de Nicolas Sarkozy fut d’ailleurs immédiatement suivie d’une envolée du déficit avant même l’arrivée de la crise mondiale.

La gouvernance médiatique, une source de dépenses supplémentaire

Méthode privilégiée d’exercice du pouvoir, la gouvernance médiatique est aussi source de création de déficit : à chaque événement – économique, social, sociétal – le président de la République se rend sur les lieux et annonce des dépenses supplémentaires.

Certes, toutes les annonces ne sont pas suivies d’effet et une déclaration présidentielle ne suffit pas à engager des dépenses publiques. Néanmoins la gouvernance médiatique pèse sur les réunions des comités interministériels et va clairement dans le sens d’une augmentation des déficits.

Les incohérences du Grenelle de l’environnement

Il est légitime de prendre en compte les préoccupations écologiques. Mais la démarche idéologique sectaire (contre le nucléaire) et clientéliste (avec les associations écologistes et les lobbys intéressés) du Grenelle de l’environnement conduit à obérer les finances publiques par des mesures coûteuses et sans réel intérêt écologique : le développement artificiel des énergies solaire et éolienne coûtera plusieurs milliards d’euros par an ; le canal Seine-Nord, 4 milliards d’euros. Et ce sans aucun intérêt pour la « planète » (*) mais au détriment du paysage français.

La crise économique

La crise économique est évidemment une cause supplémentaire d’aggravation du déficit notamment parce qu’elle réduit mécaniquement les recettes de l’Etat et augmente les dépenses d’assurance, de soutien et d’assistance. Il s’agit d’ailleurs là de « stabilisateurs automatiques » qui atténuent, et surtout diffèrent, les effets de la crise en maintenant la demande. S’ils survenaient sur une base financière saine, ces « stabilisateurs automatiques » présenteraient sans doute plus d’avantages que d’inconvénients. Tel n’est pas le cas.

40 milliards + 40 milliards + 40 milliards

Ainsi dans le déficit actuel, il est possible de distinguer trois sources :

– 40 milliards hérités des présidences Mitterrand et Chirac (la charge d’intérêt de la dette) ;

– 40 milliards créés par Nicolas Sarkozy (« paquet fiscal », baisse de la TVA dans la restauration, « Grenelle de l’environnement », réponses « volontaristes » à la crise, « cadeaux divers ») ;

– 40 milliards d’effets mécaniques de la crise.

Endettement des générations futures et transfert du patrimoine à l’étranger

Ainsi l’essentiel du déficit français reste dû à des décisions prises généralement en fonction de considérations de court terme : achat de clientèles électorales, effets d’annonces permettant d’accéder à du temps d’antenne. Il est possible d’y voir la préférence pour l’immédiat qui est une conséquence de la démocratie, particulièrement quand elle est médiatique.

Mais la contrepartie en est doublement élevée :

– c’est l’endettement des générations futures qui paieront l’intérêt de la dette, pour les deux tiers, souscrite par des emprunteurs étrangers ;

– c’est le transfert du patrimoine national à des investisseurs étrangers : ce sont les grands pays excédentaires en devises (Chine, pétromonarchie notamment) qui financent les deux tiers de la dette d’Etat française et qui acquièrent les fleurons du patrimoine immobilier de l’Etat.

Polémia
05/07/2009


(*) Voir à ce sujet l’excellent livre de Christian Gerondeau CO2 : un mythe planétaire dont Polémia rendra prochainement compte.

Voir aussi :

« Finances publiques : le péril argentin »
http://www.polemia.com/article.php?id=1959

et

Dette publique : la Cour des comptes préconise d’agir vite
le 25 06 2009
http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/dette-publique-cour-comptes-preconise-agir-vite.html?xtor=RSS-13

Image : Evolution de la dette publique 1978-2007. En bleu : majorité de droite. En rose : majorité de gauche.
cluaran.free.fr/dette.html
 

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