Nouvelles de la « très grande dépression »

mardi 2 juin 2009

« Le surréalisme financier qui a présidé aux évolutions boursières, aux indicateurs financiers et aux commentaires politiques des mois de mars et d’avril 2009 est le chant du cygne du cadre de référence dans lequel le monde vit depuis 1945. » C’est en tout cas l’avis du groupe d’études et d’anticipation européenne, le GEAB. Un « GEAB » qui fait figure d’oracle car il anticipe depuis trois ans, avec une grande précision, les événements financiers et économiques qui s’enchainent.

Avancée dès janvier 2007 par le GEAB l’expression « Très grande dépression » apparaît aujourd’hui comme la plus appropriée pour décrire la situation économique mondiale : d’une part, parce que le nom « Grande Dépression » est déjà utilisé pour faire référence à la crise de1929 et aux années qui ont suivi; d’autre part, car la nature et l’ampleur de ce qui se passe actuellement est d’une tout autre ampleur, ne serait-ce qu’en raison de la mondialisation.

Polémia donne ici à ses lecteurs une synthèse de la livraison de mai 2009 du GEAB

Polémia



Brouillard statistique et ivresse des profondeurs

« Nous sommes entrés dans l’ère du brouillard statistique : les indicateurs que chacun a l'habitude d'utiliser pour ses décisions d'investissement, de rentabilité, de localisation, de partenariat, etc.… sont devenus obsolètes (…) sous la pression de deux tendances :
-d'une part, les tentatives désespérées de sauvetage du système financier mondial, et en particulier des systèmes américain et britannique, ont de facto brisé les instruments de navigation du fait des manipulations en tout genre effectuées par les établissements financiers eux-mêmes et par les Etats et banques centrales concernées ;
-d'autre part, les quantités astronomiques de liquidités injectées en une année dans le système financier mondial, et en particulier dans le système financier américain, ont conduit l'ensemble des acteurs financiers et politiques à une perte totale de contact avec la réalité. De fait, à ce stade, ils semblent tous atteints du syndrome de l'ivresse des profondeurs - qui déclenche chez ceux qu'il affecte une impossibilité à se repérer dans les profondeurs marines et les conduit à s'enfoncer toujours plus profondément en croyant en fait remonter vers la surface. »

La rupture avec les cadres de référence multiséculaire

« Le système international auquel nous sommes habitués voit se multiplier les évènements ou les tendances qui sortent de cadres de référence multiséculaires, prouvant à quel point cette crise est d'une nature sans équivalent dans l'histoire moderne. Et le seul moyen de mesurer l'ampleur des mouvements en cours est de prendre le recul de plusieurs siècles. A se limiter aux statistiques sur quelques décennies, on ne perçoit en fait que les détails de cette crise systémique globale on n'a pas la vue d'ensemble. »

Le GEAB cite ici « pour l'exemple trois cas qui montrent que nous vivons une époque de rupture comme il n'en survient qu'une fois tous les deux ou trois siècles :
1. En 2009, le taux d'intérêt de la Banque d'Angleterre a atteint son plus bas niveau depuis la création de cette vénérable institution (0,5%), soit depuis 1694 (en 315 ans).
2. En 2008, la Caisse des Dépôts et Consignations, bras financier de l'état français depuis 1816 sous tous les régimes (royauté, empire, république, ...), a connu sa première perte annuelle (en 193 ans).
3. En Avril 2009, la Chine est devenu le premier partenaire commercial du Brésil, une position qui depuis des siècles anticipe fidèlement les ruptures majeures de leadership mondial. En effet, depuis que, il y a deux cents ans, le Royaume-Uni avait mis fin à trois siècles d'hégémonie portugaise, c'est seulement la deuxième fois qu'un pays accède à cette position. Les Etats-Unis, avaient en effet supplanté le Royaume-Uni au début des années 1930 comme premier partenaire du Brésil. »

Comme dans Matrix, un monde de fiction

Enfin « Les Etats-Unis sortent également de leurs référentiels nationaux de ces cent dernières années (…): perte de valeur du dollar, déficits publics, dette publique cumulée, déficits commerciaux cumulés, effondrement du marché immobilier, pertes des établissements financiers. »

Pour l’équipe du GEAB il faut aller voir (ou revoir) Matrix, la série de films de science fiction où les êtres humains vivent dans un environnement dont la perception est manipulée informatiquement. Ils s'imaginent vivre une vie cossue alors qu'ils vivent dans une misère noire, mais toute leurs perceptions (vue, ouïe, odorat, toucher, goût) sont manipulées.

Un rebond de la crise ?

Pour le GEAB le scénario des prochains mois pourrait être intitulé : « crisis reloaded », « crise rechargée ».

Trois événements à venir sont inscrits au calendrier :

- l’échec programmé des stimulations économiques américaine et chinoise dans la mesure où les administrations n’ont pas la capacité suffisante pour lancer les programmes annoncés ;
- un rendez vous du Royaume-Uni avec le FMI au bout de l'été 2009 dans le cadre d’un scénario de quasi faillite à l’islandaise ;
- la chute du dollar.

Toutes ces prévisions du GEAB peuvent paraitre pessimistes mais il y a un décalage complet entre les titres des grands médias économiques et la réalité.

Les grands médias en décalage avec la réalité

Ainsi ni Le Figaro, ni le Les Echos, encore moins la radio BFM, ne présentent de manière neutre leurs informations : ils parlent systématiquement de « bonnes » ou de « mauvaises » nouvelles en privilégiant les premières. Et ils donnent généralement la parole aux économistes et gestionnaires des grandes institutions de la banque et de l’assurance : précisément, à ceux là mêmes qui se sont beaucoup trompés ; et notamment Patrick Artus, chef économiste de Natixis, la banque française la plus sinistrée…

Il est d’ailleurs significatif que mois après mois les prévisions doivent être systématiquement révisées à la baisse.

Le monde du WEB prévoit une crise de cinq ans

Le site Les Infos-stratèges
(http://www.les-infostrateges.com/actu/0905714/fin-de-la-crise-economique-des-previsions-objectives)
a publié une étude de la société canadienne Filteris, spécialiste de l’e-réputation.

Près de 2000 sites, blogs et forums ont ainsi été sélectionnés, cartographiés et analysés afin d’y mesurer les perceptions françaises à propos de la crise économique et de sa durée potentielle. Globalement et de manière redondante les sources Web analysées anticipent une crise économique multisectorielle d’une durée de 5 ans. Un sacré décalage d’appréciation avec la presse papier et audiovisuelle dépendant de ses bailleurs de fond !

Andréa Massari.
Correspondance Polémia.

http://www.leap2020.eu/GEAB-N-35-est-disponible!-Crise-systemique-globale-Juin-2009-Quand-le-monde-sort-definitivement-du-cadre-de-reference_a3240.html

 

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