Le G20 s'engage à favoriser la relance et à surveiller la finance mondiale

vendredi 12 décembre 2008

A la lecture de nos grands médias qui ont rendu compte avec beaucoup de pudeur et de concision le sommet du G20 qui s’est tenu à Washington le 15 novembre dernier, on avait le sentiment que rien de concret n’avait débouché si ce n’est la décision de se revoir au printemps, en espérant que d’ici là la situation s’éclaircirait d’elle-même.
Le G20, rappelons-le, rassemble les ministres des Finances des vingt pays les plus riches. Mis à part un appel à une relance économique et à une réforme de la surveillance financière mondiale et des institutions internationales, présenté plus comme un vœu pieux qu’un réel engagement politique, ce sommet aurait surtout montré les divergences de ses participants sur plusieurs points fondamentaux :

– Bush ne veut pas entendre parler de refondation du capitalisme comme Nicolas Sarkozy le réclame depuis plusieurs semaines ;
– Nicolas Sarkozy a critiqué les Etats-Unis à propos de la guerre en Géorgie, rendant par la même occasion Washington responsable de la crise mondiale, ce que les Américains n’ont pas apprécié ;
– Le communiqué final, très technique et peu compréhensible du grand public, ne répondait pas, selon Nicolas Sarkozy, à ce qu’en attendait l’homme de la rue.

Le seul message qui aurait fait l’unanimité des grands argentiers aurait été celui de déclarer : « Le protectionnisme : voilà l’ennemi ». Puisse Barack Obama, absent du sommet, l’avoir entendu !
Voilà pour les aspects négatifs.

En fait, selon RTL info.be., ce sommet n’a pas été aussi terne qu’on a bien voulu le dire. Ce site, dans sa livraison du 16 novembre (*), c’est-à-dire dès le lendemain du sommet, donne, dans le détail, les mesures, notamment budgétaires, sur lesquelles les membres du G20 se seraient mis d’accord et qui expliquent les différents plans de relance, engagés en Europe et spécialement en France, destinés à freiner, sinon à contrer la récession. Mais ces mesures sont-elles les bonnes ? C’est une autre histoire ! Car si l’on en croit certains augures de l’économie, l’injection forcenée d’argent public, avec notamment les plans de sauvetage bancaire, ne ferait qu’aggraver la crise…
C’est en tout cas, pour le moment, l’avis d’Angela Merkel qui résiste aux pressions de la part aussi bien des Européens, et tout spécialement de Nicolas Sarkozy, que de sa propre majorité, pour écarter toute précipitation dans l’adoption de plans de relance. Elle refuse un plan européen et ne veut pas aller au-delà des dispositions qu’elle a déjà annoncées pour l’Allemagne, soit les 31 milliards d’euros répartis sur deux ans. La principale raison de son refus est qu’elle veut, en parfait accord avec son ministre des Finances, Peter Steinbrück, défendre l’orthodoxie financière, c’est-à-dire revenir à l’équilibre des finances publiques pour lequel l’Allemagne a engagé les réformes nécessaires.

Alors ? Que penser ? Angela Merkel serait-elle la seule à voir clair ? La raison prévaudra-t-elle sur l’emballement ?

Comme le dit Francis Gut dans sa « Chronique d’une crise financière », dans le n° 48 de « Horizons et débats » :

« L’art de colmater les brèches déployé à Washington, ainsi que les mesures monétaires prises antérieurement et postérieurement, ne nous feront pas sortir de la crise financière et économique ; c’est seulement lorsque les gouvernements auront compris et reconnu cette erreur que l’établissement d’un nouveau système et la fin de la dépression s’esquisseront. »

Pour conclure, nous nous limiterons à citer la remarque quelque peu désabusée de Frédéric Lemaître, éditorialiste au « Monde » :

« Pourtant, malgré l’absence du président élu, les deux événements [l’élection de Barack Obama et le sommet du G20] présentent la même portée symbolique. Celle de la fin d’une certaine domination de “l’homme blanc”. » (« Le Monde » du 21/11/08.)

La crise financière et économique n’étant hélas qu’à ses débuts, Polémia aura l’occasion d’y revenir.

René Schleiter
Polémia
11/12/08


Note :
(*) RTL info.be — Economie - Monde dim 16 nov.

Les dirigeants des grands pays développés et émergents (G20) se sont engagés samedi à relancer l'économie mondiale, menacée par la récession dans les pays riches et d'un net ralentissement ailleurs, tout en renforçant la surveillance du système financier.
« Nous sommes d'accord (pour dire) qu'une réponse politique élargie, fondée sur la coopération macro-économique, est nécessaire pour rétablir la croissance », indique la déclaration finale du sommet de Washington, organisé après deux mois d'une crise financière inédite depuis les années 1930.
Le G20 a énuméré des « immédiates » pouvant être adoptées pour empêcher l'économie mondiale de sombrer dans une récession prolongée, suggérant l'utilisation de « mesures budgétaires pour stimuler la demande interne avec des résultats rapides » ou des baisses des taux d'intérêt dans certains pays.
Le président français Nicolas Sarkozy en a conclu que le G20 était d'accord sur la « nécessité d'une relance coordonnée, concertée de l'action économique », comme le réclamaient le Brésil, la Turquie ou l'Espagne, alors que la déclaration ne parle que de « coopération ».
L'OCDE a annoncé jeudi que ses membres subiraient l'an prochain une contraction de 0,3% de l'activité, avec une forte hausse du chômage à la clé.

Pour remédier aux causes de la crise, les dirigeants du G20 ont approuvé un « plan d'action », une liste de mesures « à haute priorité » permettant d'améliorer la supervision du système financier, sur lesquelles leurs ministres des Finances devront faire des propositions d'ici au 31 mars.
Cinq domaines d'action ont été définis :

–remise à plat des aspects de la régulation qui exacerbent les crises,
–harmonisation des normes comptables,
–amélioration de la transparence des marchés de produits dérivés,
–révision des pratiques de rémunération des dirigeants de banques pour éviter des prises de risque excessives
–révision du mandat, de la gouvernance et des besoins en capitaux des institutions financières internationales ».

Pour éviter une répétition de la crise financière, le G20 veut que « tout intervenant, tous les produits et tous les marchés soient réellement soumis à surveillance. Il n'y aura plus de zone d'ombre », selon les explications de la chancelière allemande Angela Merkel.
Toutefois, à la satisfaction des Américains et des Canadiens très attachés à leur souveraineté, le G20 a souligné que « la régulation relève avant tout de la responsabilité des régulateurs nationaux ». Il a surtout recommandé une intensification de la « coopération internationale entre régulateurs » et un renforcement des « normes internationales où cela est nécessaire ».
Sans citer nommément les fonds spéculatifs, échappant actuellement à toute régulation, le communiqué évoque le besoin de « transparence sur les actifs hors bilan et des instruments financiers complexes ».
D'ici au 31 mars, le G20 demande aussi des propositions pour que les « régulateurs s'assurent que les agences de notation (critiquées pour avoir surévalué des placements de mauvaise qualité) répondent aux normes les plus exigeantes »
. Comme le souhaitait la France, le G20 met aussi la pression sur les paradis fiscaux, en demandant « à moyen terme » aux autorités nationales et régionales de « mettre en oeuvre des mesures pour protéger le système financier mondial des juridictions non coopératives qui présentent un risque d'activité financière illégale ».
Les dirigeants ont convenu de se retrouver avant le 30 avril pour « vérifier la mise en œuvre » des décisions prises à Washington. M. Sarkozy a proposé que ce sommet ait lieu à Londres, la Grande-Bretagne assurant l'an prochain la présidence du G20.
Le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, a proposé que le G20 se donne un an pour « achever la nouvelle régulation du système financier ».Il n'est cependant plus question d'une réforme globale du système financier, sorte de Bretton Woods II, souhaitée par certains pays, dont la France.
Pour pallier le risque du protectionnisme, le G20 a pris par ailleurs l'engagement de tenter de relancer d'ici la fin de l'année le cycle de négociations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
Le G20 a également proposé une réorganisation des institutions multilatérales, comme le FMI et la Banque mondiale, pour faire de la place aux grands pays émergents. Il a appelé ces organisations à épauler les pays en détresse en leur fournissant des financements.
Même s'il n'a pas obtenu l'instauration d'un super-gendarme de la finance internationale, M. Sarkozy a estimé que le G20 avait réussi à établir « une nouvelle gouvernance économique ».
Il était difficile d'obtenir beaucoup plus du sommet de Washington car le 20 janvier 2009, le président américain George W. Bush laissera la place à Barack Obama, absent du sommet.
Le G20 regroupe le G8 (Allemagne, France, Etats-Unis, Japon, Canada, Italie, Royaume-Uni, Russie + Union européenne), ainsi que l'Afrique du Sud, l'Arabie Saoudite, l'Argentine, l'Australie, le Brésil, la Chine, la Corée du Sud, l'Inde, l'Indonésie, le Mexique et la Turquie. L'Espagne et les Pays-Bas étaient invités.

http://www.rtlinfo.be/

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