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Ukraine : Est ou Ouest ? (Première partie)

Ukraine : Est ou Ouest ? (Première partie)

par | 13 mai 2014 | Géopolitique

Si l’on en croit les linguistes, le synopsis est la toute première ébauche que remet un auteur au scénariste dans le but d’intéresser un producteur pour conclure, dans la meilleure hypothèse, sur un scénario, puis un film. Au moment où la Russie nous est jetée en pâture par les médias malveillants, le texte que nous remet Frédéric Malaval est plus qu’une ébauche. En quelques phrases, il dresse un tableau presque exhaustif de cet immense pays, qui devrait donner aux occidentaux quelques orientations pour mieux percevoir la mentalité du Russe et surtout mieux comprendre ses réactions face au désordre, à la confusion et à l’arrogance des Occidentaux à son égard.
Polémia

Chaque jour nous apporte son lot de rebondissements dans le feuilleton « Ukraine: Est ou Ouest ? ». Visiblement rien n’est joué, car l’Occident rentre de plain-pied dans le pré carré russe. Que devons-nous faire comme Français attachés à une conception historique de notre pays au sein de la civilisation européenne ? La réponse est simple : soutenir la Russie et l’encourager à défendre et à reconstituer son empire du Pacifique à la Vistule, voire sur l’Oder ou sur l’Elbe. Notre identité et notre sécurité en dépendent.

Les arguments à l’origine de cette vision iconoclaste sont que, d’une part, les Russes, chez eux, sont conscients de leurs énormes atouts militaires, et que, d’autre part, jamais ils n’envahiront, ni n’ont songé à envahir l’Europe de l’Ouest.

Les principaux arguments avancés sont issus de l’histoire de l’Europe, de l’histoire de la Russie, de considérations géographiques, politiques, militaires ; le tout envisagé dans une perspective largement nourrie d’Écologie.

Pourquoi un écologue intervient-il en géopolitique ?

En préambule, l’écologiste auteur de ces lignes s’excuse auprès des géopoliticiens patentés d’empiéter sur leurs plates-bandes. Pourquoi se hasarde-t-il dans cet espace alors que dans sa dernière contribution à Polémia, il admettait être loin de ses eaux territoriales en livrant un témoignage sur le Belarus. La première réponse est que, particulièrement attaché à la question russe, il n’a trouvé nulle part ce qu’il aurait souhaité lire. Depuis plus de dix ans, ayant été régulièrement dans la partie occidentale de la Russie, il a pu rencontrer de nombreuses personnalités engagées dans une réflexion géopolitique. Quand on arrive avec tous les truismes reçus à l’Ouest, on se sent bête… Bon, visiblement, on n’en meurt pas ! J’espère que cette contribution sera utile à nos décideurs actuels ou futurs.

En outre, l’Écologie est une discipline résolument macroscopique dont l’étude des compétitions intra- et inter-espèces est dans son périmètre de compétence. On dispose donc des outils pour penser des relations reposant sur le rapport de forces. Bien évidemment, les géopoliticiens non écologues sont invités à leur tour à écrire sur les écosystèmes et l’écologie en général. Que ces derniers écrivent sur la dimension géopolitique de l’Écologie donnerait un souffle à un courant phagocyté par le gauchisme et dont le message est coincé sur le catastrophisme depuis plus de 40 ans. Pour nous, une écosociété ne pourra se réaliser que sur des ensembles homogènes écosystémiquement.

La Russie, c’est plat

Une des matrices de l’Écologie est la géographie. C’est par l’association de la géographie et de la théorie darwinienne que l’Écologie se conçut comme une discipline autonome. Or, la géographie est le terreau nourrissant la géopolitique. Écologie et géopolitique sont donc issues de la même matrice. Quelles sont alors donc les spécificités géographiques de la Russie ? Deux d’entre elles s’imposent sans contestation possible : c’est plat et c’est vide.

Une des premières impressions que ressent l’homme de l’Ouest en arrivant en Russie est que c’est plat. Ayant toujours navigué dans un périmètre ponctué des villes suivantes : Saint-Pétersbourg, Vyborg, Novgorod, Pskof, Minsk, Moscou, Vologda, il est difficile d’identifier des zones vallonnées. La Carélie, région russe depuis la seconde guerre mondiale, l’est bien, mais les Finlandais n’ont de cesse de la revendiquer avec toute la force d’un peuple de 5 millions d’habitants face à un ensemble de près de 150 millions. Malgré ce chiffre élevé, la seconde impression est que c’est vide. Vous pouvez vous promener en Russie sans rencontrer beaucoup de gens. Moscou et Saint-Pétersbourg absorbent déjà près de 20 millions de cette population dont les membres les plus proches de nous trempent leurs pieds dans la Baltique, et les plus éloignés dans le Pacifique.

Schématiquement, le paysage est le même de Peter (Saint-Pétersbourg) à Vladivostok : plat avec une alternance de plaines et de forêts striées de grands fleuves. On trouve des loups, des ours et des renards dans toute cette zone couverte par neuf fuseaux horaires. Il y a quand même quelques chaînes de montagnes (Oural, Caucase, Altaï, Kamtchatka), mais elles échappent à l’imaginaire russe.

Pour se convaincre de la platitude de la Russie, il suffit de contempler un planisphère conçu là-bas. J’en ai un en face de moi dans mon bureau. Le géographe russe a considéré comme zones montagneuses les reliefs d’une altitude de 200m au-dessus du niveau de la mer. Malgré cette précaution, la quasi-totalité du territoire russe, tant européen qu’asiatique, est sous ce niveau. Au contraire, le reste du monde n’est que montagnes plus ou moins élevées allant de 200m d’altitude jusqu’au 8.848m de l’Everest dans l’Himalaya. Pour un Russe, la forêt de Meudon et son point culminant à 180 mètres est presque une zone montagneuse.

Dans une perspective montesquienne, la spécificité de ce territoire a forgé l’esprit du peuple russe qui finalement ne se sent à l’aise que dans des espaces plats et vides. L’histoire de la Russie et la manière de faire la guerre des Russes en sont les conséquences les plus manifestes.

L’histoire de la Russie en 769 mots

Avant d’entrer dans l’histoire proprement dite, notons d’emblée que les préhistoriens ne différencient pas dans l’espace celte les populations habitant les plaines du nord de l’Europe, de celles de l’ouest et du sud. Nous sommes visiblement tous issus d’un même creuset ethno-culturel. Mais depuis, des caractéristiques propres à chaque peuple européen se sont imposées.

Ainsi, à partir du VIIe siècle ap.JC, la grande plaine d’Europe de l’Est est peuplée par un ensemble de tribus qualifiées de slaves, avec, comme voisins, au nord des peuples varègues, finnois ou baltes, et, au Sud, le peuple nomade khazar, qui s’est fixé sur la basse Volga et l’empire Byzantin. Ce peuple Khazar avait majoritairement choisi le judaïsme comme religion fédératrice. Les autres étaient païens à l’époque. Byzance était le pôle du christianisme. Pour l’anecdote et la compréhension du fédéralisme russe d’aujourd’hui, relevons que c’est en Russie que subsiste un État dont le paganisme est la religion officielle : la République des Maris ou Mari El. Successivement agressés par le judaïsme, le christianisme, l’islam et l’athéisme, ils ont dû attendre l’éclatement de l’URSS pour renouer avec la religion de leurs ancêtres. Ils sont situés au sud de la Volga.

Au VIIIe siècle, ces espaces se structurent politiquement sur ce que les historiens appellent la « Route des Varègues aux Grecs » joignant la mer Baltique à la mer Noire via des fleuves et rivières dont le Dniepr est le principal constituant de ce réseau. Notons dès à présent qu’aujourd’hui celui-ci traverse le Belarus et l’Ukraine. Novgorod au nord et Kiev au sud sont des villes importantes sur cet axe. Rus’ de Kiev, République de Novgorod, etc., ignorant délibérément les vicissitudes politiques de l’époque, on retiendra que se développa alors une civilisation évoluée qui n’avait rien à envier à celle d’Europe de l’Ouest. La vigueur viking au nord, le raffinement romain au sud sont les deux pôles stimulant cette civilisation si bien décrite dans les romans d’Elena Arseneva à travers son héros Artem le Boyard.

Puis, en 1241, Kiev est conquise par les Tatars, peuple envisagé comme mongol ou turc selon les auteurs. La marche de ces derniers est définitivement bloquée à la bataille de Legnica en 1241 par des Polonais auxquels se sont associés les Teutoniques. L’invasion de la Horde d’Or mongole ruine ces espaces vassalisés soumis au paiement d’un tribut. De la succession de guerres, d’alliances, de révoltes et de soumissions émergeront la Grande Pologne – Rzeczpospolita –, puis la Russie actuelle construite à partir de Moscou. Mais ces espaces plats se sont retrouvés dans une dynamique dont l’épicentre est en Asie, ceci pendant plus de trois siècles. Les historiens considèrent que les Russes se débarrassent de la menace tatare avec la prise de Kazan en 1552 par Ivan IV dit le Terrible. Cela n’empêche pas ces derniers d’occuper encore une fois Moscou en 1571, et d’être en condition de rançonner des territoires russes jusqu’à la fin du XVIIe siècle. De là date la scission du monde slave entre ceux tournés vers l’Ouest – la Russie blanche, la Pologne – et ceux cultivant leurs spécificités.

À partir de cette époque, la menace asiatique diminue très sensiblement, la Russie commence son expansion vers les zones turco-mongoles. De plus, elle s’engage résolument dans l’histoire européenne. La première étape de cette mutation est le transfert de la capitale de Moscou à Saint-Pétersbourg, ville créée par Pierre le Grand au début du XVIIIe siècle pour contenir la menace suédoise.

Depuis, chaque fois qu’une guerre les a opposés à une entité venue de l’Ouest, les Russes l’ont emporté facilement et rapidement même au prix de quelques sacrifices. Les Polonais sont dissous en 1795 après avoir tenté de mettre la main sur Moscou en 1610. Les Suédois sont éliminés à la bataille de la Poltava en 1709 et ne dominent plus la Baltique ensuite. La France cesse d’être la grande puissance de l’Europe après 1812. Les Austro-Hongrois, principaux protagonistes de la guerre à l’Est en 1914-17, éclatent en 1918. Quant aux Allemands, après un match nul en 1914-17, les Russes les ramènent définitivement à Berlin en 1945. À cette époque, Anglais et Américains avaient bien envisagé d’aller jusqu’à Moscou, redevenue capitale de la Russie… soviétique en 1922, mais, prudents, ils renoncèrent à cette folie. Les rodomontades de l’Otan étaient là pour pousser la Russie dans une course à l’armement que son économie ne pouvait supporter, pas pour leur faire réellement la guerre, surtout chez eux. En outre, jamais les Russes n’ont envisagé un quart de seconde d’aller à Brest en Bretagne. Cette intox US fut entretenue pour justifier leur tutelle sur l’Europe de l’Ouest. « Große Propaganda » quand tu nous tiens…

On l’aura compris à travers cet ambitieux résumé de l’histoire russe de 769 mots : pour un Russe, la menace est à l’est, pas à l’ouest. Cette évidence constitue la colonne vertébrale de ce texte. Pendant les événements de Yougoslavie, les Russes résument cette conviction par : il nous a fallu cinq siècles pour vaincre les Turcs, cinq ans pour vaincre les Allemands, cinq jours pour vaincre l’Otan. Les Russes savent que jamais l’Ouest ne les attaquera chez eux. En revanche, ils ne peuvent pas avancer trop loin à l’ouest. Disons que la limite se situe à l’ouest de Berlin, terre slave dans leur imaginaire collectif, là où s’estompe la grande plaine d’Europe de l’Est.

À l’ouest rien de nouveau, à l’est on fait gaffe

En revanche, la menace venue de l’est est perçue avec beaucoup plus d’acuité. Ainsi, il est écrit dans tous les manuels d’histoire que l’armée russe performante était en Sibérie face au Japon avant l’hiver 1941. Confrontées à l’expansionnisme japonais, les troupes russes remportèrent une importante bataille en août 1939. Certes, les effectifs engagés étaient loin de ceux investis dans le conflit avec l’Axe, mais la qualité des troupes était élevée. Ce sont elles qui contre-attaqueront à Moscou pendant l’hiver 1941 après que les Japonais eurent définitivement abandonné la conquête de la Sibérie. Aujourd’hui, les Russes à l’est sont frontaliers des deuxième et troisième puissances du monde : la Chine et le Japon. La première, c’est plus de 1 milliard d’habitants et un PIB de plus de 8.000 milliards de dollars ; le second, c’est 4 milliards de dollars de PIB et une population de 130 millions d’habitants, soit un peu moins que la Russie. Mais alors que le Japon et la Chine sont homogènes ethniquement, la Russie réunit moins de 100 millions de Russes ethniques sur son territoire, pour un PIB de 2.000 milliards de dollars. À performance techno-scientifique identique, on l’aura compris, le rapport de forces est très déséquilibré à l’est.

À l’ouest il l’est aussi : l’UE réunit une population de 500 millions de membres pour un PIB de 16.000 milliards de dollars, mais il faut réunir 28 États pour atteindre ces chiffres alors qu’à l’est les deux protagonistes sont chacun dans un rapport de forces favorable a priori. En outre, alors que le Russe cultive une posture guerrière irréductible, chez nous il y a longtemps que nos meilleurs étudiants ont abandonné St-Cyr pour HEC. Nous sommes devenus des boutiquiers. Eux restent des guerriers.

Le Russe est toujours dans une posture guerrière imaginant être entouré d’ennemis voulant lui prendre son grand et vide territoire. Ainsi je me souviens d’une émission à la télé russe présentant le nombre de chars potentiellement contre les Russes. Schématiquement, il y en avait 10.000 côté russe et plus de 80.000 dans le reste du monde, dont la majeure partie pas loin de leurs frontières. C’est ainsi qu’ils se voient. Entourés d’ennemis.

Dans la vie de tous les jours le Russe cultive un art de l’adaptation et de la débrouille nulle part observable ailleurs. Ainsi, en Russie, quand vous déterminez un RDV vous êtes rappelé chaque jour quasiment pour le confirmer – je force un peu le trait. C’est vrai qu’ils savent que l’emploi du temps n’est pas la qualité fondamentale des Français. En France, ce manque de rigueur pénalise notre productivité alors que chez eux c’est un élément de leur instinct de survie. Pour s’en convaincre, il faut avoir entendu un Russe de haut niveau social invité à Paris dans une manifestation prestigieuse, résolu à dormir sur un banc public la nuit car la réservation à l’hôtel avait été mal gérée ; ou alors, à l’occasion d’une balade en canoë la nuit sur une rivière russe, s’apercevoir que le canoë fuit et de n’avoir comme réponse que « ce n’est pas grave car il ne fait pas froid » ; bien sûr, sans gilet de sauvetage, c’est encombrant… D’autres souvenirs pourraient compléter ces deux-là. Quel contraste avec la surprotection dont notre État-Tuteur confie aux pandores la tâche de respecter ses prescriptions ! Quand vous organisez quoi que ce soit avec un Russe, vous ne savez pas une minute avant ce qui va finalement se faire. Le plan se construit en même temps que vous avancez. Or, dans quelles circonstances doit-on faire preuve de flexibilité, sinon à la guerre ? Il suffit de lire dans Guerre et Paix comment Tolstoï se moque de l’Autrichien Veyroeter et de ses plans bien huilés, alors que Koutousov dort pendant l’ultime réunion de l’état-major, pour comprendre que cet esprit ne date ni d’hier ni d’aujourd’hui, mais est inscrit dans la génétique russe depuis des lustres. Chaque Russe, homme ou femme, est un guerrier, élevé et programmé pour se comporter ainsi.

Cessons de divaguer sur l’âme russe. Ils ont horreur qu’on les singularise. En revanche, ils rappellent tout le temps qu’une grande partie de leur territoire a été occupée par des Asiates pendant plus de trois siècles ; d’où les différences avec nous et une culture de la guerre spécifique.

L’art de la guerre russe

Habitués à combattre contre des Asiates innombrables et des Occidentaux plus organisés, les Russes ont surdéveloppé leur pensée stratégique ; d’où la nécessité pour eux d’avoir une profondeur stratégique, donc l’espace et le temps pour faire la guerre. Mais le handicap de cette posture est d’être très inférieur tactiquement à des armées de l’Ouest qui, elles, sont habituées à combattre sur des espaces restreints. Donc le Russe, pour l’emporter, tant à l’est qu’à l’ouest, doit posséder impérativement la profondeur stratégique, mais aussi un différentiel démographique lui permettant de supporter des pertes humaines importantes, conséquences de ses faiblesses tactiques. Face à l’Asie, il lui faut une parité démographique critique pour affronter les incommensurables masses humaines de ce continent.

Ceci a engendré une manière bien à eux de faire la guerre. Ainsi, selon les spécialistes, ils sont à l’origine de l’art opératif. Celui-ci se résume comme la capacité de penser la bataille dans un ensemble plus large que celui dû à la portée des armes, en associant vitesse et profondeur. L’art opératif s’interpose entre la stratégie et la tactique.

L’histoire militaire russe est à l’origine de cette spécificité. En effet, ils ne sont pas très forts au premier choc, et rarement, voire jamais, vainqueurs à l’issue d’un combat où la performance tactique détermine l’issue de la guerre.

Ainsi ils sont balayés par les armées de l’Axe en 1941, par les armées de Napoléon en 1812, par les au début du XVIIIe siècle. Dans ces trois conflits, ils redressèrent la barre en s’appuyant sur leur profondeur stratégique et leur supériorité démographique.

Mais quand ils ne le purent pas, cela faillit se transformer en débâcle. Il en est ainsi de leur intervention au cœur de l’Europe en 1799-1800. Ils ne durent alors leur salut qu’au génie de Souvorov. Rendus méfiants par cet épisode, ils restent prudemment derrière Blücher et Schwarzenberg pendant la campagne de France de 1814. Idem en Crimée (1853 à 1856), où malgré des troupes franco-anglaises décimées par le choléra, ils ne purent l’emporter dans une guerre dont l’issue dépendait d’une bataille décisive. On pourrait aussi parler de la Guerre de Corée contre les Japonais en 1905 et d’autres situations similaires.

La conséquence est que le Russe hésite à s’engager dans une guerre dont l’issue sera déterminée par une bataille décisive dont la performance tactique est la meilleure garantie. Pour bien comprendre cela, il faut opposer l’art de la guerre russe à l’art de la guerre allemand. Ces derniers n’ont en effet aucune profondeur stratégique. Ils sont encerclés dans des espaces réduits et escarpés. Contrairement aux Russes, les Allemands sont obligés de chercher la bataille décisive à cause de cette absence de profondeur stratégique. La conséquence est que leurs capacités stratégiques sont réduites. Pour eux, avoir la supériorité tactique est vital. Donc, pour vaincre, ils doivent l’emporter définitivement au premier choc, sinon, c’est fichu. L’histoire du territoire et du peuple allemand est suffisamment explicite pour s’en convaincre. La mentalité allemande en est la conséquence la plus manifeste. Ces différences s’expriment parfaitement dans l’esprit à l’origine du développement du char Tigre d’un côté et du T34 de l’autre. Les Allemands sacrifient tout à la supériorité technique du Tigre alors que les Russes font du T34 une arme dont la finalité est sa capacité submersive.

Quelles conclusions tirer de cette évocation militaro-historique de la Russie ?

La première est que les Russes ne menacent pas l’Europe de l’Ouest, même si demain ils retrouvent leurs frontières du Pacte de Varsovie. L’Otan et tout le reste ne furent et ne sont qu’une gigantesque entourloupe US. Les Russes savent aussi que nous ne les envahirons jamais avec succès.

La seconde est que nous devons les aider à se renforcer. Aujourd’hui, l’Asie, c’est près de deux milliards d’habitants, un des meilleurs potentiels techno-scientifiques du monde et, surtout, l’envie de mordre dans une Sibérie à portée de main, gorgée de ressources naturelles revendiquées au nom de l’Asiatisme. Or, la question du gaz sibérien n’est-elle pas décisive aujourd’hui ?

C’est dans cet esprit que doit être abordée la question ukrainienne.

À suivre.

 Frédéric Malaval
06/05/2014

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