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Le fatalisme, jusqu’où ?

Le fatalisme, jusqu’où ?

par | 22 janvier 2013 | Politique

Metapoinfos a reproduit sur son site un bon point de vue de Bertrand Renouvin, cueilli sur son blog et consacré à la présidence de François Hollande. Une analyse que le (modeste) sursaut dans l’affaire malienne ne remet pas fondamentalement en cause… À notre tour, séduits par la pertinence et l’originalité du propos, nous présentons ci-après cette analyse à nos lecteurs. Polémia

L’optimisme et le pessimisme sont des humeurs individuelles qui ne devraient pas affecter le jugement et la volonté politiques. Variables selon les jours et les saisons, l’état de santé et les heures de sommeil, ces états d’âme sont d’ordinaire dominés chez les politiques – pas seulement chez eux – par l’ambition, les convictions, les projets, en somme par des espérances ou une espérance.

Répondant à « l’appel, impératif, mais muet, de la France », Charles De Gaulle fit renaître l’espoir de la nation parce que lui-même ne cessa d’espérer dans les moments qui incitaient au pessimisme le plus noir. Cette espérance tenait au caractère de l’homme et à ses certitudes de politique et de stratège, mais plus encore : « Pas un illustre capitaine qui n’eût le goût et le sentiment du patrimoine et de l’esprit humain. Au fond des victoires d’Alexandre, on retrouve toujours Aristote… » écrivait-il dans Le fil de l’épée.

Tout homme d’État, aujourd’hui, devrait se souvenir avec Charles De Gaulle que « la véritable école du commandement est celle de la culture générale » et que le salut public exige la rectitude des convictions. Hélas, c’est le contraire que nous constatons. La culture générale s’est perdue dans les faux-semblants de la communication et il est recommandé, pour réussir, de répudier les idées non conformes.

François Hollande aurait pu rompre avec le prétendu réalisme des aventuriers politiques. Certains discours, de belle allure, le donnaient à penser. L’espoir était ténu. Il s’est amenuisé lorsqu’Éric Dupin nous expliqua, en juin, que le président de la République n’avait aucune vision de l’avenir et qu’il agirait selon les rapports de force (1). Les observations de notre invité, point hostile à François Hollande qu’il connaît depuis fort longtemps, sont maintenant prolongées dans un article qui précise le portrait (2). A l’inverse de la célèbre formule de Gramsci, François Hollande aurait « l’optimisme de l’intelligence et le pessimisme de la volonté ».

Cela signifie que nous sommes dirigés selon des humeurs. Éric Dupin décrit un homme d’une « sérénité à toute épreuve » et protégé par son humour, ce qui pourrait être positif. Cependant, « intimement persuadé que tout finira par s’améliorer en un juste retour des choses, il se garde de chercher à forcer le destin. Cet optimiste congénital laisse le volontarisme aux visionnaires naïfs et aux décideurs aventureux ». Pire : il s’est fabriqué une « philosophie benoîtement cyclique » qui procède de sa belle humeur et la conforte. D’où ses déclarations sur la fin de la crise de la zone euro et le retour de la croissance en 2013. D’où un « réalisme » tissé de concessions majeures aux banquiers, aux patrons, à la chancelière allemande – à tous ceux qui montrent ou montreront les dents. « Au final, l’optimisme bonhomme de Hollande fait le lit d’un fatalisme arrangeant » conclut Éric Dupin qui nous permet de comprendre ce qui nous arrive.

Cela ne nous rendra pas compréhensifs ! Avec François Hollande, nous sommes à l’opposé des chefs d’État et de gouvernement qui ont constitué notre pays, des premiers rois de France à Charles de Gaulle. Tous avaient la volonté de ne pas consentir aux rapports de force existants – ce qui leur permettait d’en créer de nouveaux, qui confortaient le projet commun. Tous refusaient les fausses figures de la fatalité. En ce début de siècle nous sommes passés de l’activisme de Nicolas Sarkozy – qui masquait la soumission aux financiers, l’alignement sur l’Allemagne et le retour dans l’OTAN – au fatalisme de François Hollande qui se contente d’entériner les mêmes dépendances. Nous sommes seuls, face à un président et un gouvernement qui ne veulent pas utiliser les pouvoirs considérables qu’ils détiennent selon la Constitution. Si rien ne s’arrange dans la crise de l’ultralibéralisme, nous irons vers une violence que François Hollande prévoit mais que nulle bonne étoile ne peut arrêter… De quels malheurs la France devrait-elle être frappée pour que le président de la République prenne les décisions salutaires ?

Bertrand Renouvin
Source : blog de Bertrand Renouvin,
13 janvier 2013

Notes

(1) Sa conférence aux « Mercredis de la NAR » a été publiée sous forme d’entretien dans Royaliste n° 1018, 17-30 septembre 2012. Cf. Éric Dupin, La victoire empoisonnée, Seuil, 2012.
(2) Cf. Slate.fr

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