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Italie : le défilé des clowns

Italie : le défilé des clowns

par | 23 février 2014 | Géopolitique

« En matière de sujétion les peuples méditerranéens ont prouvé leur endurance. »

La nomination de Matteo Renzi au poste de nouveau président du conseil italien n’est qu’une opération marketing dans le but de faire perdurer le Système en lui donnant un nouveau visage. L’opposition devra dépasser l’autocensure et la peur des insultes. Le temps n’est plus au changement des règles du jeu mais au changement de jeu. Audrey d’Aguanno fait le point sur la situation italienne.
Polémia

En matière de sujétion les peuples méditerranéens ont prouvé leur endurance.

Si, par deux fois déjà, le roi (pardon, le président de la République italienne) Giorgio Napolitano avait imposé ses commis au rôle de premier ministre, contournant ainsi la volonté populaire et son vote, il n’allait pas se gêner pour en imposer un troisième. Surtout si la manœuvre a pour finalité de rendre un peu plus humaine la grande spoliation, plaçant les rênes du pays dans les mains d’un vrai « jeune », un type carrément plus sympa que ses précurseurs, les technocrates aux allures robotiques Mario Monti et Enrico Letta.

Matteo Renzi, secrétaire du Partito democratico depuis décembre et maire de Florence jusqu’à hier, nous est présenté – insatiablement… une propagande aux limites du culte de la personnalité – comme un progressiste « cool » qui se balade en vélo et en jeans slim. « Le libéralisme est un concept de gauche »… les positions libérales de cet « homme de gauche » qui aime à se faire appeler « le démolisseur » (sic) a de quoi séduire les électorats de droite comme de gauche et ceux qui veulent du changement.

Mais, au-delà de ses grandes phrases sur la « démolition » de l’Establishment, sur les réformes qui révolutionneront à jamais le pays, ses propositions sont complètement floues. Son expérience est celle d’un administrateur local, ce qui, on en conviendra, est bien loin de suffire pour tenter de résoudre les problèmes que traverse l’Italie actuellement. Ce n’est donc pas sur la base d’un projet politique qu’il a été placé là (ajoutons que son prédécesseur était issu de son propre parti).

Pour comprendre Matteo Renzi ou plutôt sa nomination, c’est au choix de ses conseillers qu’il faut s’intéresser. Ces derniers, du requin de la haute finance au héraut de la privatisation ou de la dérégularisation, s’inscrivent dans la ligne directe des politiques de dépeçage de l’Italie initiée par ses prédécesseurs : un lent mais certain transfert de souveraineté de la nation vers les hautes sphères de la finance internationale. Citons Itzak Gutgeld, Michael Ledeen, Marco Carrai, David Serra, dont la tendance est à la vente des biens publics et entreprises d’Etat. Une des premières mesures de Renzi maire, la privatisation de l’entreprise de transport local de Florence, laissait déjà craindre le pire.

Et à l’annonce de son arrivée, les indicateurs économiques (bourse, spread, rating) réagissaient positivement.

Force est de constater que la nomination du jeune Matteo Renzi n’est qu’une opération marketing dans le but de faire perdurer le Système en lui donnant un nouveau visage. C’était un acte nécessaire après le bilan catastrophique des dix mois de gouvernement Letta dont les chiffres parlent d’eux-mêmes : 15% des Italiens vivent sous le seuil de pauvreté, la pression fiscale a atteint 53% du PIB, le chômage des jeunes 41%, et chaque jour ce sont 54 entreprises italiennes qui ferment leurs portes.

Les décisions étant prises ailleurs (lobby affairiste et banquier, Union européenne, troïka…), la sarabande des clowns de la politique nationale n’est que le énième spectacle pour leurrer et entretenir les foules.

Cependant, des soubresauts de réaction ont vu le jour ces derniers mois. Le peuple italien est descendu dans la rue pour exprimer sa colère, signe d’une capacité encore vivante de protestation. Pourtant, tout comme en France avec la Manif pour tous, les mouvements se sont épuisés d’eux-mêmes, bloqués, figés par une incapacité à se coaliser sur des thèmes de fond, à exprimer une ligne, des contenus forts, les décennies d’endoctrinement antinational les privant de toute intention de fonder un projet et de formuler des revendications politiques moins superficielles que le « Destituons-les ! ». Car tout ce qui s’oppose à l’idéologie libérale mondialiste rappelle forcément « les heures les plus sombres de l’histoire ». Les manifestants brandissant des fourches qui marchaient pour réclamer un abaissement des taxes et plus de protectionnisme étaient nécessairement des extrémistes, les manifestants pro-famille traditionnelle, des violents.

Chers concitoyens italiens, il faudra dépasser l’autocensure et la peur des insultes. Ce n’est que par une remise en question en profondeur des valeurs de la société libérale occidentale qu’une véritable transformation pourra être opérée. Le temps n’est plus au changement des règles du jeu mais au changement de jeu.

Audrey D’Aguanno
19/02/2014

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