L'Idéologie de la superclasse mondiale (2e partie)

samedi 23 juillet 2011

En octobre 2009, le Club de l’Horloge a consacré sa XXVe Université annuelle à « Crise économique : la responsabilité de la superclasse mondiale ». Henry de Lesquen y a consacré une conférence à l’idéologie de la superclasse mondiale (SCM). Polémia met ce texte à la disposition de ses lecteurs en quatre « livraisons : un réseau mondial de personnes déracinées et dénationalisées ; une prétention au « despotisme éclairé » ; une philosophie sous-jacente : le cosmopolitisme ; la superclasse mondiale responsable de la crise. L’ensemble du texte est aussi disponible en PDF. (*) Polémia poursuit ici la publication du texte d’Henry de Lesquen.

Polémia.

 

La superclasse mondiale : une prétention au « despotisme éclairé »

La superclasse mondiale a hérité des soi-disant « Lumières » du XVIIIe siècle la prétention au « despotisme éclairé », qu'elle camoufle sous des oripeaux pseudo-démocratiques. Les membres de la SCM méprisent le peuple et font peu de cas de la démocratie authentique. Ils ont notamment horreur des référendums... L'affaire de la Constitution européenne en fournit un exemple magistral. Repoussée par les peuples français et néerlandais en 2005, elle a été maquillée sous la forme du traité de Lisbonne, que l'on s'est bien gardé de soumettre au référendum, sauf en Irlande, parce qu'il était obligatoire. Et l'on sait que les pauvres Irlandais, qui avaient d'abord voté « non » en juin 2008, ont dû se déjuger en octobre 2009.

Les moyens de brider la démocratie : supranationalité et état de droit

Pour brider la démocratie, qu'elle dénigre sous le nom de populisme, la SCM a trois principaux axes d'action :

  1.  la supranationalité, qui éloigne le pouvoir des citoyens ;
  2.  « l'Etat de droit » (traduction de l'allemand Rechtsstaat, équivalent de l'anglais rule of law, le règne du droit), qui aboutit en pratique au gouvernement des juges et vide la politique de son contenu ;
  3.  l'étourdissement médiatique, étant entendu que les media se font presque unanimement les relais de ses orientations politico-idéologiques (heureuse exception en Autriche : la Kronen Zeitung, qui tire à un million d'exemplaires, ce qui explique le succès des parti populistes et anti-européens).

La SCM est paradoxalement assistée, dans son action anti-démocratique, par l'extrême gauche, qui se prétend anticapitaliste, mais qui joue le rôle de l'idiot utile de la mondialisation antinationale, en particulier dans ses campagnes pour l'immigration. (Voir l'intervention de Jean-Yves Le Gallou sur Les convergences paradoxales de l'extrême gauche et de la superclasse mondiale)

La victime de cette double subversion, qui s'exerce par le haut et par le bas, c'est le peuple des autochtones, chez nous les Français de souche, qui se voit dépossédé peu à peu et simultanément, de son territoire, de plus en plus occupé, et de sa souveraineté, de plus en plus nominale.

Hostilité aux patries et aux identités

Hostile aux patries et aux identités, la superclasse mondiale rejette la souveraineté des nations dans les poubelles de l'histoire et s'emploie à mettre en place un gouvernement mondial. Elle défend le droit d'ingérence et applaudit les Américains quand ils agressent des Etats indépendants, comme la Serbie ou l'Irak.

Les Etats-Unis sont une référence pour les membres de la super-classe mondiale qui font leurs, en général, les visées de l'impérialisme américain. Il n'y a pas cependant de parfait accord entre l'une et l'autre. Les vrais patriotes américains, comme Huntington, ne veulent perdre ni leur identité ni leur souveraineté. La superclasse mondiale entre donc nécessairement en conflit avec les intérêts nationaux américains, comme le montrent les péripéties du tribunal pénal international ou celles du protocole de Kyoto.

Favorable aux oligopoles et aux monopoles

Contrairement à la légende, la superclasse mondiale n'est pas à proprement parler libérale, au sens français du terme. Elle n'a rien, bien au contraire, contre les monopoles et les oligopoles. Et elle est fort encline à soutenir les relances budgétaires qui gonflent les profits des entreprises, comme cela est apparu, de façon caricaturale, après le déclenchement de la crise économique, quand on a vu l'homme qu'elle a fait élire à la présidence des Etats-Unis, Barack Obama, porter le déficit des finances publiques américaines à 10 % du PIB. Elle n'est pas non plus hostile à la redistribution des revenus qui s'exerce surtout au détriment des classes moyennes, dans chaque pays, et qui permet de calmer les « petites gens »...

Sans-frontiériste et « antiraciste »

Mais la superclasse mondiale est radicalement libre-échangiste et immigrationniste. Elle veut un monde sans frontières et n'admet pas que celles-ci puissent faire obstacle aux mouvements des hommes, des capitaux et des marchandises.

La SCM est antiraciste. C'est même ce parti pris antiraciste qui lui a permis de se former en s'affranchissant des limites identitaires, toujours plus ou moins ancrées dans la race. Cet antiracisme est manifeste dans la politique des grands groupes, qui ne cessent d'en rajouter dans l'éloge de la prétendue « diversité », c'est-à-dire de l'hétérogénéité ethnique. Ils pratiquent avec enthousiasme une politique de discrimination qui devrait tomber sous le coup de la loi, en bonne logique juridique, mais qui est ouvertement promue par les gens qui nous gouvernent, dès lors qu'il s'agit de préférer les étrangers aux Français, les immigrés aux Français de souche, les musulmans aux chrétiens, les noirs aux blancs... Gérard Mestrallet, p.-d.g de GDF-Suez, écrit ainsi dans Le Monde des 4-5 octobre 2009, au cours d'un dialogue avec Fadela Amara, ministre de M. Sarkozy et issue de SOS-Racisme : « Aujourd'hui, il est évident pour toutes les grandes entreprises que la diversité est un avantage concurrentiel. (...) Regardez le Brésil. Le fait d'être une société totalement métissée lui donne une force inouïe. Pour moi, c'est un des principaux facteurs de son émergence parmi les grandes puissances. » M. Mestrallet ne connaît visiblement pas la réalité de la situation sociale du Brésil, qui est presque exclusivement dirigé par des blancs, et il aurait pu se demander si les difficultés sociales qui résultent de son hétérogénéité raciale ne sont pas pour quelque chose dans le retard que ce pays a pris dans son développement, pendant deux siècles... ce qui n'est pas rien.

La crise financière est partie des Etats-Unis, comme en 1929, mais ses origines sont, cette fois-ci, bien différentes. On peut dire, en effet, que l'antiracisme a été la cause immédiate et directe de la crise financière ! Chacun a entendu parler des fameux crédits « subprime », c'est-à-dire, en français, de seconde qualité. A partir de 1992, l'Etat américain avait décidé de favoriser l'accession à la propriété de leur logement des membres des minorités ethniques, principalement les noirs et les « Hispaniques », comme on appelle aux Etats-Unis les métis de langue espagnole. Il a, dans ce but, utilisé deux organismes théoriquement privés, mais assujettis en réalité à la tutelle publique, et joliment surnommés Fannie Mae et Freddie Mac, pour alimenter sans limite le marché du refinancement des prêts au logement, et pour ainsi faire en sorte que les banques, sûres de pouvoir se défausser de leurs créances douteuses sur des institutions paragouvernementales, consentent à prêter les yeux fermés à des noirs ou à des métis potentiellement insolvables.

En 1995, l'Etat américain a renforcé une loi antidiscriminatoire de 1977, le Community Reinvestment Act, pour sanctionner les banques qui n'accompagneraient pas suffisamment la politique du logement dont nous avons parlé. Comme l'écrit Vincent Bénard, président de l'Institut Hayek de Bruxelles, « les banques durent abandonner partiellement le rôle prudentiel qu'elle jouent habituellement lorsqu'elles refusent un prêt à une personne objectivement peu solvable » (Le Figaro du 9 septembre 2008). Elles l'ont fait d'autant plus volontiers qu'elles croyaient ne pas risquer grand-chose, puisque les crédits qui ne pouvaient pas être transférés à Fannie Mae et Freddie Mac étaient « titrisés », c'est-à-dire disséminés dans l'ensemble du secteur financier. Les crédits de seconde qualité, souscrits principalement par des membres des minorités en question, ont fini par représenter trois trillions (3.000 milliards) de dollars.

Les banquiers américains ont bel et bien été irresponsables en incitant les membres des minorités à s'endetter inconsidérément. Le résultat - après la chute des prix de l'immobilier, qui a entraîné celle des prêts « subprime » -, c'est qu'ils ont réussi à faire à la fois le malheur des noirs (et des métis hispaniques), dont on saisit les logements, et celui des blancs, qui doivent mettre la main au portefeuille pour renflouer les banques : c'est le plan Paulson, qui consiste, en quelque sorte, à faire financer les dettes des noirs par les impôts des blancs.

Un mondialisme structuré

L'idéologie de la super-classe mondiale, qui est devenue peu ou prou, dans chaque pays, l'idéologie dominante, n'est pas un vague état d'esprit qui se serait formé spontanément dans les milieux des affaires. C'est un « mondialisme » structuré, et l'on peut même affirmer que cette idéologie se caractérise fondamentalement par la fausse équivalence qu'elle établit entre mondialisme et mondialisation (c'est ce dont nous parlera plus particulièrement Philippe Baccou dans la conclusion de cette université). Mais elle n'est pas seulement une conception de la société, elle implique aussi et avant tout une conception de l'homme, laquelle repose sur une philosophie sous-jacente : le cosmopolitisme.

Henry de Lesquen
Club de l’Horloge
Octobre 2009

(*) Ici le texte intégral en PDF

Voir : L'Idéologie de la superclasse mondiale (1re partie)

Voir aussi les textes de Michel Geoffroy, Jean-Yves Le Gallou et Gérard Dussouy :

La généalogie de la superclasse mondiale (Première partie)
La généalogie de la superclasse mondiale (Deuxième partie - Suite et fin)
Les convergences paradoxales de l'extrême gauche et de la superclasse mondiale
Essor de la « superclasse globale » (ou hyperclasse) et crise des classes moyennes

Correspondance Polémia – 23/07/2011

Image : World Economic Forum Annual Meeting à Davos

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