Les 20 ans du « Radeau de Mahomet »

lundi 5 mai 2003
Jean-Pierre Péroncel-Hugoz, grand reporter au « Monde », ancien correspondant de ce quotidien au Maghreb puis au Proche-Orient, est l’auteur de six essais dont le plus marquant est « Le Radeau de Mahomet », publié en 1983. Dans l’incrédulité ou l’hostilité quasi générales, il pointa, il y a 20 ans déjà, les risques qu’allaient faire courir à la France le nouveau dynamisme musulman en Europe. L’interview qui suit est une invitation à lire et relire ce document capital, qui n’a malheureusement pas pris une ride. Une invitation que n’a pas cru devoir suivre l’actuel ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy…

Question : Quel événement vous a mis sur la piste de l’absolutisme mahométan ?
Jean-Pierre Péroncel-Hugoz : De la guerre du Kippour en 1973 à l’assassinat de Sadate en 1981, j’étais correspondant du « Monde » au Caire. J’avais appris l’arabe dialectal. Tout ce que j’entendais ou voyais au Proche-Orient me montrait que l’Islam, ayant pu mettre au service de sa foi d’acier ses nouveaux moyens démographiques et pétroliers, les deux dus aux découvertes occidentales, piaffait de reprendre son expansion arrêtée depuis sa défaite devant Vienne en 1683 puis par la colonisation européenne. Projet légitime d’un point de vue musulman, mais dangereux pour les non-musulmans.

Q : Le « Radeau » se heurta au tir de barrage des « Turcs de profession »…
J-P P-H : Oui, j’avais ressorti cette expression appliquée jadis aux Européens qui, pour qu’on leur fiche la paix en terre d’Islam, comme le fit d’ailleurs aussi Bonaparte en Egypte, faisaient mine en Orient d’adhérer aux croyances musulmanes. À notre poque, nombre d’intellectuels méritent le qualificatif de « Turc de profession » pour leur complaisance à l’égard de comportements musulmans actuels envers les non-musulmans, les femmes, les animaux, contraires à nos lois et usages et souvent suivis sur notre sol de demandes communautaires dérogatoires. Dans des domaines aussi divers que le port du voile, y compris sur les photos officielles, le financement de mosquées par l’Etat, l’enseignement de l’Histoire de France, l’abatage d’animaux sans l’étourdissement préalable obligatoire, le ramadan à l’école laïque, l’interdiction pour un musulman de changer de religion, etc…

Q : Pourquoi ne pas réécrire un nouveau livre sur tous ces sujets concrets dans la France de 2003 ?
J-P P-H : Cela reviendrait à écrire le même ouvrage qu’il y a deux décennies avec quelques fournées d’exemples en plus, allant tous dans le sens d’une installation au milieu de la société française d’une entité islamique ayant ses propres us et codes et plaçant Allah et la loi coranique au-dessus de tout, alors que chez nous c’est la loi civile qui a le pas sur tout, y compris la religion… Ce qui se passe dans nos banlieues et ailleurs est le reflet du conflit commençant entre ces deux sociétés - hélas ! - antinomiques.

Q : Comment en est-on arrivé là, en France même ?
J-P P-H : Par la démographie ! Le 7 mai 1963, selon Alain Peyrefitte, en Conseil des ministres, moins d’un an après l’indépendance algérienne, de Gaulle piqua une colère car il y avait eu 40 000 immigrants algériens chez nous en avril, soit presque autant que de naissances en France le même mois. Il demanda des mesures, en concluant : « J’aimerais qu’il naisse plus de bébés en France et qu’il y vienne moins d’immigrés. Vraiment point trop n’en faut ! ». De Gaulle ne fut pas obéi et en 1976, le duo Giscard-Chirac, au nom des « bons sentiments » et en toute inconscience de l’hypothèque qu’il jetait sur notre unité nationale, autorisa le regroupement familial des immigrés. Résultat, une génération plus tard nous avons dans l’Hexagone approximativement 7 millions de musulmans, au lieu d’un ou 2 millions… Certes, beaucoup de ces étrangers, tout en conservant évidemment leur confession d’origine, se sont individuellement intégrés à la communauté française, mais la majorité d’entre eux, encouragés d’ailleurs par la mode irresponsable du « droit à la différence », constituent maintenant un monde à part, non à cause de notre prétendu « racisme » mais d’injonctions coraniques ordonnant aux musulmans : « ne prenez pas pour amis les juifs et les chrétiens » !

Q : L’avenir vous paraît-il si sombre ?
J-P P-H : Pas besoin d’être Elisabeth Teissier pour voir que notre avenir et plus généralement celui de l’Europe occidentale sera celui que souhaitent les Etats-Unis : à savoir un continent affaibli en permanence par des conflits à la libanaise ou à la kossovare et où les musulmans, grâce encore une fois à leur vigoureuse natalité et à nos principes de liberté, pousseront peu à peu leurs pions au détriment des non-musulmans. Des affrontements interconfessionnels interminables empêcheront l’émergence de toute puissance en Europe capable de tenir la dragée haute à Washington, lequel, après avoir favorisé Islamo-Bosniasques et Kosovalbanais, avec l’aide de la frivole Union européenne, intime maintenant l’ordre à celle-ci d’accueillir en son sein les septante millions de Turcs… Islam et Oncle Sam se chamaillent, s’entretuent même, mais, en Europe, leurs intérêts convergent vers l’instauration d’une Islamérique sur Seine, sur Rhin ou sur Tibre… Il est possible que, de ces bouleversements, surgisse dans quelques décennies une nouvelle civilisation. L’ennui c’est que ceux qui voudraient légitimement prolonger ce qui reste de la nôtre et est encore considérable, ne peuvent agir sans se voir taxer d’ « islamophobie » ou d’ « anti-américanisme »…


Propos recueillis par P.P.
SOURCE : Lettre d’information sur l’Europe et la PESC
Février 2003, p. 18.


« Le Radeau de Mahomet », Champs Flammarion (réédition 1999), 253 pages, 7 euros.

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