Les femmes dans le Coran

jeudi 7 février 2002
Il y en a 5.

Aux yeux d’Allah 5 femmes seulement sont dignes d’être honorées et citées en exemple : Assya, la femme de Pharaon, la mère de Marie, la deuxième femme d’Abraham, la femme de Zacharie et Balkis la reine de Saba.

Curieusement, une autre n’est pas nommée, j’y reviendrai plus loin.

Le statut de la femme dans le Coran est une question qui suscite de nombreux conflits d’opinion car elle est celle qui résume le mieux l’absolue contradiction qui existe entre notre mode de vie et celui des musulmans du monde entier.

Le Coran est l’ensemble des révélations divines transmises par Mahomet, mises par écrit après sa mort pour constituer l’une des bases de la Loi musulmane, l’autre base étant la Sunna, ou coutume du Prophète, bâtie à partir du hadith qui est recueil des témoignages de sa famille, de ses proches et de ses successeurs.

En tant que Parole de Dieu, le Coran présente un certain nombre de caractères spécifiques :
· il est immuable : la Parole de Dieu ne peut être mise en doute,
· il est définitif : les comportements qu’il impose aux croyants sont des éléments indivisibles et indissociables de l’islam,
· il est totalitaire : ces réglementations auxquelles le musulman doit se soumettre s’appliquent autant à la vie religieuse et cultuelle qu’au domaine social et politique.

En tant que texte écrit, son histoire mérite d’être rappelée brièvement car elle est explique le caractère archaïque et barbare de certaines dispositions notamment celles qui concernent les femmes.

Les messages divins révélés sont confiés à la mémoire et transmis oralement de bouche à oreille. C’est après la mort du Prophète que le besoin de fixer les messages par l’écriture s’est fait sentir : le beau-père de Mahomet, Abou Bakr procède alors une première rédaction, puis trente ans plus tard le calife Othman commande vers 650 une nouvelle recension opérée sur une base plus large et plus systématique. Une vulgate officielle est ainsi réalisée mais plusieurs « lectures » du Coran cohabitèrent pendant les premiers siècles de l’hégire. De fait, la mise en œuvre de la Loi et l’explicitation du Coran est confiée aux juristes, oulémas, imams et cadis, qui s’emploient à bâtir la Loi, conformément aux préceptes de Mahomet nonobstant les contradictions et les obscurités du texte initial.
C’est le temps de l’ijtihad ou « temps de réflexion ».

Cette construction progressive de la Loi sera brutalement stoppée au XIe siècle par la fermeture de la porte de l’ijtihad, autrement dit la clôture de l’effort législatif et de l’interprétation doctrinale au motif que les principaux problèmes sont résolus et que toutes les solutions se trouvent désormais dans le Coran .

Le canon de la Vulgate coranique a donc été définitivement fixé il y a 1000 ans ! Il perpétue le modèle traditionnel de la famille patriarcale, agnatique (qui définit la parenté par le mâle) et polygame.
Les droits et les devoirs sont irrémédiablement conçus en fonction d’une division sexuelle des rôles donnant la prééminence au père, à l’époux, au fils et plaçant à jamais les femmes sous contrôle masculin.
Depuis 1000 ans, ce modèle momifié s’est mué en droit sacré et immuable, entretenant par là le mythe de sa conformité aux recommandations divines

Il est nécessaire de l’envisager au triple point de vue de religieux, juridique et social.

RELIGION

Du point de vue religieux la femme apparaît a priori comme une créature de Dieu à l’égal de l’homme : la croyante se trouverait en principe sur le même pied que le croyant, appelée elle aussi à servir Dieu selon les exigences de la Loi, c’est à dire soumises aux mêmes obligations cultuelles et morales.
Mais l’islam entretient un soupçon tenace à l’égard de la foi des femmes, ce qu’un hadith résume en disant « Les femmes manquent de raison et de religion. »
La femme n’est plus autorisée quand elle a ses règles à participer à la prière, ni à pratiquer le jeûne, ni même à réciter valablement le Coran, toutes prescriptions obligatoires pour les fidèles à part entière, les hommes. Pour l’accomplissement des rites du Pèlerinage à La Mekke, le vêtement spécial requis est réservé aux hommes.
Mais la plus significative sans doute des discriminations dont sont victimes les femmes est celle du vendredi : la prière du vendredi est interdite aux femmes. Or cette prière célébrée à la grande-mosquée dès que la communauté atteint un certain nombre de fidèles ( 12 ou 40 selon les usages locaux ou les circonstances) est la manifestation fondamentale de l’existence de la communauté musulmane. L’assistance y est obligatoire pour les homes. Elle est dirigée par un imam qui y prononce la harangue religieuse et politique qui guide et conduit la communauté.

L’interdiction faite aux femmes d’y assister confirme qu’elles ne sont pas des membres à part entière de la communauté. Ce qui est sur le plan religieux la traduction de la suspicion de l’islam vis à vis des femmes et sur le plan social et politique, l’aveu du mépris dans lequel on tient leur opinion.

JURIDIQUE

Du point de vue juridique, en ne tenant compte que de la loi sans entrer dans les variations localement imposées par la coutume, la situation de la femme est cette d’une éternelle mineure : Les hommes sont les tuteurs des femmes du fait que Dieu a préféré ceux-ci à celles-là (IV, 38) et elle passe de la tutelle de sa famille à celle de son époux.
Les hommes ont autorité sur les femmes en raison des faveurs qu’Allah accorde à ceux-là sur celles-ci, et aussi à cause des dépenses qu’ils font sur leurs biens. (IV 34)

Mariage et polygamie

Le mariage est réglementé par le Coran dont les dispositions, qui selon les historiens auraient amélioré la défense de la femme par rapport aux traditions arabes antéislamiques, n’en consacrent pas moins l’infériorité du statut de la femme.
Le Coran affirme que l’épouse doit être en permanence à la disposition de son mari Vos femmes sont un champ de labour ; venez à votre champ de labour comme vous voulez (II, 223)
Quel que soit son age et sa situation, la femme est soumise à la tutelle matrimoniale exercée par ses parents masculins selon un classement établi par la Charia (fils, père, tuteur, frère, etc…) et la femme pour se marier doit demander l’accord des tuteurs ; en revanche, le consentement d’une mineure n’est pas obligatoire car son père ou son tuteur peut la marier en exerçant le droit de contrainte qui est admis par la Loi.
Théoriquement le mariage n’est possible qu’entre musulmans. Cette règle s’applique rigoureusement aux femmes : le mariage avec un non musulman est absolument interdit à la musulmane ; pour l’homme, la règle admet un tempérament : un musulman peut épouser une infidèle à la condition néanmoins qu’elle se soit convertie à l’Islam avant la célébration du mariage. Le machisme intrinsèque de l’islam transparaît ici : d’une part, la femme est par nature inférieure à l’homme puisque tout homme, même un infidèle, a la prééminence sur son épouse même musulmane. Plus subtil à décrypter mais bien réel, le doute qu’entretient l’Islam sur la religion des femmes est sensible ici : d’une part la qualité de croyante ne peut relever la femme de son infériorité naturelle et d’autre part l’engagement religieux de la femme a si peu d’importance qu’il n’y pas finalement pas grande différence entre une convertie de fraîche date et une vraie musulmane de souche, l’une et l’autre sont épousables semblablement.

Selon les textes, le mari doit verser à la femme une dot qui restera la propriété de l’épouse même en cas de répudiation … mais le versement de cette dot peut s’effectuer en plusieurs fois …et certains rites se contentent de la seule promesse de dot !

Une fois mariée la femme abandonne la famille de ses parents pour entrer dans celle de son mari ; elle va vivre dans la maison du mari, souvent avec la belle-mère, et elle ne pourra en sortir qu’avec le consentement exprès.
Pour toute sa vie, elle est légalement soumise à l’autorité du mari et le patrimoine familial est en indivision géré par le mari.

La polygamie

Le statut d’épouse, s’il lui garantit théoriquement une certaine autonomie financière, ne l’autorise pas pour autant à empêcher son mari de prendre d’autres épouses et concubines.
La loi précise que l’homme peut disposer de quatre épouses tout en continuant à pratiquer le concubinage avec autant de femmes qu’il lui convient. Il est permis d’épouser deux, trois, quatre parmi les femmes qui vous plaisent (IV, 3) Bien sûr le contraire est interdit, les femmes ne peuvent pratiquer la polyandrie Celles de vos femmes qui forniquent, faites témoigner à leur encontre quatre d’entre vous. S’ils témoignent, alors confinez ces femmes dans vos maisons jusqu’à ce que mort les rappelle ou qu’Allah décrète un autre ordre à leur égard. (IV, 15)
et, comme on le verra plus loin, elle n’a pas l’initiative de la rupture du mariage.

La famille

Les possibilités offertes par la polygamie et le concubinage, combinées au statut discriminatoire de la femme donnent à la famille musulmane un aspect particulier. La parenté est dominée par la ligne paternelle et la filiation légitime rattache l’enfant à son père.
Si l’éducation des jeunes enfants est confiée à la mère elle n’en a la « garde » que jusqu’à leur puberté. En cas de dissolution du mariage, elle gardera auprès d’elle les plus jeunes à la condition qu’elle fasse l’objet de bons renseignements …
Le mari musulman est autorisé aux voies de fait et châtiment corporels pour maintenir l’épouse dans le droit chemin :
Et quant à celles dont vous craignez la désobéissance, exhortez les, éloignez vous d’elle et frappez les (IV, 34)

La répudiation

Elle n’est pas non plus à l’abri du risque permanent d’être répudiée par l’effet immédiat d’une décision masculine, Le mariage peut être rompu par une répudiation unilatérale du mari qui est extrêmement simple : il lui suffit de répéter trois fois la formule « je te répudie » sans avoir à fournir de motif.
La femme répudiée conserve théoriquement sa dot, pour peu qu’elle lui ait été versée.
Si c’est la femme qui souhaite rompre le mariage, il lui faut porter plainte ; la dissolution sera éventuellement prononcer par le cadi s’il estime que les motifs invoqués par l’épouse sont recevables.. Il n’existe aujourd’hui au monde que deux pays où la polygamie est officiellement interdite, la Turquie depuis les réformes de Mustapha Kemal et la Tunisie depuis 1957.

Héritage

De fait, la femme mariée ou répudiée a la capacité d’hériter même si l’héritage, selon les dispositions de la loi et des versets du Coran, est soumis à des règles impératives de répartition du patrimoine qui reconnaissent la suprématie de l’homme sur la femme.

D’une manière générale, elle ne peut recevoir que la moitié de ce qui serait du à un homme.
A vous la moitié de ce que laissent vos épouses si elles n’ont pas d’enfants, le quart si elles ont un enfant ; à elles, le quart de ce que vous laissez si vous n’avez pas d’enfant, si vous avez un enfant, à elles le huitième de ce que vous laissez (IV, 12)
Au mâle, portion semblable à celle de deux filles (IV, 8)
Domaine judiciaire

La femme n’est pas d’avantage l’égale de l’homme en matière judiciaire puisque le témoignage d’une femme ne vaut que la moitié de celui d’un homme
Faites en témoigner par deux témoins d’entre vos hommes ; et à défaut de deux hommes, un homme et deux femmes d’entre ceux que vous agréez comme témoin (II, 228)
Vie sociale

La vie sociale des femmes est toute entière résumée dans ce verset :
Restez dans vos foyers et ne vous exhibez pas à la manière des femmes d’avant l’Islam (XXXIII, 33)
Exclue de l’espace public et des fonctions de magistère, confinée à la domesticité et au travail de reproduction, les femmes sont soumises à l’autorité des hommes, maîtres de leur existence quotidienne et chargés de les maintenir dans le bon chemin en ayant droit à leur docilité !
Un hadith rapporte les propos du Prophète qui confirme ce cantonnement de la femme au logis du mari : « Ne t’interroge pas à propos de trois personnes : un homme qui a quitté la communauté, désobéi à son imam et est mort rebelle, un esclave qui meurt en fuite et une femme dont le mari s’est absenté et qui s’exhibe pendant son absence »,
Quant à elles, elles ont des droits équivalents à leurs obligations, conformément à la bienséance. Mais les hommes ont cependant une prédominance sur elles. (II 28)
Des hadiths nombreux et authentiques confirment cette subordination des épouses à leur mari. On y lit par exemple « Un musulman ne peut tirer meilleur profit de l’islam qu’une épouse musulmane qui plait à son mari, obéit à ses ordres et protège son honneur et des biens en son absence. »
De même « elle ne doit pas sortir de la maison sans le consentement de son mari et doit obéir à ses ordres. »

Le port du voile et la bienséance

Des versets coraniques recommandent aux femmes une tenue modeste
Dis à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants de serrer sur elles leurs voiles (XXXIII, 59)
Dis aux croyantes de baisser leur regard, d’être chastes, de ne montrer de leurs atours que ce qui en paraît. Qu’elles rabattent leur voile sur leur poitrine ! (XXIV 31)
En se fondant sur ces versets, les musulmans ont imposé aux femmes le port du voile, éventuellement masquant le visage et les ont réduites à une vie de bétail conforme à la bienséance, notion importante qui englobe les actes recommandés dans la vie quotidienne et justifiés généralement par le hadith quand ils ne sont pas directement tirés du Coran.
C’est cette « bienséance islamique » qui donne naissance à tous les délires musulmans contre les femmes, de l’interdiction du parfum au tchador en passant par l’interdiction d’apprendre et d’enseigner ou de conduire une voiture, dont on nous parlera en détails tout à l’heure. Il me reste à évoquer un dernière et atroce aspect du statut de la femme en terre d’islam.
Dans certains milieux, en Egypte et en Afrique noire, l’excision des petites filles ressort de la bienséance islamique, et serait recommandée par certains hadiths . Il n’en demeure pas moins que le Prophète Mahomet n’a pas interdit cette pratique.
Quand il est question des femmes et des hommes, de leurs rapports, de leurs relations, il est difficile de nos jours d’ignorer les avancées de la psychanalyse, qui, en l’occurrence fait une remarque que je vous soumettrai en guise de conclusion.
La femme absente du Coran - à laquelle je faisais allusion en commençant cet exposé - c’est Agar, la mère d‘Ismaël, l’ancêtre des Arabes, alors que tous les protagonistes de la Genèse sont présents, (y compris Sara, sa rivale, la première femme d’Abraham).
Il s’agit là d’un fait qui n’est pas neutre et qui a des conséquences irrémédiables sur l’ensemble de l’édifice symbolique de l’islam : après l’effacement de la Mère, la négation de la Femme, l’ordre patriarcal et viriliste peut s’installer. Caractérisé par la confusion entre le père géniteur, le père symbolique et le maître, cet ordre est fondé sur la peur et sur la haine des femmes « auxiliaires du démon ».

C’est cet ordre archaïque et barbare qui est contenu dans le Coran.
Et enfin, comme en France tout se termine par des chansons, je voudrais vous citer la « meilleure chanson » aux Victoires de la Musique en 1987.
Voilées pour ne pas être vues
Cernées d’un silence absolu
Les femmes ont pour leur lassitude
Des jardins clos de solitude
Le long sanglot des Musulmanes
C’est un cri c’est un chant
C’est aussi la douleur et le sang
Toutes les fureurs qu’elles portent en elles
La peur des hommes, la peur du ciel
Pour elles le temps s’est arrêté
C’est à jamais l’éternité
Le crépuscule de Sanaa

15 ans après, je ne suis pas sûre que Michel Sardou aurait encore le droit de chanter ça.


Véronique Péan
Colloque « Les femmes face à l’islam »
Paris, 7/02/2002
Archives Polemia